Tempête Emilia: entre perturbations climatiques et résilience des exportations agricoles marocaines

Malgré la pandémie, les exportations marocaines se portent bien.

A cause de la tempête Emilia, les exportations agricoles vers l’Europe ont subi des retards.. DR

Revue de presseDepuis la mi-décembre, la tempête Emilia secoue le Maroc, causant un lourd bilan humain et perturbant temporairement les chaînes logistiques. Si les exportations agricoles vers l’Europe ont subi des retards et que la production est fragilisée par des conditions climatiques défavorables, le secteur continue néanmoins d’afficher des performances record, révélant à la fois sa vulnérabilité et sa capacité de résistance face aux chocs climatiques. Cet article est une revue de presse tirée du quotidien Les Inspirations Eco.

Le 18/12/2025 à 19h28

Depuis le 13 décembre, la tempête Emilia traverse le Maroc et provoque d’importants bouleversements climatiques et logistiques. Les précipitations intenses ont entraîné des crues soudaines dans plusieurs régions du Royaume, avec un impact particulièrement dramatique dans la ville de Safi, où les inondations ont causé la mort de 37 personnes. Face à la dégradation rapide des conditions météorologiques, les autorités ont déclenché des alertes dans de nombreuses zones du pays. «Au-delà de ce lourd bilan humain, l’épisode climatique soulève de vives inquiétudes quant à ses répercussions sur l’économie, et plus particulièrement sur les exportations agricoles marocaines, fortement tournées vers les marchés européens», écrit le quotidien Les Inspirations Eco du 19 décembre.

Sur le plan logistique, la tempête a perturbé les flux d’exportation à partir de la fin de la semaine dernière, entraînant une suspension temporaire des rotations maritimes vers l’Europe pendant près de trois jours. Cette situation a été confirmée par des représentants des transporteurs routiers intercontinentaux, qui ont évoqué des conditions de navigation difficiles pour les derniers navires ayant franchi le détroit avant l’émission des alertes météorologiques. Toutefois, selon la profession, ces retards restent contenus dans des marges considérées comme saisonnières. Les perturbations de ce type sont fréquentes en période hivernale et ne remettent pas en cause, à ce stade, la structure globale des exportations marocaines.

Les professionnels du transport soulignent par ailleurs que les délais de transit à l’intérieur du pays n’ont pas été significativement affectés, à l’exception des zones directement sinistrées. Les ralentissements concernent essentiellement les liaisons internationales, avec des retards pouvant atteindre jusqu’à 72 heures. À mesure que les conditions météorologiques s’améliorent, les rotations maritimes reprennent progressivement, laissant entrevoir un retour graduel à la normale sur le plan logistique.

«La situation apparaît toutefois plus préoccupante du côté de la production agricole», note Les Inspirations Eco. Dans la région du Souss-Massa, principal bassin marocain de fruits et légumes destinés à l’export, les effets indirects de la tempête se font sentir avec acuité. Bien que cette zone n’ait pas été frappée par des phénomènes extrêmes, le froid persistant et l’humidité élevée ralentissent le développement des cultures et compliquent les récoltes. Les producteurs font état de problèmes phytosanitaires généralisés, affectant notamment la tomate, produit phare des exportations marocaines. La croissance des jeunes plants est ralentie et les grappes arrivées à maturité peinent à atteindre les standards requis pour l’export.

Cette contraction de l’offre, combinée à des retards logistiques ponctuels, alimente les craintes d’une période de tension sur les marchés européens, fortement dépendants des approvisionnements marocains en produits frais. Les professionnels du secteur redoutent une phase difficile, d’autant plus que la tempête Emilia intervient dans un contexte déjà fragilisé. Avant même cet épisode climatique, les exportateurs faisaient face à un ralentissement des flux, à des marchés internationaux moins dynamiques, à des prix jugés insuffisamment rémunérateurs et à un durcissement des exigences phytosanitaires, limitant les volumes exportables.

«Si la tempête n’a pas provoqué de paralysie durable des exportations agricoles, elle agit néanmoins comme un révélateur des fragilités structurelles du secteur face à la multiplication des aléas climatiques», souligne Les Inspirations Eco. À court terme, les opérateurs misent sur une normalisation progressive des flux commerciaux. À moyen terme, cet événement relance le débat sur la résilience de l’agriculture marocaine, la sécurisation des chaînes logistiques et la capacité du secteur à s’adapter à des chocs climatiques de plus en plus fréquents, dans un domaine stratégique pour l’économie nationale.

Malgré ces défis, le Maroc continue d’afficher des performances remarquables à l’export. Ces derniers mois, plusieurs records historiques ont été enregistrés, confirmant la compétitivité du secteur agricole. La campagne 2024-2025 a ainsi vu les exportations de tomates atteindre un niveau inédit, compris entre 745.000 et 767.000 tonnes, positionnant le Royaume parmi les trois premiers exportateurs mondiaux. Les framboises ont également franchi un seuil historique, avec plus de 64.000 tonnes exportées, portées par une forte demande européenne et des prix élevés sur les segments premium.

La dynamique est tout aussi notable pour l’avocat, dont les exportations vers l’Allemagne ont avoisiné 19.600 tonnes, illustrant la montée en gamme du Maroc sur des produits à forte valeur ajoutée. Les concombres ont, eux aussi, atteint un plus haut historique, avec près de 28.000 tonnes expédiées entre mi-2024 et début 2025. Les carottes confirment une performance régulière, enregistrant une cinquième année consécutive de record avec environ 69.000 tonnes exportées. Du côté des agrumes, les exportations d’oranges vers les États-Unis ont atteint un niveau sans précédent, proche de 20.000 tonnes sur les onze premiers mois de 2024.

Enfin, les échanges avec l’Espagne illustrent cette dynamique positive. Au premier trimestre 2025, la valeur des exportations agricoles marocaines vers ce marché a dépassé 480 millions d’euros, établissant un record trimestriel. Plus globalement, sur l’ensemble de la campagne 2024-2025, les exportations agricoles du Royaume ont franchi le seuil de 1,6 million de tonnes, affichant une progression à deux chiffres sur un an. Autant d’indicateurs qui témoignent de la capacité du secteur à encaisser les chocs, tout en soulignant l’urgence de renforcer sa résilience face aux défis climatiques à venir.

Par La Rédaction
Le 18/12/2025 à 19h28