Tout commence le 21 juin 2016 quand le roi Mohammed VI reçoit, au palais du Méchouar à Casablanca, le président de la République du Rwanda, Paul Kagame. Ce premier déplacement du chef d'Etat rwandais a de quoi surprendre le commun des observateurs, d'autant plus que le pays aux destinées duquel il préside se trouve dans une région géographiquement éloignée, politiquement inconnue et économiquement inexplorée. Un mystère qui ne tardera pas à être levé quand le roi se rendra le 19 octobre à Kigali, capitale rwandaise, première étape d'une tournée qui conduira le souverain à Dar Es-Salam en Tanzanie, écourtée à cause de la tenue de la COP22 dont l'une des étapes phares est le Sommet Maroc-Afrique présidé par le roi en ce mémorable 18 octobre à Marrakech. Un geste à teneur politique d'autant plus forte qu'il replace l'Afrique au coeur des enjeux stratégiques internationaux, conformément à l'intérêt que Mohammed VI n'a eu de cesse d'attacher à ce continent.
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Un intérêt qui n'a d'égal que cette forte détermination royale à développer, renforcer et diversifier ses partenariats avec les pays africains frères. Mohammed VI, aussitôt après la clôture de ce sommet planétaire sur les changements climatiques (COP22), le 18 octobre dernier, reprend son périple dans la Corne de l'Afrique, précisément en Ethiopie où le souverain a présidé, entre autres, le lancement d'un projet de construction d'une plateforme industrielle de production d'engrais qui permettra à l'Ethiope de devenir autosuffisante à l'horizon 2025.
Après un court mais très fructueux séjour en Ethiopie, Mohammed VI entreprend à partir du 19 novembre une visite historique à Madagascar. Un périple malgache qui, au-delà de sa portée socio-économique, garde une symbolique d'autant plus forte que Madagascar avait été la terre d'exil pour les défunts rois Mohammed V et Hassan II.
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Après cette projection en Afrique de l'Est, et donc au-delà de la "zone de confort" qu'est l'Afrique de l'Ouest, le souverain entamera début décembre, une première visite historique dans la République du Nigeria. Point d'orgue de cette visite, le lancemement d'un méga-projet de gazoduc et la mise en chantier d'une plateforme industrielle de production d'engrais.
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Les retombées économiques de ces projets mutuellement avantageux ne sont pas à démontrer. Ils participent d'une stratégie royale ambitieuse pour l'Afrique, déclinée sur la base du principe gagnant-gagnant, offrant aux pays africains une réelle alternative à la coopération Nord-Sud, qui a réduit l'Afrique à un simple "gisement d'affaires" à exploiter par les anciennes puissances coloniales.
Une vision royale donc novatrice, audacieuse et effective puisqu'elle s'appuie sur des projets concrets sur le terrain. Il faut souligner que cette vision n'aurait jamais pu se concrétiser s'il n'y avait pas cette volonté politique témoignée au plus haut point de l'Etat marocain, et qui fait de l'Afrique le terrain d'action privilégié du royaume du Maroc.
Seulement voilà: si l'action du Maroc sur le terrain de la coopération en Afrique est une réalité, le royaume a été néanmoins desservi par son absence de l'Union africaine. Plus de trente ans se sont en effet écoulés depuis que le Maroc a quitté cette structure panafricaine, en raison de l'admission de la "RASD" en 1982. Conscient de ce handicap, instrumentalisé à fond par les ennemis de l'intégrité territoriale du royaume, le Maroc a officiellement demandé en ce mémorable 23 septembre 2016, à réintégrer cette organisation continentale. Un retour dicté par les changements géostratégiques que connaissent le monde en général et le continent africain en particulier. Acteur clé de l'économie africaine (deuxième investisseur en Afrique après la République populaire de Chine), le Maroc a donc beaucoup à apporter à un continent qui continue d'être plombé par le problème du sous-développement, tant au plan économique que politique.
Le discours de la Marche verte prononcé le 6 novembre dernier à partir Dakar, est à cet égard très édifiant. Le souverain a porté le symbole au-delà des frontières du royaume, réaffirmant autrement l'ancrage inébranlable du Maroc dans sa terre africaine.