Les manifestations pacifiques et de plus en plus massives contre le système n’y auront rien fait. Les (vrais) risques politiques, économiques et sociaux qu’encoure l’Algérie si la crise continue, non plus. Le général Ahmed Gaïd Salah, chef de l’armée algérienne et nouvel homme fort du pays, ne veut rien entendre. Rien savoir.
Dans un discours donné ce mardi 23 avril depuis la 1ère Région militaire, diffusé à toutes les unités via visioconférence, et comme pour continuer à effrayer ses compatriotes, il maintient mordicus la thèse du complot et de la conspiration dont la «stabilité» de l’Algérie serait victime. Les «complots», car il y en aurait plusieurs, dateraient de 2015, déjà. Mais contrairement à ses précédents discours, Gaïd Salah évite de citer son ennemi de toujours, le général Mohamed Mediène, dit Toufik, tout comme il s’abstient d’évoquer la main de l’étranger.
«Notre pays n'a cessé d'être la cible de complots abjects, pour le déstabiliser et mettre en péril sa sécurité…Nous avons pu recueillir des informations avérées faisant état d'un plan malveillant pour mener le pays à l'impasse, dont les prémices remontent à 2015, lorsque les trames et les visées du complot ont été révélées». On n’en saura pas plus, mais thèse du complot il y a.
Ces «bombes à retardement» ont été implantées par des «corrompus et corrupteurs dans les différents secteurs et structures vitales de l'Etat», déclare Gaïd Salah. Et de promettre: «ces secteurs seront assainis». Une façon de justifier la purge en cours en Algérie. Celle-ci n’épargne pas les proches du clan Bouteflika, comme la puissante famille Kouninef, propriétaire de l'important groupe KouGC, notamment spécialisé dans le génie civil, l'hydraulique et le BTP. Tous les frères Kouninef sont, à l'heure actuelle, auditionnés. Ni ses adversaires, comme le puissant homme d’affaires (et homme le plus riche du Maghreb), Issad Rebrab, patron de Cévital, premier groupe privé du pays. L'archimilliardaire est actuellement incarcéré.
Autre message principal de Gaïd Salah, la feuille de route devant mener à une présidentielle le 4 juillet prochain est maintenue, quoi qu’il arrive. Les Algériens ont beau être clairs dans leurs revendications, ils ne seront pas écoutés. Là encore, l’appui au processus de «transition», rejetée par la rue, est total. Le ton se fait même menaçant. «Nous avons constaté l'apparition de certaines voix qui ne veulent aucun bien à l'Algérie, appelant à l'entêtement et l'acharnement à maintenir les mêmes positions préétablies, sans tenir compte de tout ce qui a été réalisé, le rejet de toutes les initiatives et le boycott de toutes les démarches, y compris l'initiative de dialogue qui est censée être un des mécanismes civilisés qu'il y a lieu de valoriser, notamment dans ces circonstances particulières que vit notre pays», affirme Gaïd Salah. «Ces voix et ces positions obstinées œuvrent à entraîner le pays vers le piège du vide constitutionnel et le faire entrer dans la spirale de la violence et de l'anarchie», poursuit-il.
Le terrorisme intellectuel continue donc -et de plus belle. Et en Algérie, tout change…Pour qu'au final, rien ne change vraiment.