Nous révélions il y a deux jours que la présidence algérienne a fait une belle offre au youtubeur algérien Saïd Bensedira, exilé à Londres. Moyennant le financement de la création d’une chaîne de télévision en Europe, la présidence algérienne a demandé au youtubeur de faire du Royaume du Maroc la cible de prédilection de ses attaques et de devenir un relais de la propagande anti-marocaine. Le conseiller aux affaires juridiques et judiciaires à la présidence algérienne, Boualem Boualem, a dépêché un émissaire auprès de Bensedira pour lui faire part de l’offre du président Tebboune. Le blogueur algérien a accepté avec enthousiasme cette offre, et a orienté vers le Maroc, comme il le dit, la parabole qui était dirigée vers l’Algérie.
Qu’est-ce qu’il y a à retenir de la vidéo de 29 mn consacrée par Bensedira à l’information révélée par Le360? D’abord l’essentiel: l’intéressé admet avoir nourri depuis 2017 le projet de création d’une chaîne de télévision en Europe, que ce projet a été contrarié par Saïd Bouteflika, le frère de l’ancien président déchu, mais qu’il n’a pas abandonné l’idée de le concrétiser. Il avoue avoir le projet de créer une chaîne de télévision, établie à Londres avec un studio à Paris, et appelle le président Tebboune à l’aider à exaucer ce vœu, du moment que c’est «une chaîne patriote qui va défendre les intérêts de l’Algérie».
Voilà pour ce qu’il y a retenir de la logorrhée de M. Bensedira, qui confirme le deal révélé par Le360. Notons au passage que c’est la première fois que ce blogueur parle du projet de la création d’une chaîne de télévision.
Autre point important à retenir, c’est que dans sa logorrhée de 29 mn, Bensedira a soigneusement évité de répondre à une autre information révélée par Le360. L’émissaire qui l’a informé de l’offre présidentielle avait proposé à Saïd Bensedira de se déplacer à Alger pour finaliser le projet de création de cette fameuse chaîne de télévision. Contre toute attente, ce dernier a décliné l’invitation de se rendre à Alger et a proposé une rencontre à Paris, Londres ou Genève. Pourquoi Saïd Bensedira tient-il à proclamer son patriotisme en dehors des frontières de l’Algérie et refuse-t-il de se rendre dans son pays? De quoi a-t-il donc peur? L’ellipse qu’il a faite de ce sujet révèle, à elle seule, le drame de ce pays où même ceux qui avouent le défendre ont peur de s’y rendre. Quel autre pays dans le monde inspire si peu de confiance à ses citoyens?
Pour le reste, Bensedira a cherché à discréditer notre information en faisant une fixation sur l’identité de la personne qui a dépêché un émissaire à sa rencontre: le conseiller aux affaires juridiques et judiciaires à la présidence algérienne, Boualem Boualem. Cette révélation a dû faire très mal aux maîtres de Bensedira, parce qu’il a consacré beaucoup d’énergie à la récuser, mais sans convaincre. Il avoue nourrir une haine féroce contre Boualem Boualem et que, même si le président Tebboune finançait sa chaîne de télévision avec 100 millions de dollars en lui demandant de traiter avec ce conseiller, il allait refuser. A trop souligner le trait, M. Bensedira, on troue le voile, laissant davantage voir ce qu’il cachait...
Bien entendu, Boualem Boualem est un transfuge de l’ère Bouteflika. Mais ce conseiller très spécial a aujourd’hui l’oreille du président Tebboune et il est devenu son homme de confiance dans tous les dossiers stratégiques. Le fait qu’il ait été installé par Abdelaziz Bouteflika en 2016 président de l’Organe national de prévention et de lutte contre les infractions liées aux technologies de l’information et de la communication (Onplitic) en fait, bien au contraire, un homme tout indiqué pour suivre la création d’une chaîne de télévision. Bensedira, qui a retourné sa veste du jour au lendemain, en passant de piques sévères contre le régime algérien à un relais de sa propagande, ne va pas nous laisser croire qu’il est homme à camper sur ses positions ou à avoir des principes. En cherchant à disculper Boualem Boualem, il a juste réussi à nous confirmer l’importance que revêt ce personnage dans la gestion des dossiers confidentiels à la présidence algérienne.
Il existe autre chose qui prête à rire, et qui donne la preuve de l’indigence des sources de Bensedira. Il a cité à maintes reprises dans son podcast Abdellatif Hammouchi, patron du pôle DGST-DGSN. Et M. Bensedira, qui a des informations de première main, a façonné un nouveau CV à M. Hammouchi, en ajoutant à ses compétences celles d’un brillant journaliste qui est passé par la MAP. Une totale aberration, qui fera bien rire les journalistes marocains, qui ont appris grâce à Bensedira que Abdellatif Hammouchi aurait ainsi été un ancien confrère.