Loin d’être un simple élément de langage, le concept de «souveraineté» a été évoqué à de multiples reprises à l’occasion des derniers discours royaux.
Qu’il s’agisse de la souveraineté sanitaire, politique ou alimentaire, ou qu’il s’agisse du rôle éminemment important des forces de sécurités et des Forces Armées Royales dans la préservation et le renforcement de cette dernière, le dernier discours royal a été l’occasion d’ériger ce concept en nouvelle doctrine nationale. Le renforcement de la sécurité stratégique du pays en est le corollaire.
Il est donc temps désormais de définir de manière rigoureuse, mais dans les limites inhérentes à une chronique, autant pour le grand public que pour une partie de l’élite politique qui en fait des fois un usage approximatif ou réducteur, ce concept profondément structurant.
Souvent réduite à une simple autonomie décisionnelle de l’Etat, autrement dit, à sa capacité à prendre librement des décisions sans en référer à un tiers, la souveraineté se fonde avant tout sur deux piliers majeurs, la légitimité (auctoritas en latin) et la puissance (potestas).
La problématique de la légitimité pose la question suivante: «au nom de qui le détenteur de la puissance exerce cette dernière?». Est-ce au nom d’une puissance étrangère? Au nom d’intérêts particuliers? Dans ce cas, il ne peut être question de souveraineté mais de confiscation de la puissance. Où est-ce au nom du peuple qui délègue sa souveraineté par différents mécanismes à l’Etat qui l’exerce exclusivement au profit de la nation?
Dans le cas du Maroc, la souveraineté appartient à la Nation comme mentionné de manière claire et sans ambigüité dans l’article 2 de la constitution: «la souveraineté appartient à la Nation qui l’exerce directement, par voie de référendum, et indirectement, par l’intermédiaire de ses représentants». Ses représentants, sont du point de vue juridique, les délégataires de cette souveraineté.
Il existe une quintuple légitimité du premier délégataire de la souveraineté, à savoir l’«institution monarchique» dirigé par le Roi: elle est constitutionnelle, populaire (référendum), religieuse, juridico-symbolique (Bay’a) et historique. Cette primauté dans la représentativité de la Nation est clairement mentionnée dans l’article 42 de la Constitution: «Le Roi Chef de l’Etat, son Représentant Suprême, Symbole de l’unité de la Nation, Garant de la pérennité et de la continuité de l’Etat et Arbitre Suprême entre ses institutions…».
Les seconds délégataires sont les élus du peuple, ces derniers jouissent d’une double légitimité à la fois populaire et constitutionnelle.
Il en résulte que la constitution marocaine, en étant à la base de cette architecture politique, et ayant été massivement adoubée par le peuple marocain suite au référendum de 2011, la question de la légitimité est sous tous les points de vue indiscutable et inébranlable. Un certains pays voisin peut-il en dire autant?
Vient ensuite la question de la puissance, qui se décline différemment, selon qu’on parle de la politique extérieure ou intérieure.
Sur le plan géopolitique, la puissance se fonde des facteurs multiples d’ordre quantitatif et qualitatif.
Sur le plan quantitatif, les facteurs de puissances sont nombreux (armée, capacité de projection, économie, richesses naturelles, superficie, population, maîtrise technologique…). Le degré de possession et de maîtrise de ces facteurs, détermine grandement la capacité d’un Etat à mener une politique extérieure autonome. Sur ce terrain, il est évident, sauf à être de mauvaise fois que le Maroc a réalisé ces 20 dernières années des avancées majeures, même si beaucoup d’efforts restent encore à réaliser.
Sur le plan qualitatif, d’autres facteurs entrent en jeu, comme le poids des alliances, la légitimité internationale, le soft power, le réseau et la puissance diplomatique, la conformité au droit international… Ces facteurs viennent combiner la légitimité internationale à la puissance objective. Là encore, les avancées du Maroc sur ce terrain, sont à l’origine de l’hostilité grandissante de certains pays qui voient d’un mauvais œil l’émergence du Maroc comme puissance régionale autonome et souveraine.
Sur le plan intérieur, en possédant le monopole de la violence légitime d’un point de vue constitutionnel, la puissance se fonde sur la capacité des services de sécurité et de l’armée à assurer la sécurité des citoyens sur tout le territoire, et de préserver la maîtrise et l’inviolabilité des frontières. L’efficacité redoutable et reconnue mondialement de nos services de sécurité dans la lutte contre le terrorisme n’est qu’un exemple parmi d’autre de cette maîtrise.
Quant à la sanctuarisation du territoire au niveau des frontières, l’armée marocaine a démontré à maintes reprises, comme récemment à El Guerguerat, sa réactivité et sa force dissuasive.
Pour conclure, même si d’autres aspects primordiaux en rapport avec la souveraineté pourront être développés dans de prochaines chroniques, on peut dès à présent affirmer qu’un Etat souverain est celui qui possède les moyens de l’autonomie, à savoir les facteurs de puissance, et qui jouit de la légitimité populaire qui lui impose d’en faire un usage au service exclusif de l’intérêt général, celui de la Nation tout entière.