Humeur. Et si Abdelilah Benkirane tirait sur un joint pour se détendre?

Khalid Gueddar

Eprouvant ce besoin vital de continuer d’exister politiquement, l’ancien Chef de gouvernement met sa démission sur la table pour contraindre son parti de rejeter le projet de loi sur l'usage légal du cannabis. Mélange des genres, populisme et démagogie restent visiblement la daube de l’homme fort du PJD.

Le 03/03/2021 à 14h14

Déambuler entre son salon rouge pâle, sa chambre à coucher rose – zbété ne réussit décidément plus à notre Benkiky national! L’ancien chef de gouvernement est lassé d’encaisser sa retraite royale, de traîner en berline officielle et d’engueuler ses bodyguards payés par le contribuable… Son instinct de 7laïki qui a fait son succès en politique reprend le dessus. Ce besoin vital d’exister politiquement le démange, autant que sa nostalgie de l’époque où il était Ra3iss 7oukouma, comme il aime le répéter lors de ses couscous-parties du vendredi, devant son auditoire qui boit ses paroles comme du petit-lait pour accompagner la semoule de Nabila. Même la webcam installée par son CM, face à son minbar sur coussins, ne suffit plus à satisfaire son désir insatiable de prendre position.

Cette semaine, il a de nouveau jeté un pavé dans la marre. Et ce n’est pas à travers un de ses live en 9echaba sur Facebook durant lesquels il a pris l’habitude de tirer sur tout ce qui bouge. Non, c’est plutôt avec un gribouillage manuscrit sur une feuille volante qui n’a aucune valeur. Benkirane menace par écrit de geler son adhésion au PJD au cas où son secrétariat général approuverait le projet de loi portant sur l’usage légal du chanvre indien. Et si les parlementaires du PJD commettent l’affront de voter une telle législation, l’ancien secrétaire général avertit qu’il se retirera définitivement de la formation islamiste.

Ce genre de chantage est décevant de la part d’une personnalité de l’acabit d’Abdelilah Benkirane. Lui qui a été chef de gouvernement est censé faire la distinction entre l’utilisation du cannabis à des fins médicales et son usage récréatif. Ce dernier reste d’ailleurs toujours prohibé au Maroc et passible d’une condamnation pénale. Le projet de loi 13-21 en discussion au niveau du Conseil de gouvernement restreint l’utilisation du chanvre indien à un usage exclusivement médical. Il a même prévu les garde-fous nécessaires, notamment à travers la création d’une Agence publique qui aura le monopole sur la commercialisation de cette plante.

Au lieu de se prêter à un populisme de bas étage qui peut se résumer au pléonasme "la drogue, c’est mauvais!", Benkirane aurait pu se documenter pour prendre conscience que le marché mondial du cannabis à usage thérapeutique est en pleine ébullition. Il devrait croître de plus de 20% chaque année et peser près de 57 milliards de dollars d’ici 2026. Le Maroc n’a aucune raison de rester à la marge de ce nouveau secteur qui a fait la fortune de dizaines d’entreprises nord-américaines. Surtout que même la commission des Nations unies a décidé de déclassifier le cannabis de la liste des drogues dures où elle figurait au même rang que l’héroïne.

Benkirane aurait pu se servir de son aura et expliquer ces vérités. Il aurait pu faire preuve d'empathie, avec son propre style, envers les 60.000 familles marocaines vivant grâce à cette culture et jusque-là coincés entre le joug de narcotrafiquants et des autorités qui émettent des mandats d'arrêts à leur encontre pour cette culture illégale. Un véritable homme d’Etat aurait agi en tirant le débat vers le haut, plutôt que d’exhumer des archives où il tape dans le tas, dans un discours incohérent dans le fond, mais amusant dans la forme.Benkirane a malheureusement encore une fois choisi la voie facile et reste dans sa zone de confort en usant de démagogie et de populisme. Pas surprenant, on sait bien que c’est cela son kif…

Par Fahd Iraqi
Le 03/03/2021 à 14h14