Deux enfants d’origine marocaine ont été retirés à leurs familles par les services sociaux suédois, avant d’être placés dans des familles d’accueil, a affirmé le ministre des Affaires étrangères, de la coopération africaine et des Marocains résidant à l’étranger, Nasser Bourita, en réponse à une question écrite du député Abdellah Bouanou du Parti de la justice et du développement (PJD) à la Chambre des représentants.
Le député s’interrogeait sur «la souffrance de la diaspora marocaine en Suède face à la discrimination et à l’enlèvement de leurs enfants pour les placer dans des familles d’accueil chrétiennes ou homosexuelles». Il avait mentionné dans sa question écrite que «quelques dizaines de familles marocaines s’étaient vu retirer la garde de leurs enfants, selon des estimations non officielles».
Dans sa réponse, Nasser Bourita assure que son département a suivi «avec grand intérêt» le dossier et est entré, via l’ambassade du Maroc en Suède, en contact avec l’ensemble des composantes de la diaspora marocaine dans ce pays, afin de s’enquérir des cas d’enfants marocains retirés à leurs familles.
L’enquête menée par les services de la diplomatie marocaine a révélé que seulement deux familles marocaines sont concernées par cette affaire. L’ambassade du Maroc en Suède a contacté ces dernières, ainsi que leurs proches au Maroc, afin de «suivre de près ces deux cas», souligne le ministre des Affaires étrangères.
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Les services de l’ambassade ont notamment «multiplié» les échanges avec les autorités suédoises afin de faire la lumière sur les deux affaires et déterminer à quel degré la décision de placer les deux enfants en question loin de leurs familles est conforme à la réglementation du pays. Une série de réunions urgentes ont également été tenues avec l’ensemble des associations marocaines s’activant dans le domaine social en Suède, souligne le ministre.
«Non-assimilation» des lois suédoises
Suite aux discussions menées par les services de la diplomatie marocaine avec les différents acteurs, il s’est avéré que le problème est, à la base, dû à «la non-assimilation des lois du pays par un nombre considérable de nouveaux arrivés en Suède», indique Nasser Bourita.
Ces personnes auraient également des difficultés à assimiler la réglementation suédoise en matière de protection des droits de l’enfant, laquelle «est prise très au sérieux» par le pays. A cela s’ajoutent l’«écart culturel» et la «différence radicale» entre les deux sociétés dans «l’éducation des enfants».
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A l’exception des deux cas susmentionnés, les cas où des familles marocaines se voient retirer leurs enfants par les services sociaux suédois sont «rares», poursuit Nasser Bourita. Cela est dû au fait que «l’ensemble des composantes de la diaspora marocaine veille au respect des valeurs et lois du pays d’accueil».
«Enlèvements» systématisés des enfants musulmans ?
Les autorités suédoises ont été au centre d’une polémique enclenchée par certains activistes et organisations non gouvernementales islamistes, les accusant d’«enlèvements» systématisés d’enfants musulmans à leurs familles pour les confier à des familles chrétiennes.
Ce qui a commencé en décembre 2021 par des publications sur les réseaux sociaux par des pages telles que «Shuoun Islamiya» (Affaires islamiques) ou encore «Barnens rättigheter, mina rättigheter» (Les droits de l’enfant, mes droits) s’est vite transformé en des manifestations organisées en février dernier dans plusieurs villes du pays.
Face à l’ampleur qu’a prise cette affaire, aussi bien en Suède que dans de nombreux pays arabes et musulmans, le gouvernement suédois a catégoriquement nié, par la voix de son ministre de l’Immigration et de l’intégration, Anders Ygeman, qu’il s’agit d’«enlèvements systématisés».
C’est ce qu’a également assuré le ministère des Affaires étrangères suédois. Dans sa réponse écrite, Nasser Bourita indique que les ambassadeurs des pays arabes et musulmans se sont réunis avec de hauts responsables dudit ministère qui ont «nié l’ensemble des accusations concernant une politique gouvernementale systématisée visant à retirer les enfants des diasporas arabes et musulmanes à leurs familles».
«Sur pied d’égalité»
Lors de ces réunions, les responsables du ministère des Affaires étrangères suédois ont assuré que le retrait des enfants par les services sociaux ne concerne pas uniquement les familles d’immigrés. «Les autorités suédoises ont ajouté que le retrait d’un enfant n’a lieu que lorsqu’il n’y a aucun doute que l’enfant est victime de maltraitance psychologique ou physique par son entourage familial direct», lit-on dans la réponse du ministre.
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La procédure légale de retrait et de placement des enfants est «appliquée aussi bien aux citoyens suédois qu’aux citoyens d’origine arabe ou musulmane, sur un pied d’égalité», souligne la même source.
Notons que la loi suédoise sur la protection de l’enfance, appelée «LVU», est réputée comme l’une des plus strictes. Elle permet aux services sociaux de demander le placement temporaire d’un enfant en cas notamment de maltraitance, mais également si les parents peinent à subvenir à ses besoins.
En Suède, le personnel de l’école, de l’hôpital et même les voisins sont tenus par la loi de signaler toute suspicion de maltraitance envers un enfant aux services sociaux, qui, le cas échéant, déclenchent une enquête.