Les choses bougent, et pas qu’un peu, depuis la récente victoire de Donald Trump aux élections présidentielles américaines.
Sur le dossier ukrainien, le président élu vient de nommer l’ancien général Keith Kellogg émissaire pour l’Ukraine et la Russie. Fidèle parmi les fidèles, ce dernier aura la tâche ardue et délicate d’obliger les deux belligérants à se mettre autour de la table des négociations, afin d’obtenir une paix, «par la force», selon l’expression de Trump. Une formulation certes lapidaire, mais que les détails semblent légèrement nuancer, puisqu’il sera question de repousser sine die le projet d’adhésion de l’Ukraine à l’Otan, condition sine qua non pour obtenir la participation du président russe Vladimir Poutine.
Côté ukrainien, il n’est désormais plus question de retourner aux frontières de 1991, puisque le ministre ukrainien des Affaires étrangères a récemment affirmé que l’Ukraine se contentera des frontières du 22 février 2022 comme point de départ, c’est-à-dire sans la Crimée et une partie importante du Donbass. Donc seules l’administration partante de Biden et la composante européenne de l’Otan semblent vouloir encore nourrir l’escalade de manière hystérique, au risque de mettre en danger la stabilité et la paix mondiale.
Du côté du Proche-Orient, le cessez-le-feu qui a débuté hier entre Israël et le Hezbollah pourrait être un prélude, espérons-le, à une cessation des hostilités côté israélien, autant à Gaza qu’au Liban, mettant ainsi fin aux attaques en cours dans la bande de Gaza.
Maintenant, qu’en est-il de notre région, le Maghreb? Là aussi, il y a du nouveau.
Selon certaines rumeurs, non encore confirmées, des pourparlers entre Rabat et Téhéran pourraient se tenir, ou se tiennent déjà officieusement, grâce à la médiation de l’Arabie saoudite. Si cela venait à se confirmer, la finalité de ces derniers serait de lever les barrières empêchant une reprise des relations diplomatiques entre les deux pays. Il s’agit là bien entendu du soutien apporté par l’Iran au Polisario. Si cela venait à aboutir, ce serait certainement une bonne nouvelle pour les deux pays et pour la stabilité dans la région.
D’autant plus que certains signes laissent à penser que nous nous dirigeons vers cette perspective, comme la récente rencontre entre les ministres des Affaires étrangères iranien et algérien au Portugal, durant la 10ème édition du Forum de l’Alliance mondiale des civilisations. En effet, selon un communiqué publié par la diplomatie iranienne, les deux ministres ont naturellement plaidé pour un renforcement des relations entre les deux pays, tout en parlant au passage du Proche-Orient. Mais l’éléphant dans la pièce était indiscutablement le Polisario et la question du Sahara, qui n’ont à aucun moment été mentionnés par le ministre iranien. Pourtant, l’occasion s’y prêtait parfaitement. Cela semble de bon augure, et indique peut-être un revirement de l’Iran sur cette question. Le temps nous le dira. Mais ce qui est sûr, c’est que si nous arrivons à rétablir les relations diplomatiques avec l’Iran tout en le coupant du Polisario, cela reviendra à isoler davantage le régime algérien dans son aventurisme.
«La géographie nous impose ses règles et, tôt ou tard, il faudra trouver une solution à cet antagonisme faux et artificiel avec l’Algérie, qui n’a que trop duré.»
Qu’en est-il justement de l’Algérie? Rien de nouveau sous le soleil, sinon toujours plus de provocations et d’hostilité, à l’image de la récente mascarade communicationnelle autour de la soi-disant indépendance du Rif, à laquelle ont participé des représentants de partis politiques de grandes puissances géopolitiques mondiales comme le Mozambique. Face à ce genre d’esbroufe, que je ne peux même pas qualifier de propagande, seul le sarcasme est de mise.
Quoiqu’il en soit, la géographie nous impose ses règles et, tôt ou tard, il faudra trouver une solution à cet antagonisme faux et artificiel qui n’a que trop duré. Surtout qu’avec les récentes percées diplomatiques du Maroc et la victoire de Trump, la marge de manœuvre de l’Algérie rétrécit comme une peau de chagrin, et un dialogue devra tôt ou tard être entamé.
L’initiative doit-elle venir de nous ou d’eux? Peu importe, ai-je envie de dire, pourvu que l’on puisse discuter en gens civilisés et trouver des compromis qui prennent en compte les intérêts des uns et des autres, sans faire perdre la face à aucune des parties prenantes. Il en va de notre potentiel de développement et de la stabilité politique de la région tout entière.
Récemment, notre ministre des Affaires étrangères, Nasser Bourita, a mis en garde contre les intentions bellicistes de l’Algérie, en évoquant le désir de l’Algérie de déclencher une guerre dans la région et une confrontation militaire avec le Maroc. Un message qu’il s’agit bien entendu d’acter et de prendre très au sérieux. Mais n’est-ce pas là aussi le bon timing pour tenter, de manière audacieuse, d’enclencher une nouvelle dynamique diplomatique, par exemple avec la médiation d’un pays comme la Chine ou la Russie? La perspective vaut la peine d’être explorée. D’autant que nous n’avons rien à perdre et tout à gagner. Quant à l’Algérie, son éventuel refus de ce genre d’initiative ne fera que confirmer ce que l’on sait déjà, c’est-à-dire sa volonté de maintenir en vie ce conflit pour des raisons de politique intérieure et de manque de légitimité du régime.
Mais je me force à croire que quelque chose de bon pourrait en ressortir, pour notre bien autant que pour celui de la région. Et n’est-ce pas quand tout va mal que l’on a le plus besoin de diplomatie? Comme disait, non sans ironie, le grand Sacha Guitry: «Les diplomates, ça ne se fâche pas, ça prend des notes.»