La réception par Mouhcine Jazouli il y a quelques jours des douze directeurs des Centres régionaux d’investissement du Royaume a donné le signal de départ de l’un des plus grands chantiers de son mandat de ministre chargé de l’Investissement. Très certainement aussi l’un des dossiers les plus importants de l’actuelle mandature du Gouvernement. Il s’agit du lancement du vaste projet de développement des territoires.
Le sujet n’est pas nouveau pour le ministre, il a eu le temps de bien le préparer. D’abord avec le RNI, parti auquel il appartient, et qui avant de prendre la tête de l’Exécutif avait remis à la Commission spéciale sur le modèle de développement un document, relativement bien construit, sur l’emploi, où justement le territoire était pointé comme un des principaux gisements, si ce n’est le principal gisement d’emplois dans le futur. Ensuite lors de la préparation de la Charte de l’investissement, adoptée récemment, où le développement des territoires a été mis à pied d’égalité avec les politiques sectorielles. Enfin, avec la récupération de la tutelle des CRI, la volonté politique d’endosser la responsabilité de la mission a été clairement affichée. Pour clore le tout, la proximité du ministre avec le Chef du gouvernement sera un atout supplémentaire pour avancer vite sur un dossier qui chevauche les compétences de plusieurs départements ministériels.
Maintenant, entrons dans le vif du sujet. L’environnement est favorable, car malgré la mondialisation et l’ouverture des économies aux échanges internationaux, les régions, espaces infranationaux à charge historique et à cohérence géographique et politique, ont fait preuve de réelles aptitudes à favoriser le développement accéléré des territoires. Il suffit pour atteindre rapidement cet objectif de créer une dynamique mettant à contribution les évolutions positives économiques, sociales, culturelles et environnementales d’un territoire donné.
En sus de l’environnement favorable, le ministère dispose d’abord d’atouts politiques, juridiques et administratifs exceptionnels pour enclencher une dynamique positive. Toutes les présidences de régions sont entre les mains de la majorité gouvernementale, la Charte de l’investissement est adoptée et le ministère exerce la tutelle sur les CRI.
Est-ce suffisant ou peut-on faire plus? Au vu de la population qui est appelée à investir dans les territoires, PME et TPE, un inventaire des opportunités d’investissement dans chaque région s’impose. C’est un travail d’envergure, mais nécessaire. Les CRI ne disposent pas des ressources humaines pour le faire. Comme, de manière générale, ils ne peuvent remplir convenablement les missions qui leur sont attribuées et énumérées dans l’article 4 de la loi 47.18, à défaut de ressources humaines formées, un renfort est hautement nécessaire. Le ministre ne s’est pas encore prononcé sur le sujet. D’autant qu’il ne s’agit pas de recenser et accompagner les nouveaux projets uniquement, mais de tendre à améliorer l’exploitation de l’existant en vue d’une meilleure valorisation. Ce qui est demandé est l’introduction de la logique industrielle dans des sphères qui l’ignorent, comme la petite agriculture, le tourisme, l’artisanat, le patrimoine forestier… Aller au-delà et valoriser le patrimoine culturel de chaque région, tout en veillant bien sûr à le protéger du piratage.
Ce chantier ne peut être dévolu aux CRI uniquement, surtout avec leurs ressources humaines actuelles. Les Conseils des régions doivent être impliqués avec leurs forces de frappe constituées des élus locaux, surtout dans le recensement. La participation des organismes de formation est incontournable, comme l’est celle de l’administration territoriale avec sa vaste expérience et les ressources foncières qu’elle gère. C’est dans l’exercice de la gouvernance de l’investissement que les élites régionales peuvent faire valoir leurs qualités gestionnaires réelles. Il ne s’agit pas de commander un Plan de développement régional qui sera jeté aux oubliettes, mais de faire preuve de hautes compétences organisationnelles.
Convenablement menée, une politique de développement des territoires peut engendrer des points de croissance appréciables. Créer des emplois par centaines de milliers et introduire nos PME et TPE dans l’ère industrielle. Elle peut évoluer vers la création de districts industriels et changer la démographie de nos régions. Au risque de se répéter, prendre la décision de la placer à pied d’égalité avec les politiques sectorielles ne constitue aucunement une erreur d’appréciation.