La publication officielle de la circulaire relative à la mise en œuvre de l’Offre Offshoring Maroc marque un tournant dans la structuration de ce secteur stratégique. Le texte, adressé aux membres du gouvernement ainsi qu’aux aménageurs-développeurs des Plateformes Industrielles Intégrées (P2I Offshoring) et aux dirigeants d’entreprises publiques, vient formaliser l’ensemble des mécanismes d’incitation, de gouvernance et de facilitation administrative destinés à soutenir la montée en gamme du modèle marocain. C’est dans cette perspective que le Royaume entend repositionner son offre sur les segments les plus dynamiques du marché mondial des services externalisés.
Cette révision de fond s’inscrit dans la continuité de la stratégie Digital Morocco 2030, dévoilée en septembre 2024, qui vise à attirer des activités à plus forte valeur ajoutée, à encourager l’implantation de leaders technologiques internationaux et à favoriser l’émergence de services digitaux «Made in Morocco». Le gouvernement développe ainsi un cadre plus lisible, fondé sur des avantages fiscaux renforcés, une rationalisation des procédures et une meilleure intégration des infrastructures dédiées.
La circulaire s’articule autour de quatre volets — champ d’application, mesures incitatives, gouvernance et dispositions transitoires — complétés par six annexes techniques qui détaillent les manuels de procédures relatifs à l’impôt sur le revenu, à l’impôt sur les sociétés, à la prime à l’emploi et à la prime à la formation. Elle définit également le périmètre des cinq filières éligibles, couvrant l’ITO, le CRM, le BPO, l’ESO et le KPO. Cette segmentation permet de cibler aussi bien les activités technologiques classiques que celles reposant sur l’ingénierie, la R&D ou l’expertise opérationnelle, dans une logique de diversification ascendante.
L’une des évolutions les plus notables concerne la généralisation du guichet unique au sein des P2I Offshoring. Cet instrument devient la porte d’entrée de l’investisseur et garantit la prise en charge intégrale des démarches administratives requises pour l’implantation des entreprises. En parallèle, les opérateurs situés en dehors de ces plateformes bénéficieront d’un régime unifié d’accès aux incitations, soutenu par une digitalisation complète des procédures. La mise en place d’une plateforme centralisée, sous la supervision de l’Autorité Gouvernementale chargée de la Transition Numérique, doit permettre de fluidifier les échanges et de réduire les délais, conformément à la loi 55-19 sur la simplification des formalités administratives.
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La nouvelle offre impose également des exigences élevées aux P2I Offshoring. Les plateformes devront désormais réserver des espaces exclusivement dédiés aux activités externalisées, assurer une connexion rapide aux grands centres urbains et proposer une offre immobilière flexible tout en fournissant un socle d’infrastructures conforme aux standards internationaux. Cette montée en gamme s’accompagne d’un dispositif d’accompagnement renforcé, comprenant des services mutualisés allant de la sécurité à la maintenance, en passant par le transport du personnel, les services financiers, postaux ou les centres d’affaires. Les délais d’instruction sont également encadrés: le gestionnaire de la plateforme doit statuer dans un délai maximal de cinq jours ouvrables, tandis que le Comité Technique Offshoring dispose de vingt-cinq jours pour examiner un dossier complet.
Sur le plan incitatif, la circulaire consolide trois grandes familles de mesures fiscales et sociales. Le premier avantage porte sur l’impôt sur le revenu, où les entreprises éligibles pourront bénéficier d’une contribution de l’État limitant la charge fiscale à 20% du revenu brut imposable. Ce taux peut être abaissé à 10% pour les entreprises implantées dans les P2I secondaires, notamment celles de Fès, Oujda ou Tétouan, afin de favoriser une répartition territoriale plus équilibrée des investissements. La mesure, qui prend effet au 1ᵉʳ juillet 2025, est valable jusqu’au 31 décembre 2030.
Le second mécanisme concerne l’impôt sur les sociétés, où la contribution de l’État équivaut à 56% du montant dû, conformément aux modalités du manuel AIS. Ce dispositif doit permettre de réduire significativement le coût d’installation des opérateurs internationaux, tout en soutenant la compétitivité des entreprises déjà en place.
À ces incitations fiscales s’ajoutent deux leviers consacrés aux ressources humaines: la prime à l’emploi et la prime à la formation. La première correspond à 17% du revenu brut imposable annuel pour toute nouvelle recrue marocaine occupant un emploi stable durant dix-huit mois. La seconde prévoit une contribution annuelle de l’État équivalente à 3,5% du revenu brut imposable par nouvel employé, versée pendant cinq ans à partir de la date de recrutement. Ces deux primes visent à encourager simultanément l’emploi local et l’élévation du niveau de compétences, éléments clés pour attirer des activités technologiques plus complexes.
L’ensemble du dispositif est soutenu par une amélioration substantielle des infrastructures mises à disposition. Les télécommunications devront répondre à des exigences strictes de service (SLA), tandis que l’offre immobilière sera alignée sur les standards du Comité Technique Offshoring, avec des coûts compétitifs et une disponibilité immédiate des espaces. La diversification des services intégrés doit contribuer à réduire le coût opérationnel des entreprises, tout en consolidant les atouts de compétitivité du pays face à la concurrence régionale et internationale.
Au-delà des incitations, la circulaire instaure une gouvernance renouvelée, confiée à un Comité Technique national chargé de sélectionner les P2I éligibles, de valider les projets d’investissement et de suivre le respect des engagements contractuels. Ce cadre institutionnel vise à garantir une cohérence nationale, une meilleure coordination entre les administrations et une visibilité accrue pour les investisseurs étrangers.
Par l’ampleur des moyens engagés et la précision des mécanismes opérationnels, la nouvelle Offre Offshoring Maroc entend ainsi repositionner le pays dans un environnement international marqué par le retour du nearshoring, la recherche de résilience et la montée en puissance des services à haute intensité technologique.








