Tourisme chinois: une manne économique en terre de pisé

Des touristes chinois en train de manger dans un restaurant marocain. (Photo d'illustration)

Le 09/07/2025 à 14h34

VidéoÀ Aït Ben Haddou, joyau du Haut-Atlas marocain, classé au patrimoine mondial de l’UNESCO, l’affluence des touristes chinois ne cesse de croître. Attirés par la richesse culturelle du Maroc, ses paysages variés et sa cuisine traditionnelle, ces visiteurs participent activement à la redynamisation de l’économie locale. Un reportage de l’agence Associated press (AP) révèle l’ampleur de cet engouement.

Sous un soleil éclatant, des groupes de touristes chinois empruntent le chemin menant au Ksar d’Aït Ben Haddou, situé à une trentaine de kilomètres de Ouarzazate. Devant l’entrée du site, ils s’arrêtent pour immortaliser leur passage près d’une pancarte en arabe: «Ksar Aït Ben Haddou vous souhaite la bienvenue». Appareils photo en main, ils s’apprêtent à découvrir ce célèbre village fortifié, emblème du sud marocain.

Le site, connu pour ses maisons en pisé étagées à flanc de colline, attire une clientèle curieuse de s’immerger dans un patrimoine architectural et culturel unique. Pour beaucoup, le Maroc évoque une diversité rare: «C’est un mélange d’influences arabes, berbères, africaines et européennes. C’est cette richesse culturelle qui m’a attiré ici», confie Xihao Chen, touriste venu de Shanghai.

Accompagnés de guides marocains comme Kamal, ou encore de guides spécialisés venus de Chine à l’instar de Wu Xiao, les touristes déambulent dans les ruelles étroites du Ksar, explorant les boutiques d’artisanat local. Paniers tressés, sacs en cuir, tapis berbères ou objets en cuivre s’affichent en vitrine, témoins du savoir-faire local. Ces articles séduisent particulièrement les visiteurs chinois, friands de souvenirs traditionnels.

La passion pour le Maroc se manifeste parfois à travers le cinéma. «J’ai vu un film nord-africain qui m’a donné envie de découvrir Casablanca et les coutumes marocaines», raconte Xiu Meng Qi, venue avec son mari depuis la province de Shandong. D’autres, comme Wu Xiao, soulignent la fascination exercée par le Sahara, popularisé en Chine grâce aux récits de l’écrivaine taïwanaise Sanmao, ou encore par la médina de Fès et la ville bleue de Chefchaouen.

Une croissance boostée par des mesures politiques

Cet engouement n’est pas le fruit du hasard. Depuis la suppression des visas pour les ressortissants chinois en 2016, le nombre de visiteurs venus de l’Empire du Milieu a littéralement explosé. «Avant cette décision royale, on comptait moins de 10.000 touristes chinois par an. En 2019, ils étaient déjà plus de 140.000», explique Zoubir Bouhoute, chercheur en tourisme basé à Ouarzazate.

Après une période de ralentissement due à la pandémie, les chiffres repartent à la hausse. «Avec l’ouverture de lignes directes entre compagnies marocaines et chinoises, on pourrait atteindre entre 250.000 et 300.000 visiteurs cette année», anticipe-t-il. Ces déclarations ont été recueillies par l’agence Associated press (AP) lors d’un reportage mené à Ouarzazate et Aït Ben Haddou fin juin 2025.

Expérience culinaire

Les autorités touristiques marocaines misent d’ailleurs sur plusieurs leviers pour séduire davantage cette clientèle: participation à des salons internationaux, campagnes sur les réseaux sociaux en chinois, collaborations avec agences de voyage, ou encore formation de guides locaux à la langue et à la culture chinoises via le programme China Ready.

Après la visite du Ksar, les touristes prennent place dans les restaurants locaux, où l’expérience culinaire fait partie intégrante du voyage. Au restaurant «Oasis d’Or», Abdelilah Karroume, son gérant, s’efforce d’adapter le service aux attentes de ces visiteurs: «Les touristes chinois sont très différents. Ils apprécient les plats marocains, surtout le tajine et le couscous, mais ce qu’ils demandent presque systématiquement, c’est de l’eau chaude.»

Assiette de citrouille et pain local en main, Judy Su savoure son premier repas marocain: «Le pain est dur à l’extérieur mais très moelleux à l’intérieur, j’adore! Et la soupe de citrouille est très douce, très bonne.»

Entre attrait culturel, stratégies ciblées et bouche-à-oreille numérique, le tourisme chinois au Maroc semble promis à un bel avenir. À Aït Ben Haddou, l’arrivée quotidienne de dizaines de visiteurs asiatiques en est la preuve concrète. Et derrière chaque photo souvenir prise sur fond d’architecture en terre battue, se dessine aussi l’image d’un Maroc plus ouvert, plus connecté, et économiquement dynamisé par cette nouvelle vague de voyageurs.

Par Camilia Serraj
Le 09/07/2025 à 14h34