La pression internationale s’intensifie ce mardi pour un accord de trêve entre Israël et le Hamas, malgré les menaces persistantes d’une offensive israélienne sur Rafah, dernier refuge pour près d’un million et demi de Palestiniens de la bande de Gaza, où l’armée israélienne a poursuivi ses bombardements ce matin.
Richard Burns, directeur de la CIA, l’agence centrale de renseignement américaine, est attendu ce mardi au Caire pour de nouveaux pourparlers, sous médiation du Qatar, portant notamment sur l’échange d’otages israéliens détenus par le mouvement palestinien, selon des sources proches du dossier.
Le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu a récemment ordonné à son armée de préparer une offensive sur Rafah, où sont massés 1,4 million de Palestiniens selon l’ONU, la plupart ayant fui les bombardements israéliens et la guerre qui fait rage depuis quatre mois.
Les États-Unis, principal allié d’Israël, insistent sur leur opposition à une opération à grande échelle sans solution pour les civils coincés à la frontière fermée avec l’Égypte à l’extrême sud du territoire. Le président américain Joe Biden a réclamé, de la part des forces israéliennes, un plan «crédible» pour épargner la population palestinienne, en préalable à toute offensive, lors d’une rencontre lundi à la Maison Blanche avec le roi de Jordanie Abdallah II.
Le monarque, dont le pays est le deuxième État arabe à avoir signé un traité de paix avec Israël, en 1994, est allé plus loin. «Nous ne pouvons pas nous permettre une attaque israélienne sur Rafah», où la situation humanitaire est déjà «insupportable», a dit Abdallah II, qui a appelé à «un cessez- le-feu durable immédiatement» dans la bande de Gaza.
«Les États-Unis travaillent à un accord de libération des otages entre Israël et le Hamas, qui amènerait immédiatement une période de calme d’au moins six semaines à Gaza», a pour sa part indiqué le président américain, dont l’administration rejette toujours une trêve inconditionnelle et à durée indéterminée. Cette période pourrait déboucher sur «quelque chose de plus durable», a-t-il ajouté.
L’attaque du Hamas le 7 octobre 2023 sur le sol israélien a entraîné la mort de plus de 1.160 personnes, en majorité des civils, selon un décompte de l’AFP à partir de données officielles israéliennes.
En représailles, Israël pilonne sans relâche le petit territoire palestinien, qu’il maintient sous blocus depuis 17 ans et sous un siège total depuis le début de la guerre. Les bombardements et les opération terrestres de l’armée israélienne ont tué près de 28.340 Palestiniens, en grande majorité des femmes, des enfants et des adolescents, et fait plus de 70.000 blessés, selon le dernier bilan du ministère de la Santé du Hamas.
En Cisjordanie, territoire palestinien occupé par Israël depuis 1967 et où le Hamas n’est pas représenté, plus de 400 Palestiniens ont été tués par les soldats et les colons israéliens depuis le 7 octobre, et des centaines de personnes ont été «arrêtées» par les forces israéliennes.
Face aux craintes internationales d’une offensive militaire majeure, M. Netanyahu a affirmé dimanche qu’Israël ouvrirait à la population «un passage sécurisé» pour quitter Rafah, sans préciser vers quelle destination. «Ils vont évacuer» les Palestiniens. «Où ? Sur la Lune?», s’est interrogé à Bruxelles le chef de la diplomatie européenne Josep Borrell.
L’ONU ne s’associera pas à «un déplacement forcé de population» à Rafah, a pour sa part prévenu le porte-parole du secrétaire général de l’organisation. La perspective d’une offensive est «terrifiante», s’est alarmé de son côté le Haut-Commissaire de l’ONU aux droits de l’Homme, Volker Türk, tandis que le procureur de la Cour pénale internationale (CPI) Karim Khan s’est dit «profondément inquiet» du sort des civils.
La Chine a appelé Israël à arrêter «au plus vite» son opération militaire à Rafah, dans le sud de la bande de Gaza, afin «d’empêcher une catastrophe humanitaire plus grave encore». «La Chine (…) s’oppose et condamne les actions qui portent atteinte aux civils et violent le droit international», a indiqué un porte-parole du ministère chinois des Affaires étrangères dans un communiqué.
Le président turc Recep Tayyip Erdogan, un des dirigeants les plus critiques d’Israël depuis le début de son opération à Gaza, était par ailleurs attendu mardi à Dubai et mercredi au Caire.
Le Hamas a prévenu dimanche qu’une offensive sur Rafah «torpillerait» tout possible accord sur les otages. Le département d’État américain a fait miroiter les bénéfices «énormes» d’un tel accord, à la fois en termes de libérations d’otages, mais aussi d’accès de l’aide humanitaire à Gaza.
Environ 1,7 million de personnes, d’après l’ONU, sur un total de 2,4 millions d’habitants, ont fui leurs foyers depuis le 7 octobre dans le territoire palestinien dévasté, assiégé par Israël et plongé dans une crise humanitaire majeure, sans approvisionnement en eau, en nourriture, en médicaments, en électricité et en carburant. Une majorité d’entre eux ont été déplacées plusieurs fois, fuyant toujours plus vers le sud à mesure que les opérations militaires israéliennes s’étendaient.
Rafah, devenue un gigantesque campement, est le principal point d’entrée de l’aide humanitaire, largement insuffisante pour répondre aux besoins de la population qui vit dans des «conditions proches de la famine», selon le Programme alimentaire mondial (PAM).