Sextorsion: ces célébrités piégées par les réseaux d’Oued Zem

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Revue de presseKiosque360. Dans la petite ville de Oued Zem, plus de 1.700 jeunes et adolescents s’adonnent à l’arnaque sexuelle sur internet. Leurs victimes, issues principalement des pays arabes, sont choisies dans les milieux sportifs, artistiques et parmi les prédicateurs religieux. Une véritable poule aux œufs d’or.

Le 06/03/2021 à 12h38

Depuis bien longtemps, la petite ville de Oued Zem se réveille chaque jour avec une nouvelle arrestation. Il s’agit de jeunes qui ont trouvé dans l'escroquerie sur internet un moyen de subsistance pour certains et d’enrichissement pour d’autres. Avec le temps, la ville aux mille martyres, c’est ainsi que Oued Zem est connue, est désormais considérée, même à l’international, comme l’épicentre de la sextorsion au Maroc. L’arnaque sur internet est le principal sujet de conversation dans tous les recoins de la ville, écrit le quotidien Al Akhbar dans un dossier consacré à ce phénomène dans son édition du 5 au 7 mars. Et pour cause. C’est l’unique moyen pour les jeunes de la ville de gagner de l’argent facile et, qui plus est, en devises.

Au début, les victimes de ce nouveau mode d’arnaque étaient des femmes. Puis, des hommes, principalement des ressortissants des pays du Golfe et des pays arabes. Devant le tribunal de la ville, le nombre d’affaires de sextorsion traitées est bien plus important que celui des dossiers courants. Lors de ces audiences, les présumés arnaqueurs sont toujours présents, le plus souvent en état de détention, mais jamais leurs victimes ou ceux qui osent déposer plainte. Les raisons sont évidentes, écrit le quotidien qui revient sur les cas des victimes les plus célèbres de cette arnaque 2.0.

L’une des dernières célébrités victime n’est autre que l’ancien sélectionneur national Hervé Renard. Le quotidien évoque ainsi une «défaite scandaleuse sur le terrain de l’arnaque sexuelle» de l’ancien entraîneur de l’équipe nationale. L’affaire remonte au mois de septembre de l’année dernière. L'entraîneur avait engagé la conversation sur le net avec une danseuse libanaise, en réalité un jeune homme de Oued Zem. L'échange, de plus en plus torride, s’est transformé en appel vidéo. L’ancien sélectionneur ne s’est rendu compte du piège que plus tard quand il a été «invité» à faire les premiers transferts d’argent sous peine de voir ses vidéos rendues publiques sur le net. Après plusieurs «paiements», il a porté plainte et ses arnaqueurs ont été arrêtés.

Une autre histoire que le quotidien tient de la bouche de l’auteur même de l’arnaque a ciblé cette fois un prédicateur islamiste égyptien. Il a suffi de quelques images hot pour que ce prêcheur de la parole divine jette chapelet et vêtements de côté et tombe dans le coup. Après une nuit torride passée avec un faux profil, le «Daîa» égyptien a été invité à passer à la caisse, ce qu’il s’est résigné à faire à plusieurs reprises par peur du scandale. «Une belle prise» commente le jeune homme qui a d’ailleurs réitéré son méfait avec un autre prédicateur égyptien installé en Arabie saoudite, également très connu. Là encore, c’est le jackpot.

Comme l’ont confié les jeunes de la ville au quotidien, leurs «meilleures victimes» se comptent parmi les sportifs, les prédicateurs islamistes et les artistes. Parmi cette dernière catégorie, un jeune arnaqueur qui s’est fait passer pour une danseuse à la recherche d’un travail a pu faire tomber dans son piège un artiste koweïtien très connu. L’artiste s’est résigné à payer, mais à condition que l’arnaqueur mette le feu à son ordinateur et lui envoie la vidéo. Le jeune homme est allé chez un revendeur de PC, en a acheté un d’occasion auquel il a mis le feu et envoyé les images à sa victime. L’histoire s’est terminée par le suicide de l’artiste après avoir laissé une lettre émouvante. Sa famille a demandé à l'ambassade du Koweït à Rabat de déposer plainte.

Le quotidien précise que l’ambassade d’Arabie Saoudite à Rabat est intervenue, elle aussi, dans pas moins de 700 affaires de sextorsion contre des ressortissants saoudiens. Globalement, estime Al Akhbar, si certains rapports de police parlent d’un peu plus d'une centaine de victimes de sextorsion parmi les personnalités publiques, les jeunes de la ville de Oued Zem assurent que pas moins de 1.740 d’entre eux s’adonnent à cette pratique. Et bien sûr, le nombre de personnes ciblées dépasse de loin le chiffre avancé par les autorités.

Les victimes, comme précisé plus haut, sont principalement originaires des pays arabes, avec une préférence pour les personnalités publiques, les vedettes de la télé, les artistes, les prédicateurs religieux et même des enseignants. Entre autres victimes dont le cas a été évoqué par le quotidien, celui d’un haut fonctionnaire du ministère jordanien de la Culture, un homme d’affaire palestinien et même un dirigeant houthi, au Yémen, qui a passer une nuit hot avec un jeune lycéen qui s’est fait passé pour une fille de joie.

Par Amyne Asmlal
Le 06/03/2021 à 12h38