Royaume-Uni: la poussée de Reform, parti d’extrême droite qui séduit tous azimuts

Le leader du parti Reform UK, Nigel Farage, réagit à la fin de la deuxième et dernière journée du congrès de son parti, qui se tenait au NEC de Birmingham, dans le centre de l'Angleterre, le 6 septembre 2025. AFP or licensors

Joanne Woodhouse a rejoint le parti d’extrême droite britannique Reform il y a deux mois, après avoir voté travailliste pendant des années. Henry Godwin, lui, était conservateur. En séduisant des électeurs désenchantés de tous bords, la formation de Nigel Farage bouleverse aujourd’hui le paysage politique au Royaume-Uni.

Le 07/09/2025 à 07h30

«Le changement est encore possible!», «L’espoir est de retour»: au congrès de Reform UK, qui s’est tenu vendredi et samedi à Birmingham, dans le centre de l’Angleterre, des Britanniques semblaient avoir retrouvé foi en la politique.

Reform, qui a succédé au «Brexit Party», engrange de nouveaux soutiens alors que les travaillistes (centre gauche), au pouvoir depuis juillet 2024, s’enfoncent dans l’impopularité. Les conservateurs (droite), eux, peinent toujours à se relever de leur défaite historique l’an dernier.

Comme dans de nombreux autres pays européens, l’extrême droite progresse au Royaume-Uni, mais à un rythme soutenu. Parti nationaliste et anti-immigration, Reform est désormais en tête des sondages et creuse l’écart.

Kate Stevenson, 52 ans, est venue samedi au congrès vêtue d’une veste turquoise, la couleur du parti. Elle avait pris sa carte de membre deux jours plus tôt.

«Nous avons besoin de leadership», dit cette femme de Liverpool (nord), qui votait auparavant pour les Verts ou des partis indépendants.

«Nous voulons protéger notre culture», poursuit-elle, en critiquant ceux qui ne font pas d’efforts d’«intégration». «Ce n’est pas du racisme!» Parmi ses priorités figure aussi la liberté d’expression.

En 2016, elle avait pourtant voté contre le Brexit, le grand succès de Nigel Farage. «On ne peut pas être d’accord sur tout», concède-t-elle en souriant. Mais elle se dit aujourd’hui «dégoûtée» par les travaillistes et réclame du changement.

Selon Reform, le parti compte désormais plus de 240.000 membres, contre 80.000 il y a un an.

«Patriotes pessimistes»

«Nous constatons une grande désillusion, un manque de confiance généralisé, et les gens ont le sentiment que Reform est la seule alternative», résume James Johnson, fondateur de l’institut de sondage JLP, classé à droite.

Dans sa dernière enquête d’opinion, présentée au congrès, Reform obtient 32% des intentions de vote, soit 10 points de plus que les travaillistes. Aux législatives de juillet 2024, le parti de Nigel Farage avait récolté 14% des voix. Les prochaines élections générales sont prévues en 2029.

Joanne Woodhouse, décidée à s’investir davantage, ambitionne de se présenter aux prochaines élections locales, après avoir constaté les percées de Reform lors du scrutin municipal du printemps dernier.

À 57 ans, elle dit avoir été «totalement déçue» par les travaillistes. Elle raconte avoir été particulièrement choquée par la suppression d’une aide au chauffage pour les personnes âgées — depuis rétablie. «Les gens souffrent», souligne-t-elle. Pour elle, Reform «renforcera nos frontières» et «protégera nos traditions et nos valeurs».

Henry Godwin, 52 ans, s’est tourné vers Reform il y a un an, après la débâcle des conservateurs qu’il soutenait jusque-là. «Les conservateurs ont perdu le nord», estime-t-il. Il croit désormais en Reform: «Tout ce qu’ils défendent correspond à mes convictions: l’équité, le conservatisme et les valeurs familiales.»

Pour le think tank More in Common, «il est désormais difficile de cataloguer les électeurs de Reform». Leur base électorale s’étant élargie, ces électeurs ressemblent «de plus en plus au Britannique moyen».

C’est «un défi», souligne son directeur, Luke Tryl: Reform saura-t-il «trouver un équilibre entre les revendications radicales de certains partisans et celles, plus prudentes, de ses nouveaux convertis»?

Selon l’étude de James Johnson, près de la moitié des sympathisants de Reform UK restent des «patriotes pessimistes»: des Britanniques très négatifs sur l’évolution du pays, pour qui la lutte contre l’immigration reste la priorité absolue.

Un sujet qui demeure le cheval de bataille de Nigel Farage. Vendredi, au congrès, il a promis d’arrêter les bateaux de migrants dans la Manche «en deux semaines» s’il accédait au pouvoir. Une semaine plus tôt, il avait déjà juré d’expulser jusqu’à «600.000 migrants en cinq ans» s’il était élu.

Par Le360 (avec AFP)
Le 07/09/2025 à 07h30