Un véritable séisme secoue actuellement le secteur des transferts d’argent au Maroc. «Plus de 60 agences affiliées à la société MEA Finance, opérant sous l’enseigne Canal M et dûment agréée par Bank Al-Maghrib, se retrouvent aujourd’hui en situation de faillite, sur fond d’accusations de fraude massive, d’abus de confiance et d’un silence officiel jugé incompréhensible», indique le quotidien Al Akhbar dans son édition du mercredi 23 juillet.
Selon des informations obtenues par le journal, la maison-mère retiendrait depuis plus d’un an d’importants montants issus des transactions de ses agences franchisées. Une situation qui a plongé de jeunes entrepreneurs, pour la plupart diplômés ou membres de la diaspora marocaine, dans une spirale infernale: dettes bancaires, menaces d’expulsion de leurs locaux commerciaux et convocations devant la justice.
À l’origine du scandale, souligne Al Akhbar, la fuite à l’étranger du directeur général de MEA Finance. Ce départ soudain a paralysé toute tentative de médiation ou de règlement à l’amiable. Malgré des dossiers administratifs et légaux complets, les franchisés dénoncent une série de promesses non tenues et de faux engagements de la part de la direction, bloquant de facto le fonctionnement des agences et privant des centaines de familles de leurs revenus.
Face à l’impasse, plus de 40 franchisés ont saisi le tribunal correctionnel de Casablanca, déposant des plaintes collectives pour escroquerie, abus de confiance, manquement contractuel et fausses déclarations à des fins d’extorsion. Des sit-in ont également été organisés devant le siège de l’entreprise à Casablanca ainsi qu’au Parlement, dans l’espoir d’un sursaut des autorités.
Les pertes directes sont estimées à plus de 30 millions de dirhams, sans compter les préjudices collatéraux. Entre autres, cessation totale d’activité, difficultés sociales et détresse psychologique pour les familles concernées. «Tous les canaux de négociation ayant échoué, les victimes dénoncent l’absence de réaction des instances officielles, malgré plusieurs questions parlementaires adressées au ministère de tutelle», lit-on.
Au-delà du drame humain, l’affaire soulève des inquiétudes plus larges quant à la crédibilité du secteur. Ce scandale intervient alors même que certains de ces jeunes franchisés avaient bénéficié de financements bancaires et de programmes publics d’appui à l’entrepreneuriat et à l’auto-emploi. Selon plusieurs professionnels, l’affaire jette une ombre sur l’ensemble du marché du transfert de fonds, nourrissant un climat de peur et de méfiance parmi les autres opérateurs.
Les observateurs mettent en garde. En l’absence de mesures fermes pour protéger les investisseurs et sanctionner les responsables, ce scandale pourrait entacher la réputation financière du Maroc à l’international. Un risque d’autant plus préoccupant que le pays s’apprête à accueillir des événements d’envergure, tels que la Coupe d’Afrique des Nations 2025 et la Coupe du Monde 2030, et qu’il déploie d’importants chantiers stratégiques en matière d’infrastructures et de transition numérique.
À ce jour, aucune décision majeure n’a été annoncée ni par le gouvernement ni par Bank Al-Maghrib pour débloquer la situation. «Les franchisés, eux, exigent l’ouverture d’une enquête judiciaire exhaustive, la poursuite des responsables, l’indemnisation des victimes et une réforme en profondeur du cadre réglementaire régissant le secteur, afin de garantir davantage de transparence et de sécurité juridique», lit-on encore.








