Organisée à la hâte après le décès du président ultraconservateur Ebrahim Raïssi dans un accident d’hélicoptère en mai, l’élection présidentielle s’est tenue dans un contexte de mécontentement populaire, face notamment à l’état de l’économie frappée depuis plusieurs années par des sanctions internationales.
À l’issue du second tour du vote le vendredi 5 juillet, lors duquel quelque 61 millions d’Iraniens étaient appelés aux urnes, le candidat réformateur Massoud Pezeshkian a recueilli plus de 16 millions de votes contre plus de 13 millions à son adversaire l’ultraconservateur Saïd Jalili, sur un total de 30 millions de bulletins déjà dépouillés, selon les autorités électorales. Après un premier tour marqué par une forte abstention, la participation s’est établie à 49,8%, et le nombre de bulletins nuls s’élèverait à plus de 600.000.
«Nous tendrons la main à tous les Iraniens, nous sommes tous des habitants de ce pays, nous devrions utiliser tout le monde pour le progrès du pays », a déclaré samedi M. Pezeshkian, lors de sa première prise de parole depuis sa victoire, en remerciant ses sympathisants. Tout en affirmant sa loyauté à la République islamique, celui que les Iraniens appellent le «docteur» appelle à des «relations constructives» avec Washington et les pays européens afin de «sortir l’Iran de son isolement».
Nul n’aurait parié sur ce député de Tabriz, la grande ville du Nord-ouest de l’Iran, lorsque sa candidature a été acceptée par le Conseil des gardiens avec cinq autres candidats, tous conservateurs. Ce père de famille, qui a élevé seul trois enfants après la mort de son épouse et d’un autre enfant dans un accident de voiture en 1993, se présente comme la «voix des sans-voix».
Arrivé en tête au premier tour, Massoud Pezeshkian plaide pour un Iran plus ouvert à l’Occident. Il a reçu le soutien des anciens présidents, le réformiste Mohammad Khatami et le modéré Hassan Rohani.
Dans un bureau de vote de Téhéran, Hossein, 40 ans, confiait vendredi avoir choisi M. Pezeshkian, car il «peut changer des choses». Farzad, 52 ans, a fait le même choix, pour «empêcher l’accès au pouvoir des radicaux» ultraconservateurs.
Pouvoirs restreints
M. Pezeshkian appelle à régler la question du port obligatoire du voile pour les femmes, l’une des causes du vaste mouvement de contestation ayant secoué le pays fin 2022 après le décès de Mahsa Amini, arrêtée pour non-respect du code vestimentaire strict.
Lors de deux débats télévisés, les candidats ont abordé les difficultés économiques du pays, ses relations internationales, le faible taux de participation aux élections et les restrictions imposées à Internet par le gouvernement.
Négociateur dans le dossier nucléaire entre 2007 et 2013, Saïd Jalili s’était fermement opposé à l’accord conclu finalement en 2015 entre l’Iran et des puissances mondiales, dont les États- Unis, qui imposait des restrictions à l’activité nucléaire iranienne en échange d’un allègement des sanctions. Les négociations sur le nucléaire sont actuellement dans l’impasse après le retrait unilatéral des États-Unis en 2018 qui ont réimposé de sévères sanctions économiques à Téhéran.
L’élection devrait avoir des répercussions limitées, le président n’ayant que des pouvoirs restreints: il est chargé d’appliquer, à la tête du gouvernement, les grandes lignes politiques fixées par le guide suprême, l’ayatollah Ali Khamenei, qui est le chef de l’État.