Le ministère de l’Intérieur est passé à la vitesse supérieure dans sa volonté de mettre en œuvre le chantier de la régionalisation avancée. Les gouverneurs des provinces et des préfectures sont successivement convoqués à Rabat pour effectuer des stages de formation durant dix jours. Ils se relaient pour bénéficier d’un stage théorique dispensé par les responsables les plus expérimentés de l’administration centrale. Certains gouverneurs n’ont pas encore assimilé la portée des grands chantiers royaux, notamment celui de la charte de la décentralisation, et les moyens de les mettre en application. Selon des sources concordantes, ces séminaires sont dispensés aux plus grands responsables de l’Intérieur, conformément aux instructions royales. C’est ainsi que le département de tutelle a entamé la mise en œuvre de la charte de la décentralisation en convoquant tous les gouverneurs, ainsi que les secrétaires généraux des préfectures et des provinces. Ces derniers sont appelés à élaborer un programme global dans le but d’améliorer les services de proximité dans les secteurs vitaux tels l’eau, l’électricité, le transport urbain, l’urbanisme, la lutte contre l’habitat insalubre...
Le quotidien Assabah rapporte, dans son édition du mardi 19 mars, que les observateurs des affaires publiques se demandent si le ministère de l’Intérieur va réussir à concrétiser la vision royale de la décentralisation. Ils craignent qu’en cas d’échec «les walis et les gouverneurs ne continuent à accaparer l’argent de l’Etat et à monopoliser la passation des marchés publics». Ce faisant, ils empêchent les présidents des régions, des provinces et des communes d’exécuter les projets de manière effective sur le terrain, en fredonnant l’éternel refrain de l’instrumentalisation politique des élus. Les mêmes sources estiment que l’Intérieur doit affronter un véritable défi cette année. Ce département est censé démanteler l’architecture classique des hommes d’influence, tant au niveau central qu’à celui de la région. Une rupture avec le passé qui permettra aux élites locales de gérer directement les projets conformément à la gestion libre stipulée dans la charte 113/14. Autrement, les collectivités locales demeureront des outils entre les mains de certains walis et gouverneurs pour justifier leurs besoins et passer leurs marchés publics «préférés», sans réaliser le développement prôné par le roi Mohammed VI.
En attendant la suite des événements, certains walis et gouverneurs continuent à se cantonner à leurs bureaux, faisant fi des instructions du ministre de l’Intérieur. Ils rechignent, encore, à aller sur le terrain, à interagir avec les citoyens et à faire le suivi des chantiers. D’autres se sont contentés de faire des tournées d’exhibition pour visiter certains projets qui ont absorbé des milliards. Mais ils n’ont pas osé ouvrir une enquête administrative pour déterminer les dysfonctionnements, voire les fraudes qui ont entaché la réalisation de ces projets.