Les récentes protestations qui ont éclaté dans plusieurs villes marocaines risquent de peser lourdement sur la rentrée parlementaire. Les revendications sociales autour de la santé et de l’éducation devraient s’imposer dans les priorités de l’exécutif et du législatif, quitte à retarder d’autres projets. À la veille de la présentation du projet de loi de finances 2026, le gouvernement semble bien décidé à donner à ce texte une «touche sociale», en réponse au mécontentement d’une jeunesse qui fait entendre sa voix, écrit le quotidien Al Ahdath Al Maghribia dans son édition du samedi 11 octobre.
Les discussions tenues en début de semaine entre les chefs de partis au pouvoir ont permis de convenir d’une série de mesures ciblant la santé et l’éducation. Ces deux secteurs devraient figurer au cœur des orientations du projet de loi de finances 2026, dont l’adoption par le Conseil des ministres est attendue avant son dépôt au Parlement à la mi-octobre, lit-on.
Il est question réviser la version initiale du budget pour y intégrer des crédits supplémentaires destinés à renforcer les services publics de base et les ressources humaines, écrit Al Ahdath. Les formations de la majorité préfèrent néanmoins temporiser, le temps d’évaluer les marges budgétaires disponibles pour concrétiser ces promesses.
Sur un autre front, les discussions politiques s’accélèrent autour des lois électorales à la suite des orientations données par le roi Mohammed VI dans son discours du Trône, appelant à finaliser le cadre des prochaines législatives avant la fin de l’année. Les consultations menées par le ministère de l’Intérieur avec les partis ont déjà commencé, même si la teneur des propositions soumises reste confidentielle. Si la réintroduction d’une liste nationale des jeunes paraît peu probable, le ministère de l’Intérieur envisagerait en revanche d’augmenter le nombre de femmes élues, afin qu’elles représentent près du tiers des membres de la Chambre des représentants.
Une mesure qui ne fait pas l’unanimité: plusieurs observateurs estiment que l’actuelle expérience des listes régionales féminines, réservant 90 sièges aux femmes, a perdu de sa crédibilité, ces dernières étant souvent désignées dans l’ombre des appareils partisans, lit-on.
L’approche d’une année électorale freine toute initiative politiquement coûteuse. Le gouvernement d’Aziz Akhannouch semble écarter les réformes sensibles, notamment celle des régimes de retraite, un dossier explosif rouvert récemment lors de réunions techniques avec les centrales syndicales. Si la ministre de l’Économie et des Finances, Nadia Fettah Alaoui, reconnaît la gravité de la situation financière des caisses de retraite, elle prône la concertation avant toute décision. «Le gouvernement travaille sérieusement, mais la réussite de cette réforme dépend de la volonté de tous les partenaires», a-t-elle affirmé, tout en prévenant que les fonds de pension ne couraient pas de risque immédiat avant 2030.
Autre dossier enlisé: la réforme du Code pénal, retirée du Parlement au début de la législature. Le ministre de la Justice, Abdellatif Ouahbi, souhaite la réintroduire avant la fin du mandat, après avoir réussi à faire adopter la réforme de la procédure pénale. Selon Al Ahdath, le texte est quasiment prêt, mais il reste suspendu à des arbitrages politiques, notamment autour de dispositions sensibles comme la criminalisation de l’enrichissement illicite, rejetée par la majorité actuelle.
Forte du succès du vote sur la loi encadrant le droit de grève, la ministre de l’Inclusion économique et de l’Emploi, Younes Sekkouri, s’attaque à un nouveau chantier: la révision du Code du travail, inchangé depuis vingt ans.
Le ministre a saisi les trois principales centrales syndicales (UMT, UGTM et CDT) pour recueillir leurs propositions sur les articles à modifier et les obstacles à l’application du texte actuel. Ces échanges devraient ouvrir la voie à une large concertation tripartite avec le patronat. Mais cette réforme risque de raviver les tensions avec certaines organisations syndicales, notamment l’UMT, qui a boycotté le vote de la loi sur le droit de grève. Sekkouri devra donc composer avec un dialogue social tendu, à un moment où le gouvernement cherche à afficher des résultats tangibles sur le front de l’emploi, lit-on encore.
Entre pressions sociales, calculs électoraux et chantiers institutionnels en attente, la rentrée politique s’annonce complexe. Le gouvernement Akhannouch devra arbitrer entre la réponse aux jeunes manifestants et la préservation des équilibres internes, dans un contexte où chaque geste peut être interprété comme une manœuvre préélectorale.








