"Nos enfants à l'école ressentent déjà la haine contre l'islam", déplore auprès de l'AFP ce dissident sexagénaire ayant peur des amalgames, après l'attaque terroriste ayant coûté la vie à quatre personnes.
En Autriche, 8% de la population se réclame de la religion musulmane, ce qui constitue l'un des taux les plus élevés de l'Union européenne. Avant même cette attaque islamiste, le nombre d'incidents racistes à l'encontre des musulmans avait bondi, de 309 en 2017 à 1.051 en 2019.
Lors de son passage au pouvoir aux côtés du chancelier conservateur Sebastian Kurz, entre décembre 2017 et mai 2019, l'extrême droite (FPÖ) a multiplié les prises de paroles hostiles envers la sécularisation de la seconde religion de ce pays au catholicisme en déclin.
L'ancien vice-chancelier Heinz-Christian Strache, proche des néonazis dans sa jeunesse, avait affirmé en 2019 que dans les jardins d'enfants musulmans, on "formait des martyrs en prêchant la haine".
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Dans sa communication, le FPÖ, qui a quitté le pouvoir suite à un scandale de corruption, présente systématiquement les musulmans comme des femmes en burqa ou en niqab, alors qu'une infime minorité des croyants se revendiquent d'une appartenance à l'islam rigoriste.
Selon une étude publiée l'année dernière, la moitié des Autrichiens ont une mauvaise image des musulmans et l'émergence de la mouvance identitaire depuis 2012 en Europe est particulièrement forte, dans ce pays de 8,9 millions d'habitants.
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Pourtant à Vienne, les musulmans se démarquent du tueur austro-macédonien de 20 ans qui avaient tenté de rejoindre la Syrie en 2018 pour rallier les rangs des combattants de Daech.
Vendredi, 350 mosquées avaient appelé à l'organisation d'une prière en hommage aux victimes de l'attentat.
"Cet homme ne comprenait pas notre religion, mais j'ai bien peur que cela rejaillisse négativement sur nous", confiait Ahmed (qui n'a pas voulu donner son nom de famille), rencontré à la sortie de la plus grande mosquée de la ville.
"Pour moi, la terreur n'est d'aucune religion", balaie Aminat Iskhanova, 17 ans, la fille du réfugié tchétchène. "Quelles que soient les croyances, rien n'autorise à tuer des gens", affirme cette adolescente apatride arrivée du Caucase au début des années 2000.
Au contraire, "l'islam dit que nous devons aider les autres", renchérit Khalid Abou El Hosna, "très fier" que son fils se soit porté au secours d'un policier le soir de la fusillade.
Osama l'a aidé au péril de sa vie et fait face au meurtrier fanatique, en tentant de le raisonner.
"Je me suis dit que non, je n'allais pas m'enfuir parce que ce policier s'est mis en danger pour nous", explique le jeune homme de 23 ans originaire de la bande de Gaza.
Il est aujourd'hui salué pour son acte de bravoure. Sa vie n'a pourtant pas toujours été facile en Autriche, où il avait fait la Une des journaux avec sa famille, victime d'une discrimination flagrante.
Son père voulait acheter une grande maison dans un petit village situé à une heure de la capitale, or le maire s'y est opposé en pointant des "différences culturelles" susceptibles de mettre à mal la relative tranquillité du coin.
Une bataille judiciaire avait été enclenchée. Khalid Abou El Hosna a gagné. Mais il n'a finalement plus quitté Vienne, de peur de vivre dans une commune qui "ne voulait pas de nous".
S'il avait déménagé à la campagne, son fils n'aurait peut-être pas été là lundi, pour stopper l'hémorragie de l'agent en intervention, désormais hors de danger, relève son père.