Des milieux occidentaux contrariés par la réussite du Mondial au Qatar

La Coupe du monde 2022 au Qatar. . DR

ChroniqueIl y a cet insupportable Qatar qui a refusé de se plier aux injonctions fantaisistes des groupes de pression, tout en relevant le défi de l’organisation. Il y a aussi cette admirable équipe arabo-africaine, le Maroc, qui a fait bouger la cartographie mondiale du football en surclassant des adversaires au palmarès prestigieux.

Le 21/12/2022 à 15h59

Le Mondial de football 2022 a été marqué par une belle performance des Lions de l’Atlas. Le Qatar a démontré un haut niveau de maîtrise en organisation. Le sacre mérité de l’équipe d’Argentine après un match d’anthologie contre une bonne équipe de France restera inoubliable.

Or, malgré ces succès, ce Mondial –organisé pour la première fois dans un pays arabe– laisse un goût amer chez certains, qui ont orchestré des campagnes vexatoires basées sur des jugements racistes, islamophobes, xénophobes, haineux… et exigeant aussi le boycott du Mondial sous des prétextes futiles.

Il est vrai aussi que le Qatar –tout en agissant conformément aux prescriptions fondamentales du cahier des charges de la FIFA– n’a pas cédé à certaines pressions qui remettent en cause ses particularités socioculturelles. Certains milieux en ont gardé une tenace rancœur.

Ceux qui ont été «scandalisés» que Lionel Messi porte le «bisht», cette magnifique tenue qatarie, qualifiée de «peignoir» et d’«oripeaux», se sont ridiculisés.

Des réactions déconcertantes de médias européens irresponsables, devenus des alliés objectifs de milieux d’extrême droite dont le fonds de commerce est basé sur la peur. Elles dénotent aussi une crainte pour des «intérêts» et des «situations de rente» liée à l’émergence d’autres acteurs en économie, en sport, en soft power… Ils pensent les neutraliser en usant de méthodes surannées.

Quand le football est mêlé d’une manière malsaine à la géopolitiqueLe plus surprenant, ce sont ces allégations, liées à un sujet qui concerne en premier lieu le Parlement européen, qui ont surgi contre le Qatar et le Maroc. Deux pays qui ont marqué de leur empreinte le Mondial 2022. L’un par ses prouesses organisationnelles et managériales et l’autre par ses exploits sportifs. En un timing très suspect, des médias européens servis en éléments anciens, réchauffés et non vérifiés, ont ciblé le Qatar.

Le Qatar –qui a rempli avec brio sa mission– a été visé à travers des allégations sur le process qui l’a amené à obtenir l’organisation de ce Mondial. Le Maroc –qui, à force de travail, a réussi un parcours exceptionnel en bousculant avec élégance la hiérarchie du football mondial– a été la cible d'une campagne visant fondamentalement son unité territoriale. Le Maroc, pourtant déjà victime d’une énorme injustice léguée par le colonialisme européen, continue d’en subir les conséquences.

Malgré les écrans de fumée, il est évident que le football a été mêlé d’une manière malsaine à la géopolitique. Le sport a été inscrit dans les rapports de forces obsolètes entretenus par de faux donneurs de leçons en droiture et probité. Sachant aussi que les notions du bien et du mal sont souvent à géométrie variable et oscillent selon les intérêts. Les autoproclamés et inénarrables «pères la vertu», les yeux rivés sur l’audimat, qui sévissent dans les médias occidentaux, ne nous feront pas croire le contraire.

Ces campagnes virulentes ont également été déclenchées dans un contexte international défavorable à une Europe anxieuse et doutant d’elle-même. Il y a d’abord le bourbier de la guerre russo-ukrainienne qui montre que les Européens, de tous bords, n’arrivent pas à se dépêtrer de la fatalité de leurs dérives et réflexes guerriers ancestraux. 

Le camp de l’Ouest avait juré de faire plier Poutine en quelques mois. Il semble que cette prévision soit devenue irréalisable. Mais entre-temps, les populations ukrainiennes sont dans une grande souffrance.

Aujourd’hui, l’Europe de l’Ouest, déprimée, est en train de réviser ses positions. Elle veut en finir avec ce conflit. Surmontant son arrogance initiale, elle prête désormais une oreille attentive aux propos de l'ancien secrétaire d'Etat américain, Henry Kissinger, qui a déclaré que «le temps est venu de négocier la paix en Ukraine en rejetant l’idée d’un éclatement de la Russie et son effet collatéral, le chaos nucléaire».

Un autre fait inouï: le président allemand, Frank-Walter Steinmeier, vient de demander au président chinois, Xi Jinping, d’user de son influence auprès de la Russie pour aider à mettre fin à la guerre en Ukraine. Conséquences de la crise énergétique, le FMI prévoit un avenir économique sombre et un ralentissement de la croissance.

Les pays du Sud dérangentDans cette ambiance morose, le Mondial du Qatar, évènement mondial majeur, qui devait être une fête exclusive pour consacrer ou conforter la prépondérance occidentale, en ce temps de crise, est venu compliquer les choses en réveillant de vieux démons.

Il y a cet insupportable Qatar qui a refusé de se plier aux injonctions fantaisistes des groupes de pression, tout en relevant avec doigté le défi de l’organisation, à la satisfaction des millions de supporters qui l’ont visité. Il y a aussi cette admirable équipe arabo-africaine, le Maroc, qui a fait bouger la cartographie mondiale du football en surclassant des adversaires au palmarès prestigieux.

C’est devenu trop pour les milieux néocolonialistes, racistes et hostiles (auxquels les médias européens donnent systématiquement la parole), habitués à ce que les pays du Sud ne fassent que de la figuration ou ne jouent que des rôles mineurs en sport ou ailleurs.

Ces campagnes insidieuses auraient cherché à polluer, mais en vain, la fête planétaire du football, tout en rappelant aux pays du Sud que l’ambition «démesurée» de jouer dans la cour des grands n’est pas la bienvenue.

Sans aucun doute, l’arbitrage peut servir à la «régulation» et au «recadrage». Certes, de grandes nations européennes du football en ont été aussi victimes, mais il s’agit là d’une autre équation qui a partie liée avec l’objectif dissimulé de contrecarrer les ambitions des pays du Sud.

On peut être des amis de l’Occident, mais cette amitié n’est pas de tout repos, elle a besoin d’exigence. L’objectif ici n’est pas de ternir les beaux moments du Mondial, mais est surtout d’évoquer ce long travail que certains ont à faire sur eux-mêmes pour accompagner raisonnablement et sereinement l’évolution inéluctable du monde vers plus d’égalité, d’équité et de respect.

Par Jalal Drissi
Le 21/12/2022 à 15h59