Intégrité territoriale

DR

ChroniqueEn corrompant des Etats, en poursuivant une politique de haine et de division, l’Algérie a non seulement utilisé l’argent de son patrimoine pour une cause douteuse, mais a créé un obstacle pour la construction du Grand Maghreb.

Le 28/11/2016 à 11h58

Interpellé récemment lors d’un colloque, «Démocratie et progrès», sur le rôle de l’intellectuel au Maghreb, j’ai répondu: «Défendre l’intégrité territoriale de son pays». Quelqu’un a dit: «C’est hors sujet!». Non, précisément, il n’y a pas de démocratie et de progrès dans un Etat amputé d’une partie de son territoire.

Alors qu’aucun pays au monde n’accepte d’être privé d’une partie de son territoire, des Etats (dont aucun n’est sincère) refusent ce droit au Maroc. Il en est des Etats comme des hommes. Certains sont intègres, honnêtes, bienveillants, préoccupés du bien-être de leur peuple, de sa prospérité et de ses progrès, d’autres sont corrompus, malfaisants, pourris et prêts à tout pour faire le malheur des autres.

L’humanité n’est pas sympathique, mais on fait avec. On le sait et on vit malgré tout entouré de gens dont le but dans la vie est de bafouer le droit et la justice et de gagner en trichant, en fraudant, cultivant le mensonge et la mauvaise foi. Je veux bien comprendre certains pays non informés sur le dossier du Sahara marocain, notamment les pays nordiques qui, dès qu’ils entendent l’expression «droit des peuples » s’alignent sur ce principe. Mais parce que le Maroc avait déserté ou négligé cette partie du monde, il s’est trouvé face à un soutien de principe pour un «Etat» non reconnu par les Nations Unies et par un nombre important de pays.

On voit combien la diplomatie marocaine est préoccupée par ce dossier. Je sais que des ambassadeurs passent beaucoup de temps à expliquer, rectifier, montrer, démontrer le bien-fondé de cette cause. Pendant ce temps-là, d’autres dossiers, notamment économiques et culturels souffrent. Je me souviens, partout où je me suis trouvé, la première discussion que j’ai eue avec nos ambassadeurs concernait le Sahara. Pourtant, quand on veut bien se donner la peine de lire l’Histoire de cette partie du Maroc, quand on est animé par l’unique souci de justice et de droit, bien des Etats, quand ils n’ont pas été influencés (les intérêts priment) par nos adversaires de toujours, reconnaissent que c’est un problème artificiel, créé de toute pièce par Boumédienne et Bouteflika. C’était juste après la réunion à Casablanca des Etats arabes, juste après la Marche Verte. Plus de quarante ans après, nous en sommes encore à lutter sur la scène diplomatique pour notre intégrité territoriale.

Après ce qui s’est passé à Malabo en Guinée Equatoriale au sommet Afrique-monde arabe, on constate que certains pays utilisent ce conflit pour déclarer leur inimitié au Maroc, comme vient de le faire le Maréchal (oui, Maréchal, car le ridicule ne tue plus) Sissi. Il devrait plutôt s’occuper du chaos qui sévit dans son pays livré à l’armée qui fait la chasse à la jeunesse qui ose s’exprimer et dénoncer un régime guère mieux que celui de Moubarak. Les prisons sont pleines. Sous prétexte de lutter contre les Frères musulmans, Sissi emprisonne des démocrates, des intellectuels, des gens qui ont cru au Printemps arabe.

Il paraît que l’Algérie est venue à son secours après que l’Arabie Saoudite a diminué ou supprimé son aide en pétrole. Qu’importe. Le peuple égyptien est un grand peuple, aimé par les Marocains qui continuent de suivre la culture de ce pays, en musique, cinéma et littérature.

Un officiel algérien accuse le Maroc de «semer la division entre les pays africains et arabes». En imposant un «Etat» dans les instances africaines et arabes, l’Algérie ne fait que perpétuer un conflit pathétique. Ce pays devra un jour rendre des comptes aux peuples algérien et marocain. En corrompant des Etats, en poursuivant une politique de haine et de division, l’Algérie a non seulement utilisé l’argent de son patrimoine pour une cause douteuse, mais a créé un obstacle pour la construction du Grand Maghreb. Au lieu d’avoir une vision d’avenir dans le sens du progrès et de la prospérité des peuples, elle dépense beaucoup d’argent pour empêcher que le Maroc jouisse de son intégrité territoriale. Enfin, quand le ministre algérien des Affaires étrangères fait de l’humour en déclarant, à propos du retour du Maroc à l’Union Africaine: «Le Maroc serait le 55e Etat membre de l’Union Africaine et sera traité sur le même pied que la RASD», on constate l’immensité du gouffre entre le peuple algérien qui n’a que faire d’un conflit artificiel et ses dirigeants empêtrés dans des considérations sans avenir.

Par Tahar Ben Jelloun
Le 28/11/2016 à 11h58