Comme l’on pouvait s’y attendre, l’officialisation, hier vendredi 19 juin, à Rabat, de l’ouverture, à l’horizon 2019, d’une usine de Peugeot-Citroën dans la zone off-shore de Kénitra, a provoqué un tollé général en Algérie. Les principaux titres de la presse algérienne, écrite et digitale comprises, ont réservé leurs grosses manchettes à cet événement. En ligne de mire, et le président Hollande et le constructeur Peugeot qui, «anticipant une réaction négative de l’Algérie à l’annonce du projet marocain dans un contexte où la marque au lion est soupçonnée d’évasion fiscale et de transferts illicites de devises, ont dévoilé un projet industriel sur le sol algérien. Une annonce qui semble destinée à calmer les Algériens», croit savoir le journal Tout sur l’Algérie.
Vous l’auriez compris, cette annonce n’était pas pour «calmer les Algériens», pas plus d’ailleurs que le «TSA» qui se fait l’écho d’une grosse frustration algérienne. « Au mieux, en Algérie, Peugeot pourrait implanter un projet similaire à celui de Renault : une unité de montage, avec un très faible taux d’intégration, destinée au marché local», relève le journal.
L’Algérie, une aire de stationnement à ciel ouvert !
Le quotidien Liberté, lui, a trouvé dans l’implantation de Peugeot-Citroën au Maroc un prétexte pour épingler l’échec retentissant de la politique industrielle algérienne. «Malgré une conjoncture qualifiée de difficile par la presse marocaine, Peugeot-Citroën a choisi d’implanter un mégaprojet chez nos voisins qui ont investi plus de 10 milliards de dirhams dans l’automobile et l’aéronautique pour attirer les investisseurs», relève « Liberté », en soulevant un « festival » d’interrogations : « le gouvernement algérien a-t-il tiré les leçons avec le projet Renault qui, après avoir soulevé un tollé général a fini par se concrétiser ? L’Etat algérien a-t-il une stratégie et une politique industrielle à mener avec ses partenaires pour négocier de manière aussi gauche la teneur de ces importants projets ? Même si, pour le moment, Peugeot-Citroën fabriquera, au Maroc, trois modèles de véhicules, à savoir les C1 et C-Elysée, il n’en demeure pas moins que l’Algérie reste à la traîne devant plusieurs pays où l’industrie automobile est florissante».
«En attendant les révélations sur le projet de Peugeot chez nous, l’Algérie est une aire de stationnement à ciel ouvert», ironise «Liberté», en paraphrasant le ministre algérien du Commerce, Amara Benuounès.
Peugeot en Algérie, c’est du pipeau !
Le360 Algérie, pour sa part, commente l’annonce du projet « Peugeot en Algérie » sur le ton du sarcasme. «Ou bien l’usine Peugeot en Algérie, c’est du pipeau, ou au mieux, elle sera à l’image de Renault à Oran qui produit uniquement des Symbols destinées au marché local, payables avec des crédits à la consommation. D’ailleurs, les Algériens boudent cette Symbol made in chez nous, si bien que le gouvernement a obligé les administrations publiques à l’acheter », ironise Le360 Algérie, en dénonçant ce qu’il appelle «la politique de deux poids deux mesures de la France entre l’Algérie et le voisin de l’Ouest et néanmoins rival». Politique qui sonne comme « un doigt d’honneur aux généreux discours sur le partenariat d’exception entre l’Algérie et la France, que les responsables français en visite en Algérie ressassent comme une récitation apprise par cœur, mais sans conviction».
Peugeot au Maroc, ce qui va changer
Plus sobre, est le quotidien « Le Matin DZ» qui a plutôt révélé les opportunités qu’offrira le mégaprojet de Peugeot au Maroc, à l’Afrique et au Moyen-Orient. « Ce projet industriel, prévu près de Kénitra au nord de la capitale pour répondre aux besoins de la région et des clients marocains, s’inscrit dans le projet de Peugeot de faire de la région Afrique et Moyen-Orient le troisième pilier de (sa) croissance après l’Europe et la Chine», fait valoir le quotidien, en égrenant, un à un, le chapelet des retombées de ce projet qui nécessitera un investissement de 557 millions d’euros, et dont la capacité de production sera , dans une première étape, de 90.000 véhicules par an et pourrait atteindre à terme 200.000 unités, lorsque la demande le justifiera.