Nouvelle taxe pour subventionner 2M: le vrai du faux

Le siège de 2M à Ain Sebaa.

Le siège de 2M à Ain Sebaa. . DR

C'est de notoriété publique: la chaîne 2M traverse une des plus graves crises financières de son existence. Est-ce assez pour légitimer une nouvelle taxe afin d'éponger son déficit? Le public est paniqué, mais qu'en est-il réellement? Rien. Explications.

Le 18/12/2019 à 08h00

2M est plongée dans une grave crise financière et cela, tout le monde le sait. Entre modèle semi-payant, notamment en direction des Marocains résidant à l'étranger et introduction d'une taxe au Maroc (encore une!), les scénarii de sauvetage, sur le dos du contribuable, vont bon train. Mais aucun ne semble pour l'heure plausible, encore moins populaire.

La chaîne se cherche toujours un nouveau modèle économique pour sortir la tête de l’eau. Mais ayant déjà à supporter la fameuse Taxe pour la promotion du paysage audiovisuel, présente sur les factures de consommation d'électricité et qui refait actuellement polémique, l'opinion publique est unanime: niet à toute nouvelle taxation en l'état actuel des choses.

Pour rappel: la TPPAN est une taxe qui s’applique depuis les années 1996-1997 à l’échelle nationale, à laquelle sont assujettis tous les "grands" consommateurs d'électricité, que ce soit à usage domestique ou industriel.

Cette taxe, indexée sur le montant de la facture, est plafonnée à 100 dirhams par mois. Les clients dont la consommation mensuelle est inférieure ou égale à 200 kilowattheures (kWh) en sont exonérés depuis 2012.

Directement prélevée par les collecteurs (ONE, Régies ou gestionnaires délégués), la TPPAN est reversée au Fonds de développement de l’audiovisuel, qui avait été placé sous la tutelle du désormais ex-ministère de la Communication, le département n'existant plus depuis le remaniement gouvernemental du 9 octobre dernier. 

Quoi de neuf à l'horizon alors? "Aucune nouvelle disposition n’a été faite à notre niveau concernant la TPPAN. Tout se fait naturellement comme c'est le cas depuis des années", indique cette source à la Lydec, le gestionnaire délégué de distribution d'eau et d'électricité de Casablanca. 

L'affolement ambiant de ces derniers temps n'est donc qu'un pur buzz, ou alors la prise de conscience de l'existence d'une taxe en fait instaurée depuis longtemps.

Mieux encore, il n'y a plus aucun rapport entre cette taxe pour la promotion de l’audiovisuel qui figure sur nos factures, et la deuxième chaîne publique. "2M ne reçoit plus aucune aide étatique depuis des années", souligne un responsable de la chaîne.

Soread 2M a effectivement cessé de profiter des recettes de la TPPAN depuis 2016. La chaîne connaît, depuis, de grandes difficultés, qui se sont traduites notamment par la fermeture de son bureau à Tanger, pour le non paiement du loyer, ainsi que la saisie d’une partie du matériel de sa station radio, Radio 2M. 

En réalité, 90% du budget de 2M repose sur les recettes publicitaires, qui ont connu une forte baisse ces dernières années, d’où l'aggravation des difficultés financières qui touchent le groupe.

Et pendant ce temps, "c’est 2M qui donne à l’Etat", rectifie, pour sa part, ce responsable travaillant au sein de la chaîne. Et d'affirmer que la Soread verse 5% de son chiffre d'affaires à l’Etat pour... Subventionner les autres départements du pôle médiatique public.

Pour l'heure, on en est encore au diagnostic. La situation difficile que traverse Soread 2M a été largement abordée par le porte-parole du gouvernement, Hassan Abyaba, également ministre de la Culture et de la jeunesse. C'était lors d’une conférence de presse, le 28 novembre dernier, à Rabat, à l'issue du conseil de gouvernement.

Le ministre a assuré que l'Etat, actionnaire de ce groupe médiatique, s'engageait à résoudre cette crise dans les plus brefs délais. Pour cela, un nouveau contrat-programme devient une urgence. Une révision du modèle économique de 2M aussi. Et celui-ci doit reposer sur autre chose que le passage, actuellent présenté sous forme de ballon d'essai, par la poche d'un contribuable, de toute façon définitivement désabusé par une offre audiovisuelle largement en deçà de ses attentes.

Par Lamiae Belhaj Soulami
Le 18/12/2019 à 08h00