La récente décision de la Cour suprême américaine sur l’avortement aura-t-elle un impact sur le cadre légal relatif à ce sujet au Maroc? Difficile de le prédire. Cependant, la société civile marocaine n’écarte pas cette éventualité. Ou du moins une partie de la société civile.
Ainsi, d’après le président de l’Association marocaine de lutte contre l’avortement clandestin (AMLAC), Chafik Chraibi, qui s’est confié à l'hebdomadaire La Vie éco, dans son édition du vendredi 15 juillet, la décision prise aux Etats-Unis, le 24 juin, pourrait bien influencer le cours du projet de loi de 2016 apportant un assouplissement de la loi interdisant et pénalisant l’interruption volontaire de grossesse. C’est en tout cas un argument qui pourrait être avancé par le clan anti-dépénalisation.
L’acteur associatif reconnaît néanmoins que «les opposants au projet, même les Etats-Unis, ne sont pas un modèle à suivre». Il n’en reste pas moins que des membres de la société civile concernés par ce sujet restent sur leurs gardes au moment où le projet de légalisation de l’avortement, dans certaines conditions, est de nouveau à l’examen. Ce projet, faut-il le rappeler, n’a connu aucune avancée palpable depuis 2016.
Bref, aujourd’hui, le ministère de la Justice étudie même des pistes d’extension des conditions d’autorisation de cet acte qui, relève La Vie éco, protégerait la vie des femmes et des enfants. C’est d’ailleurs dans ce cadre que le ministre de la Justice, Abdellatif Ouahbi, a reçu dernièrement le président de l’AMLAC.
Lors de cette rencontre, l’Association a suggéré la révision de l’article 453 du Code pénal qui ne prend en considération que la santé physique de la femme et de l’enfant. «Nous estimons que le Maroc devrait s’aligner sur la définition retenue par l’Organisation mondiale de la santé qui englobe aussi bien le bien-être physique que le bien-être mental et social», souligne Dr. Chraibi, cité par l’hebdomadaire.
Et il semble que la revendication de l’AMLAC ait trouvé écho auprès d’Abdellatif Ouahbi puisque, selon son président, « le ministre nous a informés, au cours de notre dernière rencontre, que l’extension des conditions de légalisation de l’avortement est à l’étude».
Au Maroc, rappelle l’hebdomadaire, l’avortement est puni par la loi d’une peine de prison ferme. L’arrêt volontaire de la grossesse est, en effet, passible de six mois à cinq ans de prison. Il n’est autorisé que si la vie de la femme enceinte est en danger.
Pourtant, citant l’AMLAC, l’hebdomadaire avance qu’entre 600 à 800 interruptions de grossesse sont pratiquées illégalement tous les jours. Un grand nombre est effectué par la prise de mixtures et autres préparations concoctées par des herboristes traditionnels.
Cependant, relève l’hebdomadaire, il paraît qu’une grande partie se fait dans le milieu médical, sous le manteau dans les cliniques et cabinets de gynécologie. Mais pour cela, il faut avoir les moyens. Un avortement est facturé 4 000 à 10 000 DH dans une clinique, précise l’hebdomadaire. Pour les femmes et jeunes filles qui n’en ont pas les moyens, elles optent pour des recettes traditionnelles à seulement 300 DH.