Dix ans après son lancement, le dispositif de l’indemnité pour perte d’emploi (IPE) est toujours boiteux. Ce régime de protection des salariés du secteur privé, qui a pour double mission d’indemniser les personnes en situation de perte d’emploi et de les aider à retrouver un travail, continue à assurer le service minimum, en attendant une réforme jugée urgente, mais que le gouvernement n’a toujours pas enclenchée.
Or, la loi-cadre sur la protection sociale prévoit la généralisation de l’indemnisation de la perte d’emploi au cours de l’année 2025 à toute personne exerçant un emploi stable, en simplifiant les conditions d’accès et en élargissant la base des bénéficiaires.
Indicateurs de l’indemnité pour perte d’emploi de 2019 à 2023 (Source: CNSS)
Année de perte | Nombre de personnes concernées | Nombre de bénéficiaires | Dépenses (en dirhams) |
2019 | 33.825 | 16.411 | 229.158.612 |
2020 | 62.281 | 24.946 | 360.804.922 |
2021 | 47.218 | 21.770 | 313.717.119 |
2022 | 51.987 | 25.544 | 375.730.333 |
2023 | 50.633 | 26.077 | 371.676.143 |
Les derniers chiffres de la Caisse nationale de sécurité sociale (CNSS), gestionnaire de ce mécanisme, montrent la faible portée de l’IPE: au cours de l’année 2023, le nombre de bénéficiaires n’a pas dépassé les 26.077 personnes, en progression de seulement 1.131 personnes par rapport à 2020 et de 533 personnes par rapport à 2022.
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Ces bénéficiaires se sont partagé un montant total de 371,67 millions de dirhams, en baisse par rapport à 2022 où les dépenses de l’IPE se sont chiffrées à 375,73 millions de dirhams, pour 25.544 bénéficiaires. Autre indicateur qui montre que cette le dispositif de cette indemnité a besoin d’une refonte: en 2023, presque la moitié des demandeurs, dont le nombre total s’est élevé 50.633 personnes, s’est vue opposer un refus.
Les limites de l’IPE
De quoi apporter de l’eau au moulin de ceux appelant à une réforme urgente du dispositif de l’IPE, notamment le Conseil économique social et environnemental (CESE), qui avait émis un avis dans ce sens fin 2021, à la suite d’une saisine émanant de la Chambre des conseillers.
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Le conseil présidé par Réda Chami avait alors identifié trois principales carences dans ce dispositif. La première réside dans ses conditions d’éligibilité restrictives, notamment le nombre de jours déclarés. La deuxième a trait au niveau limité des prestations: ayant pour base de calcul le SMIG, elles ne correspondent manifestement pas aux revenus initiaux de plusieurs catégories professionnelles. Enfin, la troisième tient au système de financement du dispositif, à la fois insuffisant et inéquitable, qui ne tient compte ni de la durabilité des sources de financement ni de leur répartition entre les catégories professionnelles.
Le CESE préconisait par conséquent une réorganisation urgente de l’IPE et l’implémentation d’une réforme progressive, avec un système d’indemnisation chômage comprenant un régime assurantiel pour les travailleurs salariés et un régime d’assistance pour les travailleurs non-salariés, le tout arrimé à un dispositif actif d’aide au retour à l’emploi.