Tel un cancre dans une classe, le PJD répète infiniment les mêmes erreurs «stratégiques». Des erreurs qui, écrit le quotidien Assabah dans l’édito de son édition du week-end des 29 et 30 décembre, trahissent l’ambiguïté de son discours. Certaines fois, il profite des occasions et des mécanismes que lui offre la démocratie pour mieux se positionner, aussi bien au sein des institutions qu'à des postes à responsabilités à l’échelle locale et nationale. Dans d’autres cas, il adopte un discours plus implicite qui relève de la prédication.
C’est ce dernier discours qui refait subitement et spontanément surface à chaque fois que le parti se sent «en danger», relève l’éditorialiste d’Assabah. L’affaire de Hamieddine n’est, pour ainsi dire, pas la première fois que le parti et ses bonnes intentions sont mis à l’épreuve. Dans bien des cas précédemment, le PJD s’est montré beaucoup plus proche de la «jamaa» (le mouvement de prédication qu’il était) que d’un parti organisé selon un cadre juridique qui définit ses droits et ses obligations envers l’Etat, les institutions et la société.
Nous avons tous en mémoire, souligne l’éditorialiste, les positions, les communiqués, les actions et surtout le discours politique enfermé dans le carcan religieux du parti lors du débat national sur le Plan d’intégration de la femme. Le PJD, endossant les habits de la jamaa, avait alors divisé le pays en deux clans. L’un islamiste, dirigé par ce parti, ses membres et ses partisans qui «défendaient» la religion et ses prescriptions, et l’autre traité par le premier d'«irréligieux», prônant la destruction des valeurs et la laïcisation de la société. En réalité, souligne l’éditorialiste, le projet du Plan national pour l’intégration de la femme au développement défendait, dans son essence, les droits de la femme, l’égalité des sexes et la discrimination positive au bénéfice de celle-ci, sans aucun soubassement religieux.
Bref, note l’éditorialiste, le parti islamiste a failli mettre le pays à feu et à sang, si ce n’est l’intervention royale qui a nommé une commission nationale pour plancher sur le sujet, grâce à laquelle nous avons finalement pu avoir une Moudawana, adoptée par le Parlement en 2003, et qui, notons-le, a fait, et fait encore, la fierté de notre pays.
Entre cette date et aujourd’hui, le parti est resté sur ses gardes, prêt à rebondir à chaque fois qu’il estime que les «valeurs» religieuses du pays sont en danger. Ses positions sur les festivals et autres activités culturelles, sur les compétitions de «Miss» ou encore à chaque fois qu’il est question de libertés individuelles, en disent d’ailleurs long sur ce double discours.
C’est que, souligne l’éditorialiste, contrairement aux autres mouvements islamistes qui ont opté pour une stratégie claire, en agissant à l’intérieur des institutions ou via des mouvements populaires radicaux en vue de changer de régime politique, le PJD a opté pour une troisième alternative. A savoir danser sur deux cordes, selon le contexte et la conjoncture politique, mais aussi et surtout selon ses propres intérêts. C’est pour cela que du début des années 80, alors qu’il n'était encore composé que de groupuscule islamistes imprégnés de la pensée totalitaire de Sayed Qotb et Hassan El Banna, jusqu’à aujourd’hui, en passant par l’étape de la fondation en 1996, le parti ne s’est jamais départi de la pensée des Frères musulmans.
L’incident de Fès, mardi dernier, ne sort d’ailleurs pas de ce cadre, observe l’éditorialiste d’Assabah. Cela, en ajoutant que la mobilisation tous azimuts, la démonstration de force, les «nous n’allons pas vous rendre nos frères» ne sont, après tout, qu’une des manifestations de la pensée totalitaire de ceux qui se considèrent comme «seuls détenteurs» de la vérité.