Ce n’est pas le PJD qui a gagné, c’est l’espoir qui a gagné

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ChroniqueLes élections du 7 octobre ont une chance de réconcilier beaucoup de Marocains avec… Avec quoi, avec qui, au fait ?

Le 08/10/2016 à 17h00

La victoire du PJD n’est pas seulement celle, finalement prévisible, des islamistes et des conservateurs. C’est aussi la victoire des démocrates et de tous ceux qui aiment leur pays. Il y avait un doute et une peur avant les élections : que le parti le plus populaire dans le pays soit empêché de gagner. Nous avons déjà connu cela par le passé, quand les socialistes de l’USFP, longtemps première force du pays, étaient régulièrement empêchés de dominer les élections.

Aujourd’hui, et si l’on excepte le cas très particulier de la Jamaa d’Al Adl Wal Ihsane, qui n’est pas un parti mais une association, nous sommes enfin arrivés à une adéquation : c’est bien le parti le plus fort qui gagne les élections. Au-delà de son idéologie, qui est ce qu’elle est (et il faudra redoubler de vigilance dans les cinq années à venir par rapport aux débordements de cette idéologie), le PJD est bien la première force politique et même sociale du pays. Et cela se traduit aux élections.

Il faut célébrer sincèrement ce jour parce que cela veut dire que la volonté populaire a été respectée. Le 7 octobre, jour du vote, est un bon jour pour la «démocratie» marocaine, quoique que l’on dise de cette démocratie.

Chacun d’entre nous, y compris ceux qui n’ont pas jugé utile d’aller voter, aura le temps d’analyser les raisons et la portée de cette nouvelle victoire islamiste. En 2011, les islamistes ont été portés par le vent des révoltes arabes. En 2016, ils ont été portés par d’autres mécanismes.

La démocratie et le progrès d’un pays sont des constructions. Ils ne s’improvisent pas en un claquement des doigts. C’est un long chemin qui doit bien commencer quelque part. Ce «quelque part», tous les pays du monde sont unanimes pour l’appeler «le respect de la volonté populaire».

C’est pour cela que les élections du 7 octobre sont celles de l’espoir qui est enfin de retour. Même si le taux de participation reste moyen (43 %, contre 45 % en 2011), nous avons vu que beaucoup de Marocains ont renoué avec le vote. Ce retour, même s’il est relatif, est en soi une victoire. Et cette petite victoire, il faut la saluer.

Beaucoup de Marocains sincères et politisés étaient « âchés» avec les élections parce qu’elles falsifiaient la volonté populaire. Tous n’ont pas renoué avec le «jeu» politique mais certains l’ont fait. D’autres les suivront. Le retour progressif de ces gens, qui appartiennent essentiellement à la jeunesse et aux élites urbaines, ouvre la porte à ce que le journal «Le Monde» a appelé une troisième voie. Même si elle ne pèse pas bien lourd, cette troisième voie, que l’on pourrait appeler «ni islamistes, ni suivistes», est aujourd’hui une réalité. Et il faudra l’enraciner et l’aider à grandir. 

C’est ce retour de l’espoir qui constitue la plus belle victoire des élections. La plus belle parce que la plus inattendue.

Par Karim Boukhari
Le 08/10/2016 à 17h00