«Big Data Djihad», c’est une histoire d’amour vache, de réseaux sociaux HS, des émotions édulcorées, un Dieu qui ne compte que les larmes des femmes, un monde «qui pue la merde» car peuplé de «trous de balles». Dans un registre cru, Hicham Lasri dépeint donc une humanité enracinée dans la peur, qui fait le sel du monde moderne.
Le360 vous convie à découvrir les bonnes feuilles d’un roman décrivant un anti-héros génial, qui casse Internet pour punir une influenceuse qui l’a quitté, sans que toutes les polices du monde ne parviennent à savoir ni comment, ni pourquoi.
Je laisse le monde sans esprit, sans raison, sans motivation, et que crèvent les coryphées et que crèvent les chants antiques. Cette pièce de théâtre est à la hauteur de ma folie ambiante du siècle précédent. Et que crève la femme en gésine: le siècle ne naîtra pas de ses entrailles. Le siècle sera étique, son anémie nourrira la vermine du futur. Elle est où ma Pute de Dos? Elle est où maintenant? Qui se rappellera d’elle maintenant que les millions de voyeurs se sont évaporés dans l’Holodomor digital?
Oui, étriquerie, petitesse... Oui, chasseur de murmures secrets, traqueur d’échos immortels. Je le suis... Un homme petit, petit... tellement petit, à peine visible depuis la Lune... Et je vais cracher sur son visage ce que m’a dit le vieux griot Senghor: est-ce donc vrai que l’ennemi lui a dérobé son visage? Mon crachat sera une grasse question rhétorique que tu ne pourras jamais enlever et sera une tache de vin sur ton âme, une tache de naissance, une mauvaise naissance. Et avant de partir, je vais te laisser te noyer dans la sueur de ton angoisse.
Une eau tépide où flotte un parfum de mort, de maladie, et le destin qui surnage en essayant de conjurer la baraka. Je vais te regarder être embastillée, stalaguisée, goulaguifiée, kolkhozée, kibboutzifiée, laissée pour morte sur les rivages de cette vie bien réelle, bien matérielle... Quand tous les admirateurs virtuels auraient été découragés par la nouvelle aube digitale, rattrapés par la lassitude et détournés de la chose numérique, de la vulgarité de l’intouchable...
Ce monde n’est qu’une illusion et il est gigantesque, tellement gros qu’il a des feux de recul et le bruit agaçant qui va avec: et il est temps de faire reculer le Béhémoth. Je sais que tu es restée coincée très longtemps dans tes illusions, et maintenant va chercher un pied-de-biche pour te dégager de leurs cadavres. Ha ha!... Je regarde ceux qui ont mis tous leurs œufs dans le panier digital. Une triste et méprisable engeance. En sautant de joie ils sont tombés dans la misère. Voilà! Et sur une douce musique de frein à disque, je les regarde s’étrangler avec le fil du téléphone sans fil, s’étriper avec le couteau à beurre, se déchirer avec du Velcro tandis que le poisson a bu toute l’eau du bocal... On recharge! Je pense à mon père, ce loser magnifique, je me vois en lui, triste visage, reflet du mien en plus marqué par la vie, quelque chose de Hemingway et de Bukowski.
Il avait le vertige, aussi pour cette raison ne s’est-il jamais penché sur aucun des problèmes qui grippaient sa vie. Peut-être qu’il avait raison de s’en branler le blanc des yeux jusqu’à la mousse en refusant de faire partie des légions conformistes de ceux qui cherchent encore l’interrupteur des frigos pour les éteindre avant de fermer la porte. Mon père n’a jamais eu un œil de verre avec un quelconque poisson dedans, voilà ce que le monde ne lui pardonnera jamais, même qu’il a cherché à le lui faire payer; lui faire payer son indolence, cet esprit revêche de résistance et de manque de solidarité.