Le groupe du PJD a évoqué, de manière insidieuse, le sujet des libertés individuelles lors de la discussion du projet de loi de Finances à la Chambre des représentants dans le but de régler ses comptes à ses opposants. Le président du groupe islamiste, Mustapha Ibrahimi, a, lors de son exposé, déclaré que personne n’avait le droit de débattre de ce sujet qui, selon lui, relève du seul domaine législatif. Le député a essayé d’interpréter subtilement un extrait du discours royal, lors de l’ouverture de la session parlementaire du 11 octobre 2019, en le sortant de son contexte. Son objectif inavoué ou avoué étant de démontrer que le sujet des libertés individuelles demeure un domaine réservé aux législateurs et ne concerne aucunement la société civile. Pourtant, la Constitution garantit aux citoyens le droit de présenter des pétitions aux autorités publiques dans le cadre de la démocratie participative.
Le groupe parlementaire du PJD a profité de l’affaire de la journaliste Hajar Raissouni pour attaquer les acteurs des droits de l’Homme et la société civile. Le tort de ces derniers est d’avoir appelé à l’amendement du code pénal de façon à accompagner les mutations que connaît la société marocaine. Comble du paradoxe: l’intervention du PJD va dans le même sens, puisque son représentant a souligné que «le Maroc connaît des changements profonds qui n’échappent à personne. Il faut donc les exploiter pour améliorer les conditions socioéconomiques des citoyens».
Le quotidien Al Ahdath Al Maghribia rapporte, dans son édition du mercredi 30 octobre, que le chef du groupe parlementaire du PJD a loué «la décision royale de gracier la journaliste Hajar Raissouni et ses codétenus, car cette affaire a été émaillée de plusieurs violations dans l’application de la loi sans oublier les atteintes à l’éthique et au secret professionnel». Sauf qu’Ibrahimi a sciemment profité de cette parenthèse pour fustiger les associations des droits de l’Homme et la société civile en affirmant que «la décision royale a été un frein pour stopper les velléités de certaines parties qui ont essayé d’exploiter un cas humanitaire pour provoquer un débat sociétal lié aux libertés individuelles et à l’identité de la société marocaine». Du coup, le PJD renie aux citoyens leur droit de participer aux débats, alors même que la Constitution le garantit dans son article 15: «Les citoyennes et les citoyens disposent du droit de présenter des pétitions aux pouvoirs publics. Une loi organique détermine les conditions et les modalités d’exercice de ce droit».