En septembre 2020, le SARS-CoV-2 a infecté plus de 25 millions de personnes dans le monde. Mais alors qu'une majorité de patients atteints de Covid-19 présentent des symptômes respiratoires, «une atteinte neurologique, y compris une altération de la conscience et des maux de tête, a été rapportée chez des patients» explique-t-on dans cette étude réalisée par une équipe internationale, dont des chercheurs du CNRS et de l’Inserm, et parue dans la revue Journal of Experimental Medicine, le 12 janvier 2021.
Sans compter qu’à ce jour, «des études d'autopsie humaine ont identifié des transcriptions d'ARN viral dans les tissus cérébraux (…) chez les personnes qui ont succombé au COVID-19», expliquent les scientifiques en préambule de leur étude, en précisant au passage que «plusieurs rapports ont été publiés indiquant une infection par le SARS-CoV-2 des cellules du système nerveux central (SNC)».
De quoi éveiller bien des inquiétudes et motiver la nécessité d’une étude plus approfondie de ces faits cliniquement observés.
Car aujourd’hui, le défi des scientifiques est avant tout de «comprendre toute l'étendue de l'invasion virale», une nécessité pour pourvoir «traiter les patients» comme il se doit, à l’heure où «nous commençons à essayer de comprendre les conséquences à long terme du COVID-19, dont beaucoup devraient avoir une possible implication du SNC», expliquent les auteurs de cette étude.
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Par ailleurs, au-delà du potentiel neuroinvasif du SARS-CoV-2, la question demeure pour les scientifiques de savoir si l'ACE2 (soit, selon le jargon médical, une enzyme de conversion de l'angiotensine, liée à la face externe des membranes plasmiques de cellules du poumon, des artères, du cœur, du rein et de l'appareil digestif) est la principale voie d'entrée du SARS-CoV-2 dans les cellules neuronales, et, surtout, de savoir quelles stratégies pourraient bloquer l'infection virale.
Une étude en trois tempsPour réaliser cette étude, trois approches indépendantes ont été adoptées pour sonder la capacité du SARS-CoV-2 à infecter le cerveau.
Premièrement, en utilisant des organoïdes (mini-cerveaux de synthèse) du cerveau humain, les chercheurs ont «observé des preuves claires d'infection accompagnées de changements métaboliques dans les neurones infectés et voisins», annonce l’étude.
Le SARS-CoV-2 peut donc infecter les neurones et si les cellules cérébrales infectées ne sont pas détruites, ce sont les cellules voisines qui finissent par mourir, par manque d’oxygène. Toutefois, les scientifiques ont pu prouver, dans les conclusions de leur étude, que «l'infection neuronale peut être évitée en bloquant ACE2 avec des anticorps ou en administrant du liquide céphalo-rachidien d'un patient COVID-19».
Deuxièmement, la neuroinvasion du SARS-CoV-2 in vivo a pu être démontrée sur des souris génétiquement modifiées. Il a ainsi été prouvé que si le virus utilise la protéine ACE 2 pour s’infiltrer, cette protéine peut être produite par les neurones.
Sans compter que la réalisation d’autopsies de patients décédés du COVID-19 a permis de détecter le SARS-CoV-2 dans les neurones corticaux.
«Ces résultats fournissent des preuves de la capacité neuroinvasive du SARS-CoV-2 et d'une conséquence inattendue de l'infection directe des neurones par le SARS-CoV-2», conclut l’étude, qui démontre clairement «que les neurones peuvent devenir une cible de l'infection par le SARS-CoV-2, avec des conséquences dévastatrices de l'ischémie localisée dans le cerveau et la mort cellulaire, mettant en évidence le neurotropisme du SARS-CoV-2 et guidant les approches rationnelles du traitement des patients atteints de troubles neuronaux».