Les regards des responsables marocains se tournent vers Bruxelles. Et pour cause. L’Union européenne tient une réunion décisive mardi prochain. En effet, le Conseil «Affaires économiques et financières» se réunit, avec comme principal point à l’ordre du jour la liste de l’UE des pays et territoires non coopératifs. Le Conseil doit ainsi adopter une liste révisée des pays et territoires non coopératifs à des fins fiscales, dans le cadre de nouvelles conclusions sur ce thème. Un événement important et très suivi puisque l’UE affirme que «cette liste, qui s’inscrit dans le cadre de la stratégie extérieure de l’UE en matière d’imposition, contribue aux efforts déployés à l’heure actuelle pour prévenir l’évasion fiscale et promouvoir la bonne gouvernance fiscale à l’échelle mondiale». Pas sûr que l’on voie ce rendez-vous de la même façon à Rabat où le placement du Maroc dans la liste grise, il y a trois ans déjà, n’a pas encore été digéré.
Selon le quotidien Aujourd’hui le Maroc dans son édition du 13 février, le pays n’a pas cessé, depuis cette date, d’enchaîner les mesures pour quitter la fameuse liste qui pèse comme une épée de Damoclès sur le Royaume. Il faut dire que le gouvernement a mis le paquet ces derniers mois, adoptant coup sur coup une loi de Finances 2020 avec plusieurs dispositions réaménageant sa politique fiscale (zone franche rebaptisée, statuts CFC revus, sociétés exportatrices taxées...) et la fameuse convention multilatérale pour la mise en œuvre des mesures relatives aux conventions fiscales pour prévenir l’érosion de la base d’imposition et le transfert de bénéfices, adoptée à Paris le 24 novembre 2016 par l’OCDE. Adoptée en conseils des ministres et de gouvernement puis transférée au Parlement pour validation finale, la convention en question devrait constituer un grand pas en avant pour repêcher le Maroc de la liste grise des paradis fiscaux. Seulement voilà, les responsables européens entretiennent un silence assourdissant à ce sujet. Un silence qui inquiète d'autant plus que, pour certains pays placés dans la liste grise, l’adoption de la convention de l’OCDE n’avait pas suffi. Un silence qui, malgré l’assurance affichée des officiels, semble inquiéter tout de même Rabat, à tel point qu’une délégation a été dépêchée en Europe. En effet, l’argentier du Royaume vient de faire le déplacement à Bruxelles pour s’assurer de la décision qui sera prise mardi prochain.
A l’issue de ses entretiens avec le nouveau commissaire européen à l’économie, Paolo Gentiloni, le ministre de l’Economie, des finances et de la réforme de l’administration, Mohamed Benchaâboun, a vaguement déclaré que les entretiens entre les deux parties avaient porté sur «la thématique de la fiscalité au sujet de laquelle il y aura des décisions importantes qui seront prises par l’UE dans les jours à venir s’agissant de ses relations avec le Maroc». Si le retrait du Maroc de la liste sera perçu comme une nouvelle victoire, un maintien risque de rendre la situation plus compliquée entre les deux parties. Verdict mardi prochain.