Les archéologues viennent de mettre au jour, à Sijilmassa, les fondations d’un complexe religieux d’envergure, comprenant une mosquée médiévale de 2.620 m² capable d’accueillir près de 2.600 fidèles. Ce monument présente plusieurs niveaux de construction successifs, depuis la mosquée originelle fondée sous le règne d’Abû al-Montasir al-Yasa’ (fin du 8ème – début du 9ème siècle), jusqu’aux phases almoravide et almohade (11ème–13ème siècles), puis à la mosquée alaouite encore visible aujourd’hui.
Cette stratification fait de la mosquée de Sijilmassa l’une des plus anciennes attestées au Maroc et un jalon majeur de l’histoire religieuse et urbaine du Maghreb.
Des fragments de bois doré: une découverte unique
Les fouilles des premières phases de la mosquée ont révélé des fragments de plâtre sculpté datés de l’époque midraride (8ème–10ème siècles). Ornés de motifs géométriques, végétaux et épigraphiques, ces décors constituent les plus anciens témoins de l’art islamique au Maroc.
Autre découverte exceptionnelle: dans les ruines de la médersa alaouite, des centaines de fragments de bois peint (18ème siècle) en cèdre polychrome, portant des traces de dorure à la feuille d’or (tadhhīb). C’est la première preuve matérielle d’un décor architectural alaouite à Sijilmassa.
Preuve ultime du rôle économique: un atelier monétaire mis au jour
Longtemps recherché par les archéologues, un vestige confirmant l’activité monétaire à Sijilmassa a été découvert près de la mosquée. Il s’agit d’un moule en céramique en «nid d’abeille», destiné à la fabrication de flans monétaires en or, encore imprégné de résidus aurifères.
عمليات تنقيب أثرية كبرى بموقع سجلماسة. DR
Cette découverte – unique au Maroc et deuxième en Afrique après Tadmekka (Mali) – confirme Sijilmassa comme centre majeur de production des célèbres dinars sijilmassiens, essentiels aux échanges transsahariens.
Un quartier résidentiel alaouite complet exhumé
La dernière campagne archéologique a également révélé un quartier résidentiel complet de l’époque alaouite (17ème–18ème siècles). Ce quartier, composé de 12 maisons organisées autour de patios, reflète un urbanisme structuré et offre un aperçu inédit de la vie domestique: pièces d’habitation, espaces de stockage, vaisselle, et même des restes de dattes, témoignant du régime alimentaire présaharien.
Cette découverte apporte la première preuve matérielle de la présence ancienne des Chorfa alaouites à Sijilmassa, ouvrant une nouvelle page de l’histoire de la ville et éclairant ses dynamiques sociales, politiques et urbaines.
Une ville légendaire qui renaît
Ces résultats, issus des fouilles menées par l’INSAP en 2024 et 2025, dépassent le cadre local: ils éclairent l’histoire du peuplement, de l’art et des échanges transsahariens. Mosquée, médersa, ruelles, maisons et ateliers reprennent vie, redonnant corps à la ville légendaire que les textes anciens nous décrivaient.













