Mohamed Abrini a été remis lundi aux autorités françaises, pour la journée, a annoncé le parquet fédéral de Belgique.
Arrivé escorté par les gendarmes d'élite au palais de justice de Paris, le suspect de 32 ans a été immédiatement mis en examen (inculpé), notamment pour son rôle présumé de logisticien dans les attentats de Paris et du Stade de France près de la capitale, qui ont fait 130 morts en novembre 2015.Ce transfert, de courte durée, s'inscrit dans le cadre d'un accord de coopération judiciaire entre la France et la Belgique.
A l'issue de sa mise en examen, Mohamed Abrini devait regagner la Belgique où il est inculpé et incarcéré pour sa participation présumée à ces attaques jihadistes à Paris, les plus meurtrières jamais commises en France, mais aussi dans l'enquête belge sur les attentats qui ont fait 32 morts le 22 mars à l'aéroport et dans le métro de Bruxelles.
Celui qui était présenté comme "l'homme au chapeau" et aux fausses lunettes poussant un chariot dans l'aéroport de Zaventem peu avant le drame est aussi considéré par les enquêteurs français comme un suspect-clé des attentats du 13-Novembre.
Les juges antiterroristes parisiens avaient délivré à son encontre un mandat d'arrêt dès le 24 novembre 2015. Après son arrestation le 9 avril à Bruxelles, les autorités belges avaient précisé qu'elles ne le remettraient pas dans l'immédiat à la justice française afin de faire progresser l'enquête en Belgique.
Face aux enquêteurs, il avait reconnu être "l'homme au chapeau" accompagnant deux kamikazes à l'aéroport le 22 mars, tandis qu'un troisième jihadiste se faisait exploser dans le métro, dans des attentats orchestrés à la hâte par la même cellule jihadiste franco-belge du groupe Etat islamique (EI) qui avait visé la capitale française.
Surnommé "brioche", Abrini, ancien employé en boulangerie, était alors en cavale depuis les attentats parisiens. Les enquêteurs l'avaient très vite identifié, au côté d'un autre fugitif et suspect-clé du 13-Novembre, Salah Abdeslam, seul membre encore vivant des commandos parisiens.
Il apparaissait sur les images de vidéosurveillance d'une station-service de la région parisienne, le 11 novembre au soir, en compagnie d'Abdeslam et à bord de la Clio noire louée par ce dernier, qui servira deux jours plus tard à convoyer trois kamikazes au Stade de France.
Jusqu'ici, face aux enquêteurs, Mohamed Abrini, originaire de la commune bruxelloise de Molenbeek comme d'autres membres de la cellule jihadiste, a livré quelques explications, contrairement à Salah Abdeslam, qui s'est muré dans le silence.
Entendu le 13 mai en Belgique, il a reconnu avoir fréquenté plusieurs planques utilisées par la cellule. Les enquêteurs avaient retrouvé une photo de lui en armes avec l'étendard noir du groupe Etat islamique.
Interrogé sur son adhésion aux thèses du groupe jihadiste, Abrini s'est montré ambivalent: il s'est dit "prêt" à "prendre les armes" pour "la défense des faibles", tout en affirmant être en désaccord avec des attentats "sur les populations".
Il avait expliqué s'être radicalisé après la mort de son frère, Soulaimane, décédé après avoir rejoint l'EI en Syrie. Mohamed Abrini s'y était rendu à son tour à l'été 2015, pour un court séjour mais il a dit aux enquêteurs n'avoir "reçu aucune mission en rapport avec l'EI".
Après son inculpation, ses avocats ont déploré qu'Abrini soit poursuivi à la fois en France et en Belgique pour les attentats de Paris. "Des Etats de droit, en l'occurrence la France et la Belgique, peuvent-ils juger un justiciable deux fois pour les mêmes faits?", se sont interrogés Emmanuel Pierrat et Stanislas Eskenazi.