Eh oui, la polyandrie a existé et continue à se pratiquer dans quelques sociétés tribales. En Afrique, elle est pratiquée chez les Bantous, répartis du Cameroun aux Comores et du Soudan à l’Afrique du Sud. Elle se pratique en Océanie, en Nouvelle-Calédonie, entre l’Australie et la Nouvelle-Zélande, en Malaisie et chez les Minangkabau en Indonésie. Elle existe surtout dans l’Inde du Sud (archipel des Laquedives), et au Yunnan, en Chine de l’Ouest.
La polyandrie est un système matriarcal. Chez les Minangkabau, plus importante société matrilinéaire au monde, c’est la famille de la femme qui demande la main de l’homme. Les enfants portent le nom de leur mère. Les femmes sont propriétaires de la terre et de tous les biens qu’elles transmettent en héritage à leurs filles. Et ce sont les oncles maternels, et non les pères, qui sont responsables des enfants.
La forme la plus courante est celle des maris visitants. La femme habite dans sa famille et les maris dans les leurs. Ils rejoignent les épouses la nuit et les quittent après le petit-déjeuner. Une autre forme, la polyandrie fraternelle, où plusieurs frères partagent une même épouse, est répandue chez quelques communautés tibétaines et népalaises. Les frères partagent les responsabilités familiales et sont tous les pères des enfants nés de cette union. Dans ces deux formes de polyandrie, c’est la femme qui choisit son partenaire de la nuit.
Les avantages de la polyandrie? La femme a plus d’aide dans les travaux de champs, plus de nourriture et de protection. Les hommes quittent leurs familles avec le bétail pendant des mois. Un ou plusieurs autres maris restent sur place pour prendre soin de la famille.
«La polyandrie répondait à des besoins économiques et existe dans des sociétés aux ressources limitées, où les terrains cultivables sont rares.»
La polyandrie répondait à des besoins économiques et existe dans des sociétés aux ressources limitées, où les terrains cultivables sont rares et accidentés, dans des régions montagneuses. En épousant une même femme, les frères peuvent garder entière l’exploitation familiale, sans la partager en héritage, chose qui les appauvrirait davantage. Par ailleurs, dans ces sociétés, la polyandrie permet de limiter le nombre de naissances pour faire face à la rareté des ressources.
La polyandrie a existé avant l’Islam qui l’a interdite et instauré un modèle de mariage unique pour les femmes. Parmi les unions, il y avait, en Arabie préislamique, nikah al-istibda’. Istibda’ signifie la recherche d’une progéniture. Un homme permettait à son épouse de copuler avec un autre homme, jeune, beau et robuste. Il y avait ainsi des «étalons» dont le rôle était d’améliorer la «race».
Nikah al-raht. Un groupe d’hommes, dix au maximum, avait des rapports avec une même femme lors d’une période convenue à l’avance. Si elle accouche, elle choisit un père à son enfant parmi ce groupe.
Nikah al ab’al. L’homme demande la main d’une femme à son père ou tuteur moyennant un douaire. Il pouvait être polygame, mais sa femme n’avait pas droit à la polyandrie. C’est la seule forme qui a été permise par l’Islam.
Nikah al bugha’. Un certain nombre d’hommes fréquentait une femme exerçant la prostitution et signalée comme telle avec un drapeau planté à sa porte. Quand un enfant naît, la mère fait appel à un kaif (physionomiste) qui rassemble tous les hommes concernés et désigne le père… à partir des formes des pieds, comparés à ceux du nourrisson.
Nikah assabi. Ce type d’union, avec les captives de guerre, ne concernait que les hommes. Mais ces femmes ne pouvaient refuser.
Nikah al badal. C’est un mariage où deux hommes échangeaient entre eux leurs épouses définitivement.
Nikah al ima. Le propriétaire d’une esclave l’envoyait copuler avec un de ses amis.
Nikah achighar. Un homme épouse une femme à condition que le tuteur de celle-ci épouse une femme dans le groupe de l’époux.
Une des formes existantes aujourd’hui encore est nikah al-mut’a (mariage de jouissance). L’homme épouse une femme en ayant convenu avec elle une durée limitée: un jour, un mois ou plus. Cette union, qui a été interdite par le Prophète, perdure chez quelques populations sunnites, notamment du Golfe arabique, et surtout chez les chiites qui l’autorisent.
D’autres unions existaient, dont Al Mudamadah, par laquelle une femme pouvait avoir des rapports avec un autre homme que le mari, en période de famine. Cela se passait dans les marchés publics et les femmes revenaient avec de la nourriture et des biens.
Union dhawaq (de dégustation), répandue chez les Arabes préislamiques. Une femme pouvait refuser de s’attacher à un seul homme à vie et en épouser plusieurs, successivement, juste pour le plaisir sexuel.
Toujours en Arabie préislamique, existait l’union maqt. La veuve était héritée par le fils aîné de son mari, né d’une autre femme. S’il refuse, elle revient à un autre fils, sinon, elle passe à des proches. Elle ne peut se libérer que si elle paye un dû à son acquéreur. Cette union est proche du lévirat, dans le Judaïsme. Si un homme meurt sans laisser de fils, sa femme revient à son frère. Si elle enfante, l’enfant est affilié au mari défunt. Le Coran a interdit le lévirat.
La polyandrie est interdite et pénalisée dans la grande majorité des pays. Cependant, en Afrique du Sud, où la polygamie et le mariage entre personnes du même sexe sont autorisés, il y a eu un débat sur la possibilité d’autoriser la polyandrie. Ce qui a provoqué un tollé dans les milieux conservateurs.
La polyandrie est en disparition. Avec l’influence de la modernité et la connexion à Internet, les structures familiales se transforment. La scolarisation des filles va l’anéantir. L’Islam nous a privées de la polyandrie, mais avouons, mesdames, un seul époux? Baaaaaaaraka (assez)!