Certains reprochaient au Hirak d’Al Hoceima son machisme. Jusque-là, lors des manifestations et des prises de paroles, la domination masculine était la règle, voire la seule règle. Avec Nawal Ben Aïssa, la donne est en train de changer. Héritière, là encore autoproclamée, du «combat» de Nasser Zefzafi depuis son arrestation lundi 29 mai, c’est elle qui prend le lead.
Ses éléments de langage sont identiques à ceux de Zefzafi. A cette différence près que son terrain de prédilection reste sa page Facebook. Il ne se passe pas une heure sans qu’elle y poste un message. Tantôt pour annoncer une grève générale, tantôt pour indiquer l’heure et le lieu d’un rassemblement. Son leitmotiv: la libération des personnes arrêtées suite aux actes de vandalisme ayant suivi l’arrestation de Zefzafi, mais aussi la concrétisation du cahier revendicatif qui anime le Hirak.
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Plus qu’une voix, Nawal Ben Aïssa est aussi une plume. Dans ce qui ressemble à une lettre ouverte, traduite hier mercredi 31 mai en français, elle fait part de ce qui l’a fait «bouger»: la pauvreté du Rif, le peu d’instruction et le cancer qui ravagent sa population. Sauf que c'est le mauvais vecteur qui sert de relai, à savoir le site yennayri qui ne rate aucune occasion de déverser sa haine sur le Maroc et ses institutions.
Nawal Ben Aïssa est aussi la cheville ouvrière du Hirak. La marche du mardi 30 mai au quartier Sidi Abed, c’est elle. Celle d’hier mercredi également. On notera que lors de cette dernière marche l’élément féminin était présent et bien mis en valeur à la tête des manifestants. «Les médias du monde entier nous regardent», avait alerté Nawal Ben Aïssa dans la journée, comme pour insister sur l’importance de l’image lors de cette dernière manifestation. D’aucuns lui accordent plus de fermeté que Zefzafi lui-même. «Ceux qui useront de pierres ou de violence ne sont pas des nôtres», a-t-elle prévenu. Hier à Al Hoceima, il y a avait moins de monde à la manifestation, mais celle-ci était mieux organisée, constate l'AFP.
Présente sur la scène rifaine depuis le décès accidentel de Mohcine Fikri, le marchand de poisson broyé par une benne à ordures, Nawal Ben Aïssa, 36 ans et mère de quatre enfants, a depuis multiplié les sorties. Mais elle était restée dans l’ombre d’un Zefzafi ne tolérant aucune concurrence. Maintenant que son étoile commence à briller, elle passe illico à l’offensive. Dans une vidéo postée ce jeudi, elle dit faire l'objet d’un mandat d’arrêt et affirme qu’elle va se rendre.
Finalement, il n'en est rien. Une source sécuritaire à Al Hoceima a affirmé à le360 qu'aucun mandat d'arrêt n'a été délivré contre elle. Que doit-on conclure? Une chose est sûre, dans la course au leadership du Hirak, Ben Aïssa est désormais bien partie pour jouer les premiers rôles.
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