Prendre en charge sans juger, soigner et non réprimer: ce que défend le CESE face à la montée des addictions au Maroc

Le président du CESE, Ahmed Reda Chami.  . Brahim Mousaaid / Le360 (capture image vidéo)

Le 21/04/2022 à 12h39

VidéoSur la base d’un rapport pour le moins inquiétant, le Conseil économique, social et environnemental a donné un avis plaidant pour que l’addiction, sous toutes ses formes, soit reconnue comme une maladie au Maroc. Objectif: assurer une prise en charge sérieuse aux malades au lieu de simplement s’en offusquer et les stigmatiser.

Le président du CESE, Ahmed Reda Chami, a appelé à cette «reconnaissance» de l’addiction suite à une étude élaborée sur plusieurs mois, sous le thème: «Faire face aux conduites addictives: état des lieux et recommandations» et dont la présentation a été faite mercredi 20 avril 2022.

Annonçant les résultats de cette étude, Ahmed Reda Chami a indiqué que la «lutte contre le phénomène de l’addiction sur les plans médical, sociétal et juridique, commence par la reconsidération des perceptions dominantes de l'addiction et la reconnaissance de ses différentes formes, y compris les nouvelles, comme une maladie qui nécessite une prise en charge appropriée des personnes qui en sont atteintes, tout en renforçant les moyens de lutte et de prévention des conduites addictives».

Pour lui, «le monde connaît une recrudescence des conduites addictives qu'elles soient liées à l’usage de substances psychoactives ou à la pratique de certaines activités potentiellement addictogènes. Le Maroc ne représente pas une exception face à ce constat».

Le président du CESE a précisé, chiffres à l’appuis, qu’au Maroc «il y a plus de 6 millions de fumeurs, dont 500.000 ont moins de 18 ans, que près de 18.500 personnes s'injectent des drogues et que plus de 9 % des mineurs en milieu scolaire ont consommé au moins une fois du cannabis».

Plus 3,3 millions de Marocains addicts aux jeux de hasardDes chiffres qui donnent froid dans le dos. On notera également que «3,3 millions de personnes s’adonnent à des jeux de hasard, et l'usage addictif croissant des écrans, des jeux vidéo et d'Internet, notamment chez les adolescents et les jeunes.

«Ce sont des chiffres alarmants, a estimé Ahmed Réda Chami, qui démontrent la gravité de cette problématique dans notre pays, et la nécessité de faire face à ses graves répercussions sur la santé mentale, psychologique et physique des personnes concernées». Ces répercussions s'étendent à la famille et à la société en raison du coût financier élevé de l’addiction, a-t-il ajouté, notant que l’impact concerné tant les individus et leurs familles que la dynamique de développement économique et social du Royaume.

Le président du CESE a rappelé que le Maroc est «l'un des premiers pays de la région Moyen-Orient et Afrique du Nord (MENA) à adopter des politiques de santé publique visant à prévenir et à prendre en charge les troubles addictifs», soulignant que «de nombreux plans nationaux et mesures ont été mis en place depuis les années 2000».

Ahmed Réda Chami a néanmoins regretté l’insuffisance des structures de traitement des conduites addictives, des ressources humaines médicales spécialisées, outre le maintien de «l'approche judiciaire répressive qui considère les personnes addictives comme des délinquants à incriminer, au lieu de les considérer comme des malades ayant besoin d'un traitement. A l’arrivée, une stigmatisation sociale et une exclusion familiale au lieu d’une prise en charge».

«Les conduites addictives, a-t-il déploré, ne bénéficient pas encore d'une reconnaissance et d'une prise en charge de la part des organismes de protection sociale, et ne sont pas considérées comme des maladies malgré leur inscription sur la liste de l'Organisation mondiale de la santé (OMS). Il est grand temps d’y remédier», a conclu Chami.

Par Mohamed Chakir Alaoui et Brahim Moussaaid
Le 21/04/2022 à 12h39