L’affaire du directeur de l’Agence urbaine de Marrakech, qui a éclaté il y a un peu plus de six semaines, n’en finit pas de livrer ses mystères. Le juge d’instruction près la Chambre criminelle de la Cour d’appel de Marrakech, en charge du dossier, est, pour ainsi dire, tombé sur une véritable caverne d’Ali Baba. Ainsi, en plus des 500.000 dirhams retrouvés sur le directeur de l’Agence, Khalid Ouaya, au moment de son interpellation par la BNPJ en flagrant délit de corruption, des montants astronomiques et des objets précieux ont été découverts dans ses deux résidences, rapporte le quotidien Al Ahdath Al Maghribia dans son édition du jeudi 22 août.
C’est ainsi, poursuit le quotidien, que dans son logement de fonction, une villa cossue sise dans un quartier huppé de Marrakech, ainsi que dans son domicile privé, situé dans le quartier Hay Riyad, à Rabat, les enquêteurs ont pu saisir un chèque de 8,66 millions de dirhams et d’importantes sommes en argent liquide, dont des devises, dépassant les 10 millions de dirhams. Dans les coffres-forts qui se trouvaient sans ses deux résidences, les enquêteurs ont également saisi des bijoux, des pierres précieuses, ainsi que des montres de grande valeur. Les deux coffres-forts contenaient, de même, des documents et des dossiers relatifs aux projets immobiliers de grande envergure dans la ville ocre.
Le directeur de l’Agence urbaine qui, de par sa fonction, détient le dernier mot dans les procédures relatives aux projets immobiliers et est au fait des complications et des tenants et aboutissants du secteur immobilier, n’a trouvé d’autre argument pour justifier sa procession des 500.000 dirhams au moment de son arrestation que de prétendre qu’il s’agissait d’une avance sur un montant de plus de 10 millions de dirhams. Le montant que lui devait, selon lui, le promoteur à l’origine de la plainte qui a entraîné son interpellation. D’après le directeur de l’Agence, poursuit Al Ahdath Al Maghribia, cette somme correspond aux honoraires dus à une société, qui s’était chargée des travaux de «suivi et d’accompagnement» pour l’ensemble des projets immobiliers initiés par ce promoteur.
Le quotidien souligne qu’un architecte basé à Rabat et en relation avec le directeur de l’Agence, dont il ne se sépare presque jamais, serait également convoqué par la justice. Cet architecte a d’ailleurs supervisé plusieurs projets immobiliers à Marrakech, précise le quotidien, citant des sources de l’enquête. Il aurait même décroché plusieurs marchés dans la ville ocre, grâce aux pressions exercées par le directeur de l’Agence sur les promoteurs locaux ou à des promesses de faciliter les procédures d’obtention des différentes autorisations.
Le quotidien cite, à ce propos, un cas où l’architecte en question, initialement engagé pour le suivi d’un projet immobilier, a été à l’origine de complications survenues subitement et ayant entraîné l’arrêt du chantier. Il aurait ainsi, relate le journal, déposé une plainte auprès de la commune pour absence de «cahier de chantier», document nécessaire à la poursuite des travaux. Etant donné les relations tentaculaires que le directeur de l’Agence a pu tisser dans les rouages des administrations chargées de l’urbanisme, relate le quotidien, la machine s’est vite mise en branle et l’arrêt du chantier a été décrété par les autorités en un temps record.
C’est à ce moment, poursuit le quotidien, que le directeur de l’Agence urbaine est entré en jeu, offrant ses services pour débloquer la situation moyennant, évidemment, une commission substantielle dépassant les dix millions de dirhams. Et c’est justement ce coup qui a valu la perte du directeur de l’Agence urbaine. Cette affaire est, en effet, à l’origine de la plainte qui a été déposée contre lui et du guet-apens qui lui a été tendu par la BNPJ et qui s’est soldé par son arrestation en flagrant délit de corruption.