Le président russe Vladimir Poutine, dont l’armée a repris depuis plusieurs mois l’initiative sur le front face à des forces ukrainiennes, a réclamé vendredi que Kiev renonce à rejoindre l’Otan et se retire des régions de Donetsk, Lougansk, Kherson et Zaporijjia que la Russie occupe déjà partiellement et prétend annexer en plus de la Crimée.
«Dès que Kiev (...) commencera le retrait effectif des troupes et notifiera l’abandon de son projet d’adhésion à l’Otan, nous donnerons immédiatement, à la minute même, l’ordre de cesser le feu et d’entamer des négociations», a dit M. Poutine face aux cadres du ministère russe des Affaires étrangères.
Remplir ces conditions constituerait de facto une reddition de l’Ukraine, dont l’objectif est de rétablir son intégrité territoriale et sa souveraineté dans les frontières internationalement reconnues. Le Kremlin avait proclamé dès septembre 2022 l’annexion de quatre régions de l’Est et du Sud de l’Ukraine, en plus de celle de la Crimée en 2014.
«Près de 700.000 soldats russes»
Vladimir Poutine a insisté vendredi sur le fait que l’Ukraine devait remettre à la Russie la totalité de ces territoires, alors même que Moscou ne les occupe que partiellement et que les combats y font toujours rage. Dans la soirée, il a en outre souligné à la télévision russe que 700.000 soldats russes participaient désormais à l’opération en Ukraine, soit près de 100.000 de plus de ce qu’il affirmait en décembre.
Le président russe a également qualifié de «stratagème pour détourner l’attention» des vraies responsabilités dans le conflit -selon lui celles de l’Ukraine et des Occidentaux- le sommet pour la paix prévu en Suisse les 15 et 16 juin à l’initiative de l’Ukraine. Kiev espère que les quelque 90 délégations présentes, malgré l’absence notamment de la Chine, y aboutiront à un consensus pour accroître la pression sur le Kremlin.
«Ces messages sont des messages d’ultimatum», a commenté de son côté le président ukrainien Volodymyr Zelensky dans un entretien à la chaîne d’information italienne SkyTG24 en marge d’un sommet du G7. Son conseiller Mykhaïlo Podoliak a martelé que les revendications russes constituaient «une offense au droit international» comme au «bon sens».
Le ministère ukrainien des Affaires étrangères a dénoncé des «déclarations manipulatrices», et estimé que Vladimir Poutine avait tenu ces propos à la veille du sommet en Suisse car «la Russie a peur d’une véritable paix».
Le secrétaire américain à la Défense Lloyd Austin, dont le pays est le principal soutien militaire et financier de Kiev, a jugé que M. Poutine «avait occupé illégalement le territoire souverain de l’Ukraine (et n’était) pas en position de dicter à l’Ukraine ce qu’elle doit faire pour parvenir à la paix». Le secrétaire général de l’Otan Jens Stoltenberg a de son côté estimé que le dirigeant russe n’agissait pas de «bonne foi».
En Italie, les membres du G7 (États-Unis, Allemagne, France, Italie, Royaume-Uni, Canada, Japon) ont promis vendredi de soutenir l’Ukraine «autant qu’il le faudra», selon un projet de déclaration commune dont l’AFP a pris connaissance.
«Vol» des actifs russes
Vladimir Poutine a aussi dénoncé la décision jeudi du G7 de garantir un prêt de 50 milliards de dollars à l’Ukraine avec les futurs intérêts des actifs russes gelés depuis le début de l’offensive russe. «Même si on enjolive les choses, le vol ça reste du vol et ça ne restera pas impuni», a-t-il dit.
Le président ukrainien Volodymyr Zelensky a réclamé la confiscation pure et simple des 300 milliards d’euros d’actifs de la banque centrale russe gelés par les Occidentaux depuis deux ans, ce à quoi ils se refusent pour des raisons juridiques.
Sur le terrain, les forces ukrainiennes continuent de résister aux multiples assauts, en particulier dans l’Est du pays, où Moscou grignote du terrain depuis le début de l’année. Enfin, l’Ukraine continue d’être contrainte de rationner l’électricité, son infrastructure énergétique ayant été ravagée par les frappes russes.