«Lueur d’espoir et d’humanité au milieu des ténèbres de la guerre», selon le secrétaire général de l’ONU Antonio Guterres, la prolongation de la trêve pour 48 heures, jusqu’à 05H00 GMT jeudi, doit permettre la libération de 20 otages du Hamas et de 60 prisonniers palestiniens supplémentaires, a indiqué le Qatar, principal médiateur dans les négociations.
Chaque jour depuis vendredi, le Hamas relâche une dizaine de femmes et d’enfants enlevés lors de son attaque sanglante du 7 octobre en Israël, contre la libération de trois fois plus de prisonniers palestiniens. Douze otages (dix Israéliennes et deux Thaïlandais) et trente prisonniers palestiniens ont ainsi encore été libérés mardi soir.
Selon les médias israéliens, le gouvernement d’Israël a reçu mardi la liste des otages que le Hamas doit libérer mercredi. Aucune confirmation officielle n’a toutefois été formulée.
L’accord de trêve, négocié avec l’appui également de l’Égypte et des États-Unis, a déjà permis la libération de 60 otages israéliens et de 180 Palestiniens écroués dans des prisons israéliennes. Vingt-et-un otages étrangers, en majorité des Thaïlandais vivant en Israël, ont été libérés hors du cadre de cet accord.
Les autorités israéliennes ont estimé à environ 240 le nombre de personnes enlevées et emmenées à Gaza le 7 octobre, lors de l’attaque sans précédent du mouvement islamiste palestinien qui a coûté la vie à quelque 1.200 personnes en Israël, en grande majorité des civils.
Seize jours à l’isolement
En représailles, Israël a promis d’«anéantir» le Hamas, qui a lancé son attaque depuis la bande de Gaza, assiégeant et bombardant sans relâche le territoire palestinien et lançant le 27 octobre une offensive terrestre.
D’après le gouvernement du Hamas, 14.854 personnes, dont 6.150 âgées de moins de 18 ans, ont été tuées dans les frappes israéliennes.
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Peu de témoignages directs ont jusqu’à présent filtré sur les conditions de vie des otages à Gaza. Mais la grand-mère d’Eitan Yahalomi, un enfant de 12 ans libéré lundi, a raconté que le garçon avait été détenu à l’isolement pendant 16 jours. «Les jours où il a été seul ont été horribles», a déclaré Esther Yaeli au site d’information israélien Walla. «Maintenant, Eitan semble très renfermé.»
M. Netanyahu a de nouveau promis mardi de «libérer tous les otages» du Hamas, classé organisation terroriste par les États-Unis, l’Union européenne et Israël.
«L’armée israélienne est prête à reprendre les combats. Nous profitons des jours de pause pour (...) renforcer notre préparation», a affirmé le chef d’état-major israélien, Herzi Halevi.
Du côté palestinien, des scènes de joie ont accueilli en Cisjordanie les prisonniers libérés par Israël. À Jérusalem-Est, occupée et annexée par Israël, Ahmed Salaima, ex-détenu palestinien de 14 ans, a retrouvé sa famille mardi soir, selon des images de l’AFP. Il s’agit du plus jeune prisonnier palestinien à avoir été libéré depuis l’entrée en vigueur de la trêve.
«Je ne remercierai jamais assez Dieu pour la libération de mon fils», s’est exclamé son père, Nayef Salaima, qui a expliqué avoir «perdu tout contact» avec lui lorsque la guerre a commencé.
Les médiateurs s’activent
En coulisses, les médiateurs s’activent pour prolonger la trêve au-delà de jeudi. Le secrétaire d’Etat américain Antony Blinken est attendu de nouveau en Israël et en Cisjordanie cette semaine.
«Notre objectif principal à l’heure actuelle, et notre espoir, est de parvenir à une trêve durable qui mènera à de nouvelles négociations et, finalement, à la fin de la guerre», a déclaré le porte-parole du ministère des Affaires étrangères du Qatar, Majed Al Ansari.
«Cependant, nous travaillons avec ce que nous avons. Et ce que nous avons, c’est qu’on peut prolonger (la trêve) d’un jour à chaque fois que le Hamas est en mesure de garantir la libération d’au moins dix otages», a-t-il expliqué.
Les chefs des services de renseignement américain et israélien se trouvaient mardi à Doha pour discuter avec le Premier ministre du Qatar de la «prochaine phase» d’un accord potentiel entre le Hamas et Israël, selon une source informée de la visite.
«Nous soutenons la prolongation de cette pause et des pauses futures, si nécessaire, afin de permettre l’augmentation de l’aide et de faciliter la libération de tous les otages», ont déclaré pour leur part les chefs de la diplomatie du G7 dans un communiqué conjoint.
La prolongation de la trêve à Gaza a permis l’entrée de nouveaux camions d’aide humanitaire dans la bande de Gaza, assiégée et bombardée sept semaines durant par l’armée israélienne.
Malgré l’arrivée depuis le 24 novembre de centaines de camions, la situation y reste «catastrophique», a jugé le Programme alimentaire mondial (PAM), estimant qu’«il existe un risque de famine».
Maladies contagieuses
«Nous n’avons ni eau, ni nourriture, ni farine depuis dix jours. La situation est dure, très dure», raconte à l’AFP Achraf Selim, un habitant de Gaza. «Nous vivons ici, mais en même temps nous ne sentons pas que nous vivons. Nous n’avons pas d’eau à boire, personne ne nous aide», poursuit-il.
L’Organisation mondiale de la santé (OMS) a dit avoir constaté une «augmentation massive» de certaines maladies contagieuses, notamment 45 fois plus de cas de diarrhée chez les jeunes enfants qu’habituellement, alors même que la plupart des hôpitaux de la bande de Gaza sont à l’arrêt.
Selon un responsable de la Maison Blanche, la quantité d’aide humanitaire arrivée par la route dans la bande de Gaza totalise désormais 2.000 camions de nourriture, de carburant, de médicaments et de matériel nécessaire au fonctionnement des infrastructures de dessalinisation de l’eau de mer.
«Nous avons atteint en un peu plus de quatre semaines une cadence soutenue de 240 camions par jour», a dit ce responsable. «Nous avons fait savoir très clairement que lorsque cette phase de libération des otages sera terminée, la cadence actuelle, ou idéalement des cadences supérieures, doit être maintenue», a-t-il ajouté.
Déjà soumis à un blocus israélien terrestre, maritime et aérien depuis 2007, le petit territoire surpeuplé a été placé le 9 octobre en état de siège total par Israël. En outre, quelque 1,7 de ses 2,4 millions d’habitants ont été déplacés par la guerre. Plus de la moitié des logements de la bande de Gaza ont été endommagés ou détruits, selon l’ONU.
Des milliers de Palestiniens, déplacés dans le sud de la bande de Gaza, ont profité de la trêve pour rentrer chez eux dans le nord, la région la plus dévastée, ignorant l’interdiction de l’armée israélienne qui y a pris le contrôle de plusieurs secteurs.
«J’essaie de retrouver des souvenirs de ma maison», raconte un Palestinien d’al-Zahra, en montrant les montagnes de décombres, là où se trouvait sa maison, détruite par des frappes israéliennes.
«Al-Zahra était la plus belle ville du monde et maintenant elle a disparu», dit Zein Ashour, une jeune femme qui habitait aussi ce quartier aujourd’hui rasé.