Les attentes sont immenses. Chef de gouvernement plutôt discret, Saâd-Eddine El Othmani sera-t-il à la hauteur? Si les premiers mois de son mandat ont été plutôt calmes, l’attentisme ambiant n’augure rien de bon. Mais lui s’en défend. Le gouvernement, dit-il, vient à peine de commencer son mandat. Il a une stratégie et il entend bien la mettre en œuvre.Pour en parler, le360 a rencontré le chef de l’Exécutif. Voici, point par point, en images et en texte, les moments forts.
On vous reproche souvent d'être peu communicatif. Qu’en dites-vous?
Dans un intervalle de temps assez court, soit en quatre mois, j’ai accordé de nombreuses interviews et communiqué à chaque fois qu’il le fallait. J’ai d’ailleurs donné pas moins de quatre entretiens la semaine dernière. Cela étant, nous nous considérons comme un gouvernement de l’écoute et des réalisations concrètes. Ceci, à travers des chantiers de réforme, des facilitations aux entreprises et aux investisseurs, et des services sociaux à la hauteur des attentes des citoyens.
Autant le discours du trône était fort, autant prévaut une sorte d’attentisme chez les acteurs censés le porter. Le gouvernement en premier. Comment expliquez-vous ce paradoxe?Il est vrai que le discours du trône a été puissant. Nous y avons répondu en accélérant les chantiers de développement et en rattrapant les retards enregistrés. Tous les ministres se sont mobilisés, notamment à travers des visites de terrain dans de nombreuses régions. Il ne se passe pas une semaine sans qu’un ou plusieurs ministres ne se rendent dans une région donnée. Cette dynamique est importante dans la mesure où les ministres se rendent compte de visu des dysfonctionnements éventuels dans certains chantiers et programmes, et des raisons des problèmes.
Vous venez d’annoncer le bilan des 120 premiers jours de l'actuel gouvernement. D'aucuns estiment qu’il est peu reluisant…
Au contraire, notre bilan est positif et d’aucuns en témoignent. Il est clair que le Maroc fait face à de nombreux défis sociaux, notamment en matière d’emploi, de santé et d’éducation. Mais ces problèmes ne datent pas d’il y a quatre mois. Ils sont le résultat de politiques qui remontent parfois à plus de 30 ans. Là où nous avons réussi, c’est dans la mise en application de véritables stratégies pour y remédier. Je cite en exemple tout le travail, certes encore modeste, qui se fait dans l’Education nationale. En matière de santé, 6 hôpitaux ont été construits durant les quatre derniers mois. Et nous entendons injecter 250 millions de dirhams pour revaloriser les salaires des infirmiers. Un partenariat est également en cours d’élaboration entre le ministère de la Santé et les collectivités locales pour évaluer les besoins en ressources humaines dans ce secteur et y répondre pour l’ensemble du territoire, dans les villes comme dans les campagnes.
Quid de l’emploi?
Dans notre programme, nous nous sommes engagés à faire baisser le taux de chômage à 8,5%. Nous y travaillons à travers des mesures d’encouragement aux entreprises et aux investisseurs. A cette fin, nous dialoguons avec le patronat comme avec les syndicats. Pour sa part, la Commission des investissements vient de valider 51 projets d’investissements avec des milliers d’emplois en perspective. Personnellement, je reçois chaque semaine des investisseurs ayant des requêtes et des propositions à me faire.
Quelles sont les priorités du projet de loi de finances 2018?
Nous avons d’ores et déjà fixé cinq priorités majeures. La première n’est autre que l’investissement et l’entreprise. La deuxième est la réforme de l’administration et la lutte contre la corruption. La troisième est l’amélioration quantitative et qualitative de l’enseignement. La quatrième est l’élargissement des services de santé et l’amélioration de la qualité des soins. La cinquième est l’emploi.
Que deviennent les projets de développement lancés à Al Hoceïma?Tous les projets figurant dans le programme "Al Hoceïma Manarat Al Moutawassit" sont lancés et seront achevés à temps. Idem pour tous les projets signés devant Sa Majesté le roi. A titre d’exemple, une commission interministérielle s’est rendue dans les provinces du sud pour faire le point sur les projets de développement annoncés et remédier aux éventuels blocages.
Le PJD, dont vous êtes le président du Conseil national, traverse une grave crise et certains avancent la thèse d’une mésentente entre vous et le secrétaire général du parti, Abdelilah Benkirane. Qu’en est-il exactement?
Mes relations avec Abdelilah Benkirane sont bonnes et je lui rends visite régulièrement. Le PJD est un parti doté d'institutions. Ce sont ces institutions qui décident. Que des divergences naissent entre ses membres, cela me paraît normal dans la vie d’un parti.
Alors pourquoi Benkirane n’assiste-t-il pas aux réunions de la majorité gouvernementale?
Tout simplement parce qu’il m’a délégué cette mission, du moment que je préside ces réunions.
Etes-vous pour ou contre un troisième mandat de Benkirane à la tête du PJD?
Je n’ai pas d’avis sur la question. C’est aux institutions du parti de trancher. Le débat n’a d’ailleurs pas encore commencé sur cette question.
Sur un registre plus personnel, que faites-vous de votre temps libre?
Je n’en ai plus. Avant, j’aimais lire. Maintenant, ce que je lis, ce sont les rapports, notes et projets qui me sont soumis. La tâche n’est pas facile et j’en suis conscient. Mais je reste optimiste quant à la capacité du Maroc d'aller de l’avant. Nous sommes un grand pays, avec une longue histoire, un magnifique peuple, un roi clairvoyant, des acquis certains en matière de développement dans de nombreux domaines. Les crises, qu'elles soient politiques ou économiques, nous sommes capables de les dépasser. On peut être en concurrence, et même se disputer parfois, mais nous habitons la même maison. A nous tous d’en prendre soin.