Le Maroc et l’Espagne «voulus» par certains comme «pays barrières» ou «pays tampons» se voient infliger un procès inouï. Les larmes de crocodiles rivalisent avec la mauvaise foi, les démissions irresponsables, la cécité volontaire, l’égoïsme et les manipulations exécrables.
Le Maroc a été le premier à qualifier l’assaut contre la clôture de Melilia de «véritable drame» et à le «déplorer». Des morts, des blessés, y compris des blessés graves, au sein des forces de l’ordre marocaines et espagnoles.
Derrière certaines réactions superficielles internationales s’affiche une volonté de refouler les causes profondes du drame. Une incroyable surenchère dans l’indignation pour se dédouaner et se donner bonne conscience! Certains «fournisseurs de leçons», la main sur le cœur, «tapent» sur notre pays. Ces «modèles de vertu» ont mis entre eux et ces tristes événements, un épais écran de fumée pour ne pas voir l’essentiel.
On relève en premier lieu les réactions immatures de Podemos, «mano en mano» avec Alger, qui a repris les sordides «éléments de langage» de la dictature militaire algérienne. Le jeu trouble et dangereux de la junte dans cette affaire a été documenté. Le communiqué de l'ambassade du Royaume du Maroc en Espagne est clair: «les assaillants sont entrés par la frontière avec l'Algérie, profitant du laxisme délibéré du pays dans le contrôle de ses frontières avec le Maroc».
Il y a aussi cette incroyable déclaration d’Eduardo de Castro, le président (maire) de Melilia qui a parlé de «réponse disproportionnée» du Maroc. «Le Maroc se permet certaines choses qui ne seraient pas acceptables» en Espagne, a-t-il péroré! A partir du «confort» de son enclave à la triple clôture de fer, il colle tout sur les forces de l’ordre marocaines. Il décerne un curieux satisfecit aux forces préposées à la surveillance de la clôture du côté de Melilia et qui ont compté aussi des blessés dans leurs rangs.
Le chef de la commission de l’Union Africaine Moussa Faki Mahamat a lui dénoncé précipitamment «le traitement violent et dégradant de migrants africains». Il est vrai qu’il n’a pas cité une seule fois le Maroc, ni fait référence aux forces de l’ordre, mais il pouvait aller au-delà de la réaction émotionnelle. On peut la comprendre mais elle ne règle rien! En tant que sage africain, il est astreint à la distance dans ses analyses et interprétations. Il pouvait admettre, au moins et a minima, que ce triste événement est d’une très grande complexité humaine et géopolitique.
On relève par ailleurs d’autres déclarations plus objectives, marquées par le souci de compréhension des causes profondes du drame.
Nabila Massrali, porte-parole de l'Union européenne (UE) pour les affaires étrangères et la politique de sécurité, a exprimé une sincère compassion pour les victimes et leurs familles. Y compris les victimes parmi les forces de sécurité marocaines et espagnoles.
«Nous sommes en contact avec les autorités marocaines et espagnoles pour essayer de comprendre les circonstances de ce drame (…) Il est crucial pour nous de renforcer la coopération afin de lutter contre les réseaux de trafic d’êtres humains en adoptant une approche holistique en matière de migration».
Elle a souligné ainsi la nécessité de combattre encore plus les mafias, position partagée également par Madrid et de Rabat, et appelle à la définition d’une approche globale et ne pas se limiter à une approche sécuritaire.
On peut comprendre la gêne et l’embarras des Européens qui ont mobilisé des moyens colossaux, en très peu de temps, pour absorber et intégrer plus de 4 millions de refugiés Ukrainiens. Cette approche de deux poids et deux mesures interpelle fortement!
L’Union Européenne est parfaitement consciente de la tragédie des migrants du Sud. Mais comment prétendre les «stopper» par une dérisoire triple clôture de fer, sur près de 12 km, ou les laisser mourir en Méditerranée? Au moins 3000 noyés chaque année! Ces naufragés de la Méditerranée suscitent peu d’émotions, parce qu’on ne les voit pas. Les images de ce drame sont quasi-inexistantes. Les chiffres des migrants engloutis par les flots ont été banalisés. On n’en parle même plus.
Jusqu'à quel seuil, jusqu'à quel chiffre, en augmentation constante, nos frères africains, continueront-ils à survivre, sous des abris de fortune, dans les forêts du mont Gourougou proche de Nador, et ailleurs?
Le fait même que le Maroc «tolère» ce genre de campements où les migrants se «sédentarisent» de nombreuses années en attendant un hypothétique «passage vers l’Eldorado Européen», prouve et atteste qu’il ne veut absolument pas déployer un traitement autoritaire ou radical.
Face à un flux intarissable, notre pays s’en tient au respect des droits humains et à l’application d’une généreuse politique migratoire, malgré des moyens limités.
La stratégie nationale d’immigration et d’asile (SNIA), instituée en 2014, a permis des opérations massives de régularisation, avec tous les droits y afférents.
Le Maroc refuse d’employer les méthodes de ceux qui, dans la fournaise du désert, dépouillent d’abord les migrants de leurs maigres biens et usent d’une violence inouïe (mais non médiatisée) pour les entasser dans des véhicules de fortune. Ils sont abandonnés aux frontières du Mali et du Niger et peu d’entre eux arrivent à destination.
Aujourd’hui, des milliers de nouveaux migrants viennent du Soudan, en particulier du Darfour, où des violences ont provoqué de centaines de morts et 50.000 déplacés.
Nombreux passent par la Libye et l'Algérie. Depuis quelques semaines, la dictature militaire a senti l’aubaine pour mieux nuire et se «venger» du Maroc et de l’Espagne, à cause de leur rapprochement. Les migrants sont «ramassés» et transférés «gracieusement» vers le Maroc!
Une autre déclaration est marquée par une réelle volonté de comprendre. Celle commune entre l’Organisation internationale pour les migrations (OIM) et l’Agence des Nations Unies pour les réfugiés (HCR). Ces instances ont interpelé la communauté internationale «sur le principe de responsabilité partagée» et «l’importance de trouver des solutions durables pour les personnes en situation de déplacement dans l’esprit du Pacte Mondial pour des migrations sûres, ordonnées et régulières ainsi que du Pacte Mondial pour les réfugiés».
Quant au président d'Amnesty International France, Jean-Claude Samouiller, il a défini les responsabilités: «c'est la politique de l'Union européenne qui conduit à ces drames (…) L'Union européenne a également une grande responsabilité dans ces drames en fermant ses frontières».
Enfin, dans le florilège des déclarations stigmatisantes, nous relevons celle du porte-parole de l'ONU, Stéphane Dujarric, qui est resté collé aux événements tragiques du vendredi, en dénonçant «un usage excessif de la force des deux côtés de la frontière». Sait-il que les forces de l’ordre «des deux côtés» ont des instructions fermes pour ne pas utiliser d’armes à feu… Même en cas de légitime défense?
En face d’eux, 2000 assaillants désespérés et déterminés au combat, lançant une pluie de cailloux, armés de gourdins, de crochets métalliques, de barres de fer. Une organisation quasi-«milicienne» et un encadrement assuré par de pseudo-migrants, parfois anciens soldats de pays du Sahel, instrumentalisés par la dictature algérienne. Celle-là même qui a disloqué et brisé leurs pays par ses ingérences funestes.
Pour de nombreux observateurs, ce scénario rappelle celui de Gdim Izik, en 2010, avec des assaillants infiltrés d’Algérie, dans un état second et sous hallucinogènes algériens, qui ont commis des atrocités contre les populations et les forces de l’ordre. Les relents et le modus operandi de Gdim Izik exhalent de cet assaut contre la clôture de Melilia. C’est une même signature. Mais tout cela ne relève que de l’instrumentalisation abjecte et opportuniste par un voisinage irresponsable et ne peut contribuer à cerner les causes profondes du drame.
Stéphane Dujarric souligne que ce drame «doit faire l'objet d'une enquête». Il ajoute, la main sur le cœur, «les personnes qui migrent ont des droits humains et ceux-ci doivent être respectés et nous les voyons trop souvent bafoués».
A ce propos et concernant un rôle plus déterminant de l’ONU, un rappel est nécessaire. Que sont devenus les «Objectifs du Développement Durable (ODD)», adoptés en marge de l’Assemblée Générale des Nations Unies en 2015, qui ont proclamé que «personne ne sera laissé pour compte»?
Le 25 septembre 2015, 193 dirigeants se sont engagés à atteindre 17 objectifs mondiaux dans le cadre d’un programme ambitieux: «Transformer notre monde: le Programme de développement durable à l’horizon 2030». Parmi les objectifs: l'éradication de la pauvreté sous toutes ses formes et partout dans le monde… La lutte contre la faim… L'accès à la santé… L'accès à une éducation de qualité etc. Mais la communauté internationale a failli à ses engagements. Rien n’a été fait.
Alors aujourd’hui, ces «indignés», qui demandent des commissions d’enquête ou d’information doivent comprendre que quelles que soient les conclusions, les mêmes causes produiront, malheureusement, les mêmes effets.
Il y a quelques jours, ils étaient 2000 à donner l’assaut. Ils pourraient être demain 5000 ou 10.000, le flux est intarissable. Le réchauffement climatique, dont sont responsables les pays industrialisés, va inexorablement augmenter la précarité dans le continent et pousser des centaines de milliers de migrants vers le nord.
Les crédits de 500 millions de dollars annuellement consacrés par le Maroc à la question migratoire sont prélevés sur son propre budget de développement. Les aides européennes dans cet effort sont très modiques. Tolérance ou fermeté, le Maroc est toujours exposé à la bronca des pseudo-donneurs de leçons.
Mais les convictions humanistes du Royaume sont claires. Son attachement à ses frères africains est inébranlable et immuable, même si une petite minorité de migrants désespérées se radicalisent et passent à la violence, manipulés par des semeurs ataviques de troubles et de désordre au Maghreb et au Sahel. Les «enquêteurs» devraient aussi s’intéresser aux mains étrangères qui ont radicalisé et militarisé cette minorité.
Se focaliser sur les faits du vendredi 24 juin 2022 et ignorer les causes profondes du drame est une approche superficielle, simpliste et trompeuse. Il faut aller au fond des choses.
La solidarité internationale est défaillante. Aujourd’hui 20 pays, opulents et prospères, représentés par le G20, détiennent 80% de l’économie mondiale. Ils rechignent à établir d’authentiques politiques de coopération avec les 175 pays qui en détiennent moins de 20%.
Alors on pourra mettre en place toutes les commissions d’enquête qu’on voudra. Si rien n’est fait pour traiter les causes... Rien n’arrêtera les migrations transnationales clandestines de masse et leur impact sur ce qu’il faut bien appeler une «crise des valeurs et de civilisation» qui interpelle fortement l’humanité.