Tollé après l’interdiction par Israël de l’Unrwa, discussions sur les otages à Gaza

Une femme palestinienne passe devant un mur endommagé par des tirs et portant le logo de l'Agence de l'ONU pour les régugiés palestiniens (UNRWA), dans un camp de personnes déplacées à Rafah, dans le sud de la bande de Gaza, le 28 mai 2024. AFP or licensors

Le Parlement israélien a décidé d’interdire les activités en Israël de l’agence des Nations unies pour les réfugiés palestiniens (Unrwa), provoquant un tollé international, sur fond de négociations sur la libération des otages retenus à Gaza.

Le 29/10/2024 à 07h00

Plusieurs capitales européennes ont dénoncé cette interdiction, tout comme l’ONU et l’OMS (Organisation mondiale de la Santé), alors que l’Unrwa est le principal acteur des opérations humanitaires dans la bande de Gaza, assiégée et dévastée par plus d’un an de guerre entre Israël et le Hamas.

Israël, depuis longtemps très critique à l’égard de l’agence, a accusé des employés de l’Unrwa d’avoir participé au massacre perpétré sur son sol par le mouvement islamiste palestinien le 7 octobre 2023, qui a déclenché des représailles israéliennes particulièrement meurtrières.

Malgré l’opposition de son allié américain et la mise en garde du Conseil de sécurité de l’ONU, la Knesset a adopté à une écrasante majorité (92 voix contre 10) ce texte qui interdit «les activités de l’Unrwa sur le territoire israélien», y compris à Jérusalem-Est, secteur de la ville sainte occupé et annexé par Israël depuis 1967.

Un second texte, également largement adopté (89 voix contre 7), interdit par ailleurs aux responsables israéliens de travailler avec l’Unrwa et ses employés, ce qui devrait considérablement perturber les activités de l’agence, alors qu’Israël contrôle strictement toutes les entrées de cargaisons d’aide humanitaire vers Gaza.

Les deux lois prendront effet 90 jours après leur adoption, selon la Knesset.

«Colonne vertébrale»

«Il existe un lien profond entre l’organisation terroriste (Hamas) et l’Unrwa et Israël ne peut pas le tolérer», a martelé Yuli Edelstein, l’un des députés à l’origine du texte.

L’Unrwa, créée par l’Assemblée générale de l’ONU en 1949, gère notamment des centres de santé et des écoles à Gaza et en Cisjordanie. Fournissant abris, nourriture et soins de base, elle est considérée comme «la colonne vertébrale» de l’aide à Gaza, en proie à une catastrophe humanitaire.

Le chef de l’Unrwa, Philippe Lazzarini, a dénoncé une interdiction qui va «aggraver les souffrances des Palestiniens».

Le secrétaire général de l’ONU, Antonio Guterres, s’est dit «profondément préoccupé» par ces deux lois «qui, si elles étaient appliquées, empêcheraient probablement l’Unrwa de poursuivre son travail essentiel», avec «des conséquences dévastatrices». «Il n’y a pas d’alternative à l’Unrwa», a-t-il martelé en appelant Israël «à agir conformément aux obligations qui lui incombent en vertu de la Charte des Nations unies».

Le Premier ministre israélien, Benjamin Netanyahu, a affirmé qu’Israël était «prêt» à «travailler avec (ses) partenaires internationaux» pour continuer à «faciliter l’aide humanitaire à Gaza d’une façon qui ne menace pas (sa) sécurité».

Avant même le vote, les Etats-Unis s’étaient déclarés «très préoccupés» et «avaient exhorté le gouvernement à ne pas approuver» ce texte.

Le chef de l’Organisation mondiale de la santé (OMS), Tedros Adhanom Ghebreyesus, a dénoncé une décision «intolérable». Mêmes préoccupations et condamnations de Londres et Berlin, mais aussi de l’Irlande, de la Norvège, de la Slovénie et de l’Espagne, qui jugent «irremplaçable» le travail de l’Unrwa.

Côté palestinien, le Hamas a dénoncé une «agression sioniste», tandis que la présidence palestinienne a vu dans ces textes la confirmation de «la transformation d’Israël en un Etat fasciste».

«Arrêter cette guerre»

Dans ce contexte tendu marqué par la poursuite de sa guerre contre le Hamas à Gaza et le Hezbollah au Liban, Israël annoncé lundi avoir discuté avec les négociateurs étrangers réunis au Qatar d’un nouveau cadre pour des pourparlers sur la libération des otages retenus dans le territoire palestinien.

Le chef du Mossad, le renseignement extérieur israélien, David Barnea, a rencontré le chef de la CIA Bill Burns et le Premier ministre qatari pour discuter de ce «nouveau cadre», selon le bureau de M. Netanyahu, qui a précisé que les discussions «se poursuivront dans les prochains jours entre les médiateurs et le Hamas».

La veille, le président égyptien Abdel Fattah al-Sissi, dont le pays est l’un des médiateurs, avait proposé un cessez-le-feu de deux jours durant lequel quatre otages israéliens seraient échangés contre des Palestiniens emprisonnés par Israël.

Cette trêve serait suivie «sous dix jours» de négociations en vue d’un «cessez-le-feu complet et de l’entrée de l’aide humanitaire».

M. Netanyahu «n’a pas reçu» cette proposition: «si cette proposition avait été faite, le Premier ministre l’aurait immédiatement acceptée», a déclaré lundi soir son porte-parole.

«Nous devons arrêter cette guerre», a martelé le président américain Joe Biden lundi.

Alors qu’Israël a frappé samedi des cibles militaires en Iran, qui soutient et finance le Hamas et le Hezbollah, le ministre israélien de la Défense, Yoav Gallant, a affirmé que ces raids avaient «changé l’équilibre des forces, avec un «ennemi (...) affaibli».

L’Iran a menacé lundi Israël de conséquences «inimaginables» après ces frappes menées en riposte à des tirs de missiles iraniens le 1er octobre sur Israël.

Selon Benjamin Netanyahu, l’Iran cherche à fabriquer «des stocks de bombes nucléaires dans le but de détruire Israël».

Frappes sur le Liban

Au Liban, Israël a mené des nouveaux raids aériens, après avoir intensifié sa campagne de frappes depuis le 23 septembre puis lancer une offensive terrestre dans le sud du pays contre le Hezbollah.

Des raids sur la ville méditerranéenne de Tyr ont fait au moins sept morts et 17 blessés, selon les autorités libanaises, qui ont fait par ailleurs état de 60 morts dans des frappes sur plusieurs localités de l’est du pays.

Israël affirme vouloir neutraliser le Hezbollah dans le sud du Liban afin de permettre le retour dans le nord d’Israël de 60.000 habitants déplacés par les tirs de roquettes incessants depuis le début de la guerre à Gaza il y a plus d’un an.

Plus de 1.600 personnes ont été tuées depuis le 23 septembre au Liban, d’après un décompte de l’AFP basé sur des données officielles.

Selon l’armée israélienne, environ 115 «projectiles» ont été tirés lundi par le Hezbollah vers Israël.

«De la nourriture»

Dans la bande de Gaza, l’armée israélienne a annoncé avoir tué «des dizaines de terroristes» dans le camp de réfugiés palestiniens de Jabalia, un secteur du nord du territoire où elle mène depuis le 6 octobre une offensive en affirmant que des combattants du Hamas tentent de s’y regrouper.

L’offensive israélienne à Gaza a tué au moins 43.020 Palestiniens, en majorité des civils, selon les données du ministère de la Santé du gouvernement du Hamas, jugées fiables par l’ONU et provoqué le déplacement de la quasi-totalité des 2,4 millions d’habitants du territoire.

Walid Abou Shawish, un homme de 40 ans qui a fui le nord pour se réfugier à Khan Younès (sud), a raconté à l’AFP avoir «tout vendu pour acheter une tente» à sa famille de neuf personnes, et «tout dépensé pour avoir de la nourriture et de l’eau potable».

L’attaque du 7 octobre 2023 a entraîné la mort de 1.206 personnes, majoritairement des civils, selon un décompte de l’AFP basé sur les données officielles israéliennes, incluant les otages tués ou morts en captivité.

Par Le360 (avec AFP)
Le 29/10/2024 à 07h00