C'est sous les applaudissements et les cris de joie que la nouvelle a été accueillie dans la salle de contrôle du Jet Propulsion Laboratory de la Nasa.
"Nous pouvons maintenant dire que des humains ont fait voler un engin motorisé sur une autre planète!", s'est enthousiasmée MiMi Aung, cheffe de projet de l'hélicoptère.
Scientifiques et amateurs ont pu suivre en direct sur internet l'analyse des données par les ingénieurs de la Nasa, transmises à la Terre quelques heures après le vol lui-même.
Une courte vidéo du vol, prise par le rover Perseverance à bord duquel Ingenuity est arrivé sur la planète rouge avant de se décrocher, a été diffusée dans la foulée de l'annonce.
On y voit l'engin faire du surplace à environ trois mètres d'altitude puis se poser sur la surface de Mars.
L'hélicoptère a lui-même envoyé une photo en noir et blanc, montrant son ombre sur la planète rouge.
© Copyright : Library of Congress / NASA/JPL-CALTECH / AFP
Initialement prévu le 11 avril, le vol avait été retardé en raison d'un problème technique apparu lors du test de ses rotors.
L'opération était un véritable défi, car l'air martien est d'une densité équivalente à seulement 1% celle de l'atmosphère terrestre. Or c'est en poussant l'air en tournant que les hélices peuvent soulever du poids. Sur Mars, "il y a simplement moins de molécules à pousser", avait expliqué MiMi Aung avant le vol.
Même si la gravité y est moindre que sur Terre, les équipes de la Nasa ont dû développer un engin ultra-léger (1,8 kg), dont les pales tournent bien plus vite qu'un hélicoptère standard, pour réussir. Avec ses quatre pieds et deux pales superposées (1,2 m de long), il ressemble davantage à un gros drone.
L'opération est l'équivalent sur Mars du premier vol d'un engin motorisé sur Terre, en 1903, par les frères Wright. Un morceau de tissu de cet aéronef ayant décollé il y a plus d'un siècle en Caroline du Nord aux Etats-Unis a même été placé à bord d'Ingenuity.
Pour que ce premier vol soit "sans danger", selon les mots de Tim Canham, responsable des opérations de l'hélicoptère, l'engin s'est élevé à la verticale jusqu'à atteindre trois mètres de hauteur. Puis il a fait du surplace avant de redescendre.
Il avait reçu ses instructions de la Terre quelques heures auparavant mais a volé en autonomie, en analysant lui-même sa position par rapport au sol.
Le lendemain du vol, une fois ses batteries rechargées, l'hélicoptère doit transmettre une photo en couleur de l'horizon, prise par son autre appareil photo.
© Copyright : NASA/JPL-CALTECH/MSSS/ASU / AFP
Mais les images les plus spectaculaires devraient venir du rover Perseverance, placé en observation à plusieurs mètres de là, et qui doit filmer le vol.
La vidéo complète doit être transmise "durant les jours suivants", avait dit Elsa Jensen, responsable des caméras du rover. "Il y aura des surprises, et vous les apprendrez au même moment que nous. Alors sortons tous le pop-corn!"
La Nasa s'était préparée à quatre scénarios, selon MiMi Aung: un succès total, partiel, des données manquantes, ou un échec.
Maintenant que le premier vol a été un succès, le second pourra avoir lieu pas plus de quatre jours plus tard. Jusqu'à cinq vols en tout sont prévus, de difficulté croissante.
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La Nasa voudrait pouvoir faire monter l'hélicoptère jusqu'à 5 mètres de hauteur, puis tenter de le faire avancer latéralement.
"La durée de vie" d'Ingenuity sera "déterminée par la façon dont il atterrit" à chaque fois, a expliqué MiMi Aung. Ce qui veut dire: s'il réussit à éviter le crash.
"Quand nous arriverons au 4e et 5e vol, nous nous amuserons", a-t-elle promis. "Nous voulons vraiment pousser notre véhicule jusqu'à ses limites" et "prendre des risques".
Quoi qu'il advienne, après un mois maximum, l'expérience Ingenuity s'arrêtera, pour laisser le rover Perseverance se consacrer à sa tâche principale: chercher des traces de vie ancienne sur Mars.