Les déclarations polémiques de l’ancien chef du gouvernement marocain, Abdelilah Benkirane, continuent de susciter l’indignation. Lors d’un rassemblement partisan à Agadir, le secrétaire général du Parti de la justice et du développement (PJD) s’est attiré de vives critiques après avoir comparé les femmes célibataires…à des cigognes.
Des propos qui ont provoqué un tollé dans l’opinion publique et qui n’ont pas laissé indifférente Yasmina Baddou, ancienne ministre de la Santé et figure du Parti de l’Istiqlal, indique le quotidien Al Ahdath Al Maghribia dans son édition du vendredi 11 juillet. Dans une lettre ouverte adressée à Benkirane, Yasmina Baddou fustige des propos qu’elle juge «humiliants, rétrogrades et contraires aux valeurs du Maroc moderne».
«Vos récentes déclarations, dans lesquelles vous assimilez les filles à des cigognes et réduisez la femme non mariée à un animal, ont profondément choqué l’opinion publique nationale. En tant que citoyenne, femme et personne attachée aux valeurs de dignité, d’égalité et de justice, je ne peux rester silencieuse face à un tel discours indigne et inacceptable», écrit-elle.
Dans sa missive, l’ancienne ministre ne mâche pas ses mots. Elle rappelle à l’ancien chef du gouvernement que «la fille n’est pas une cigogne, la femme n’est pas un animal, et l’éducation n’est pas un privilège, mais un droit fondamental». Tout en reconnaissant le droit à la liberté d’opinion, Yasmina Baddou souligne qu’un responsable politique porte une «responsabilité morale et nationale», et que ses mots «nourrissent une culture de discrimination et d’exclusion, aux antipodes de l’esprit de la Constitution et des valeurs de l’islam tolérant», lit-on.
La dirigeante istiqlalienne insiste sur le rôle clé de l’éducation des filles dans le développement du pays. «L’éducation de la fille est la clé du développement, ce n’est pas une menace pour les valeurs. Une fille instruite devient une femme libre, consciente, capable de contribuer à l’économie, de participer à la vie publique et d’éduquer les générations sur des bases saines. Éduquer une fille, c’est éduquer toute une société».
Plus qu’une simple défense des droits des femmes, Yasmina Baddou met en garde contre un discours qu’elle juge d’un autre âge: «Vos propos nous renvoient à une époque sombre où l’on voulait marginaliser et écarter la femme de la sphère publique. Or, le Maroc a changé. Les Marocaines sont aujourd’hui scientifiques, médecins, ingénieures, enseignantes, magistrates, ministres, artistes et mères accomplies qui assument de multiples rôles avec compétence et mérite».
Pour l’ex-ministre, rabaisser la femme à son statut matrimonial ou la comparer à un animal constitue «une atteinte directe à la dignité de la moitié de la société, une insulte à l’intelligence et à la conscience de la nation tout entière». Elle conclut son message par un appel ferme. «Le Maroc ne se construit pas en excluant ses filles, mais en les élevant et en les impliquant pleinement. Le Maroc de demain se fera avec ses femmes, et certainement pas sans elles», écrit l’ancienne ministre.
Rappelons que les propos de Benkirane, tenus lors d’une activité politique à Agadir, ont choqué bien au-delà des cercles féministes. L’ancien chef du gouvernement y affirmait que les femmes célibataires, malgré leurs diplômes, finiraient seules «comme des cigognes» si elles ne se mariaient pas.








