Ludovic-Mohamed Zahed est imam et officie à Stockholm, ce qui ne l’aura pas empêché, malgré la distance, de s’attirer les foudres de Abdelfattah Hamaddache, chef algérien du mouvement salafiste de la Sahwa qui, soit dit en passant, brasse beaucoup d’air et fait bien du bruit dans la plus grande indifférence. Ça ne l’empêche pas de hurler dans le désert avec les quelques membres de son Front la Sahwa salafiste libre (Libre pour qui? Pour quoi? Voilà bien un concept qui mérite débat tant il n’a jamais été si galvaudé) et de réagir à coup de fatwas et communiqués pour le moins cinglants contre ceux qui vivent, dit-il, dans le péché. Et là, nul doute qu’il a dû frôler l’apoplexie car c’était tout de même un peu beaucoup pour un seul homme: un imam algérien, homosexuel, marié de surcroît à un autre homme et qui marie deux femmes iraniennes dans sa mosquée, dont l’une est d’ailleurs enceinte tandis que l’autre est atteinte d’une maladie génétique incurable qui touche les os. Sentence: il faut retirer, décrétera Abdelfattah Hamaddache dans un communiqué, sa nationalité algérienne à ce «pervers qui se dit imam homosexuel et marie des homosexuels» pour «laver l'honneur de l'Algérie». Et de préciser: «Il n'existe pas d'imam homosexuel en Islam. L'homosexuel en Islam est traité par le glaive et la mort afin de laver la société de sa saleté».
La «sentence» est tombée jeudi. Pendant ce temps, l’imam, loin de trembler devant les menaces de Hamaddache, dit sa fierté d’avoir été, avec son compagnon Qiyaam, «les premiers musulmans gay à être mariés publiquement par un imam à Paris en 2012», de se sentir ainsi «partie prenante dans un mouvement progressiste de notre histoire humaine» et d’avoir permis à ces deux femmes de démarrer une nouvelle vie «après des années de souffrances», une souffrance toujours présente car, ajoutera –t-il, «il est dur de quitter le pays pour un Etat étranger, mais enfin, elles peuvent vivre ensemble».