Un phénomène inédit dans les relations maroco-algériennes. Depuis le retour du Maroc au sein de l'Union africaine, voté à la majorité écrasante des chefs d'Etat africains, le 1er janvier 2017, lors du 27e Sommet de l'UA à Addis-Abeba, en Ethiopie, ces relations ont gagné en agressivité, à la faveur d'une nouvelle bataille où le débat a pris une forme musclée (au sens physique, s'entend).
Rappelez-vous: le 18 mai 2017, à Saint-Vincent et les Grenadines, aux Caraïbes, alors que se rassemblaient les membres du Comité spécial des 24 sur la décolonisation, un diplomate algérien, Soufiane Mimouni, numéro 3 dans l’ordre hiérarchique après le ministre et le SG du MAE algérien, a perdu son self-control et a asséné un coup de poing au diplomate marocain, Mohamed Ali Khamlichi (qui occupe le poste d’adjoint de l’ambassadeur du Maroc à Sainte-Lucie). Le diplomate algérien n'avait pas accepté que les populations du Sahara soient représentées par des élus locaux à la réunion des Caraïbes. Pour la première fois, huit pays se sont prononcés pour accorder aux élus de Laâyoune et Dakhla un siège dans ce comité et les entendre en leur qualité de représentants des populations du Sahara.
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Une percée diplomatique significative pour la marocanité du Sahara battant en brèche l'allégation algéro-séparatiste, selon laquelle le Polisario serait "le représentant exclusif du Sahara occidental". Face à cette percée, enregistrée quatre mois après le retour du Maroc dans le giron institutionnel panafricain, auquel Alger s'est opposé farouchement mais vainement, le haut responsable du MAE algérien n'a pas trouvé mieux à faire valoir que ses "muscles" pour manifester son désaccord!
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Un nouveau cap est donc franchi par la "diplomatie" algérienne, même si ce n'est pas la première fois que la population du Sahara se fait représenter à une réunion onusienne. Le 23 mars 2017, à l’ouverture de la 10e réunion annuelle conjointe de la Commission économique pour l’Afrique (CEA) de l’ONU et de la Commission de l’Union africaine (CUA), tenue à Dakar, une vive passe d'armes a en effet opposé des élus du Sahara marocain à une délégation de la "RASD", qu'Alger tentait d'imposer à une réunion organisée par l'ONU qui ne reconnaît pas cette entité fantoche. Nos valeureux élus ont en effet occupé le siège estampillé «Sahara occidental», faisant valoir leur droit de prendre part à cette réunion en tant que représentants légitimes des populations qui vivent dans le Sahara occidental.
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Et ce n'est pas tout! Un rebondissement diplomatique spectaculaire est survenu aussi dans le cadre du Sommet Afrique-Monde arabe, qui devait se tenir lundi 21 novembre 2016 à Malabo, capitale de la Guinée équatoriale, en présence de chefs d'Etat, d'émirs, de sultans et de hautes personnalités d'Afrique et du monde arabe. Ce Sommet afro-arabe, précédé d'un forum économique ouvert le 18 novembre à Malabo, a été reporté, en raison de la vive protestation du Maroc, soutenu par les monarchies du Golfe, à la participation de l'entité "RASD".
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Et ce n'est pas fini! Le cas le plus récent de cette nouvelle forme de bras de fer engagé sur fond de légitimité représentative du Sahara est survenu pas plus tard que le 24 août dernier, à Maputo, capitale du Mozambique, qui devait abriter une réunion de suivi de la TICAD (Conférence internationale du Japon sur le développement en Afrique). Ce cas rappelle à quelques égards celui survenu le 18 mai 2017, à Saint-Vincent et les Grenadines, aux Caraïbes. A la différence près que c'est le ministre des Affaires étrangères et de la coopération internationale, Nasser Bourita, qui a été cette fois violenté. Dans ce nouvel épisode, ce sont les autorités du Mozambique, l'un des farouches adversaires du Maroc sur la question du Sahara, qui ont commis ce forfait à l'encontre du MAE marocain, après avoir tenté vainement d'empêcher la délégation d'accéder à la salle "Joachim Chissano" où devait se dérouler la réunion de la TICAD. Les mêmes autorités voulaient, en revanche, imposer la participation du "vizir" polisarien, le dénommé Mohamed Ould Salek, à cette réunion où la "RASD" n'était pourtant pas invitée.
Cette partie de bras de fer est loin de se terminer, bien des empoignades sont encore à prévoir. Face à cette situation surgissent moult interrogations: la confrontation (physique) s'impose-t-elle comme option irréversible pour amener le Polisario, et son mentor algérien, à se conformer à la légalité internationale, sachant que l'entité "RASD" n'est reconnue par aucune organisation internationale, à leur tête les Nations unies? Y a-t-il d'autres voies de recours pour éviter ce genre de confrontations avec les nervis séparatistes épaulés par des agents algériens? Ou les diplomates marocains devront-ils désormais "recruter" des gardes du corps personnels pour dissuader ces nervis et leurs soutiens de recourir à des méthodes agressives?
Il est vrai que le recours à ces méthodes dignes des foires d'empoigne trahissent un haut degré de nervosité chez la partie adverse, en raison des camouflets qu'elle a essuyés sur la scène diplomatique internationale. Faut-il pour autant céder à leur (petit) jeu et recourir aux mêmes méthodes pour gagner la bataille de la légalité internationale? Ne faut-il pas mettre en place une nouvelle stratégie capable de mettre en échec leurs provocations sans jouer leur jeu?