L’alternance politique n’est pas un luxe. Ce n’est pas, non plus, un choix imposé par la conjoncture difficile du temps de feu Hassan II. A la fin des années 90, le défunt Roi avait demandé à feu Abderrahmane Youssoufi de former un gouvernement permettant au Royaume de traverser une période cruciale de son Histoire, rappelle le quotidien Assabah dans l’édito de son numéro du lundi 12 juillet. Nous ne sommes pas dans la même situation. N’empêche, d’après l’éditorialiste, que l’alternance reste un impératif politique dont la finalité est, aujourd’hui, de renforcer le choix démocratique.
En effet, poursuit l’éditorialiste, si les partis politiques ne pouvent se relayer au pouvoir, pourquoi donc le Maroc a-t-il si tôt décidé d’en finir avec le parti unique et d'opter pour le multipartisme et le pluralisme politique? Le Maroc a justement fait ce choix pour que chaque parti ait le droit de prétendre à l'accès au gouvernement et de mettre en application ses idées politiques, son projet de société et son programme électoral. C’est d'ailleurs le droit de tout un chacun, lequel droit est consacré par la Constitution.
Partout dans le monde, les partis sont là pour pouvoir gouverner. C’est même leur raison d’être. Aucune démocratie ne peut tenir si certains partis continuent, des années durant, à exercer le pouvoir alors que d'autres, tous les autres, se contentent de les regarder faire. La logique de la majorité arithmétique, sur laquelle repose le PJD pour asseoir sa légitimité et son maintien au pouvoir pour deux mandats, risque à tout moment de se retourner contre lui. C’est d’ailleurs ce qui a poussé certaines figures de proue de la formation islamiste à appeler leur parti à observer une pause. Afin de ne pas heurter la sensibilité des militants, ces dirigeants évoquent un «repos de guerrier». Bien sûr, rien à voir avec l’origine de cette expression française. Mais il s’agit bien, pour eux, de permettre à leur formation de reprendre son souffle.
Dans tous les cas, poursuit l’éditorialiste, légalement, personne ne peut priver le PJD d’un troisième mandat s’il arrive en tête des prochaines élections législatives du 8 septembre. Le jeu démocratique est ainsi fait. Mais ce qui est certain, c’est que cette formation sera incapable d’apporter un nouveau souffle, de nouvelles idées et de nouveaux profils à l’exercice du pouvoir en cette période cruciale de sortie de crise et de relance économique et sociale. C’est en cette période, entre 2021 et 2023, que le Royaume subira les véritables effets de la crise sanitaire. Et on ne peut pas compter sur le PJD, aujourd’hui épuisé, vidé et profondément affecté par l’usure du pouvoir, pour conduire cette étape.
L’expression dit qu’on ne se baigne jamais deux fois dans le même fleuve. Encore moins trois fois. Une entité politique, à moins d’évoluer dans un monde extraordinaire, ne pourra ainsi jamais maintenir au même rythme le cycle de production d'idées pendant dix ans, voire quinze ans. Or, que ce soit à court terme ou dans un horizon plus ou moins lointain, le Maroc a besoin d’une nouvelle génération d’idées, de nouvelles perspectives, de solutions innovantes et, pour utiliser un terme si cher aux dirigeants du PJD, de nouveaux «outputs».
Le Maroc a besoin de nouvelles idées, d’une nouvelle manière de voir apte à relever les défis courageusement fixés par le souverain. Lesquels enjeux visent à mettre le Royaume sur une nouvelle orbite, lui permettant d’évoluer avec constance et assurance dans un monde en constante évolution et en changement permanent. Dans un monde dans lequel il n’y a plus de place pour les Etats faibles. Il s’agit d’un enjeu externe qui consiste à multiplier, d'une part, les partenariats internationaux et, d'autre part, les partenariats internes qui se résument en la mise en œuvre du pacte national du nouveau modèle de développement. Il s’agit non seulement de sauver le pays des résultats d’une gestion passée des affaires publiques, mais également, et surtout, de rendre réelle ses ambitions de devenir un pays économiquement indépendant, socialement sain et producteur de valeur ajoutée, de richesses et de prospérité pour toute la société, dans le cadre d’une souveraineté nationale qui ne saurait être mise en cause.
Le rôle du citoyen dans tout cela, conclut l’éditorialiste, est central: il consiste à bien choisir ceux qui assumeront, demain, la responsabilité en son nom. La balle est, pour ainsi dire, dans le camp des citoyens. C’est à nous, électeurs, de choisir si nous voulons continuer sur le rythme actuel, avec les mêmes idées, les mêmes élites et les mêmes «compétences», avec une gestion des affaires publiques qui nous a menés là où nous sommes. Ou alors, opter pour d’autres choix. Après tout, notre pays n’a pas engendré qu’un seul parti. Au contraire, notre pays est riche en idées, en compétences et en profils capables de relever le défi. Il suffit que nous ayons le courage d’accepter le pluralisme politique et d'opter pour une alternance politique saine et salvatrice.