Au parti de l’Istiqlal, on l’appelle Moulay M’hamed pour préserver son égo, eu égard à son passé militant. L’officiel, pour ne pas parler du reste.
Mais il lui arrive d’en faire trop et il a récemment décidé de (re)sévir, à l’occasion de l’adoption de la loi-cadre portant réforme de l’éducation nationale et instaurant l’enseignement de quelques (bien: "quelques") modules scientifiques et techniques en langues étrangères. Pas forcément en français.
Trempant dans un populisme à la Benkirane, il s'est dit inquiet pour l’identité de la Nation et des dangers qui la guettent à cause de «Hizb frança» et ses «lobbies». M'hamed Khalifa, qui défend bec et ongles l’enseignement en langue arabe, est le père de trois enfants qui ont fait leurs études dans des établissements français du Maroc. Yasser, Ghayat et Rkia, les fils et fille Khalifa, sont toujours là pour attester des graves et grandes contradictions de leur paternel. Ce que l'avocat plaide à cor et à cri en faveur des autres, il en préserve scrupuleusement les siens. Et c'est là le moindre des paradoxes de Moulay M’hamed.
L’avocat du diableAvocat de métier, M’hamed Khalifa ne s’arrête devant rien pour assouvir ses convoitises, tantôt pour la gloire politique au sein de l’Istiqlal, tantôt pour une place au gouvernement.
Dès ses premiers pas en 1975 en tant que gestionnaire de la chose publique, il a été pointé du doigt pour sa personnalité arrogante et égocentrique. Président du conseil communal de Marrakech, il s’est mis à dos sa propre famille politique. Des élus istiqlaliens ont fini par boycotter les réunions du conseil municipal de Marrakech. Par la suite, ils ont tout fait pour lui barrer la route lors des élections législatives d’octobre 1984. La descente aux enfers était alors scellée pour lui.
Mais il n’a jamais lâché prise. En 1998, au moment où Maître Youssoufi mettait en place le premier gouvernement d’Alternance, il avait usé de sa «maestria professionnelle» au barreau et donné la pleine mesure de ses capacités oratoires pour en découdre avec son propre parti et d’autres formations concernées par les tractations de cette époque? L’objectif: une ministrabilité imméritée qu’il n’a cessé de réclamer comme étant son droit le plus légitime.
Il a d'ailleurs usé du même stratagème face à un Abbas El Fassi, peu porté sur la confrontation, pour s’imposer au sein de l’équipe de Driss Jettou. Il en a été débarqué en 2004, pour lâcher son fiel contre tout le monde, à commencer par sa propre famille politique et surtout ses camarades au sein du Comité exécutif du parti.
Et pour mieux gêner cette même famille politique, il s'est fait l’avocat de personnes connues pour se maintenir sous les feux des projecteurs. Il a ainsi assuré la défense, en 2011, de Rachid Niny, alors directeur de publication du quotidien «Al Massae», condamné à un année de prison ferme, pour «dénonciation calomnieuse, outrage et atteinte à des décisions judiciaires et exercice de pressions sur des décisions de magistrats». Bien plus grave: huit ans plus tard, il prend la défense de Touafik Bouachrine, condamné à 12 ans de prison ferme pour «viols, tentatives de viol et traite d’êtres humains».
Moi, ou le déluge!Pour la petite histoire, M’hamed Khalifa ne rate aucune occasion pour faire parler de lui. Nos confrères de barlamane.com ont récemment révélé qu’il avait essayé à deux reprises de soudoyer le journaliste d’un mensuel, venu l’interviewer. Le journaliste a fini par en référer à sa hiérarchie qui, après vérification, a déprogrammé l’interview.
Eu égard à son passé, et surtout à la famille politique dont il est issu, M’hamed Khalifa avait été proposé pour le poste d’ambassadeur en Jordanie. Et il avait eu ce culot de refuser de représenter son pays auprès du royaume Hachémite. Dans son entourage, on chuchote qu’il ambitionnait d’occuper un poste plus «valorisant»: ambassadeur en Chine ou en Iran. Voire le poste de Haut commissaire aux Anciens combattants, alors même qu'il n’a, quant à lui, jamais mené un seul combat.
Et quand M’hamed Khalifa s’ennuie, il faut s’attendre à toutes les catastrophes. Pour semer la zizanie au sein de l’Istiqlal, il s'était permis d’ébruiter la quasi-totalité des délibérations du Comité exécutif au cours de l’année 2012, sa volonté ayant toujours été d’ériger le parti de Allal El Fassi en «entreprise familiale» en mettant en avant, à chaque occasion, le passé militant des caciques du PI pour étouffer la volonté de redressement prônée alors par les nouvelles compétences du parti, adeptes de la méritocratie.
Khalifa-Benkirane, le mélange explosifOpportuniste jusqu’au bout des ongles, M’hamed Khalifa s’est rapproché du PJD à la veille des élections législatives de novembre 2011, en suggérant au Comité exécutif d’instaurer une coordination avec le parti islamiste au vu de la convergence de leurs référentiels. Dans ce sens, M’hamed Khalifa a tenu à être reçu par Abdelilah Benkirane, pour lui exprimer son souhait de faire partie de son cabinet.
Faute d'un poste de ministre, il «utilisera» l’ex-chef du gouvernement pour d’autres objectifs, bien plus terre-à-terre.
Il avait sollicité son intervention au profit de son fils Yassir, suite à la résiliation d'un CDI le liant à Maroc Export, en vertu duquel ce dernier avait été nommé, en dérogation des statuts de cet office, au poste de conseiller pour un salaire de l’ordre de 12.000 dirhams. Pour régler ce problème, Abdelilah Benkirane était intervenu auprès de Zahra Maâfiri, directrice de Maroc Export et de l’ex-ministre des Finances, Nizar Baraka, et actuel chef de file de l’Istiqlal.
Écrasé par le poids des figures de proue de l’Istiqlal (M'hamed Boucetta, M'hamed Douiri, Boubker Kadiri, Mohamed Soussi, etc.), "Moulay" M’hamed se cherche toujours une gloire. Mais il est trop tard, bien trop tard. Tant dans son parti, comme à un quelconque poste de responsabilité.
PS. Alors qu'il était ministre, M’hamed Khalifa, par son arrogance, suscitait l’ire de tous ses collaborateurs. Au cabinet, il sortait des toilettes et intimait l’ordre à l’une de ses collaboratrices d’aller… tirer la chasse d’eau. Ce qui en dit long sur le personnage.