Relayé par L’Économiste dans son édition du jeudi 28 août, le rapport 2024 du Conseil de la concurrence, dirigé par Ahmed Rahhou, livre un panorama instructif sur l’évolution des concentrations économiques au Maroc. Les chiffres révèlent une tendance paradoxale. Si le nombre de projets notifiés a diminué, leur valeur financière, elle, a considérablement augmenté.
L’année 2024 confirme l’essor de certains secteurs clés. L’industrie manufacturière arrive en tête des concentrations autorisées, représentant 26,3% du total, marquant un tournant par rapport aux années précédentes où les services (titres-restaurant, cadeaux, messagerie) dominaient encore avec 19% des projets. Parallèlement, le secteur de la santé humaine a connu une progression constante, passant de 4% en 2022 à 11,1% en 2024. Cette diversification traduit la capacité du Maroc à élargir sa production de biens et services, à renforcer sa compétitivité et sa résilience face aux fluctuations mondiales.
En 2024, le nombre de projets de concentration notifiés a chuté de 21%, passant de 204 en 2023 à 162, mettant fin à la tendance à la hausse observée depuis 2019. Ce recul s’explique par deux facteurs. D’une part, l’opération de régularisation de 2023, qui a permis à plusieurs entreprises de notifier rétroactivement des opérations sans autorisation en contrepartie d’un règlement transactionnel. D’autre part, la révision à la hausse des seuils de notification en mai 2023, réduisant le nombre de dossiers à soumettre.
Malgré cette baisse du nombre de projets, le taux d’autorisation a fortement augmenté, atteignant 95,7% en 2024, grâce à la simplification des procédures et à une meilleure compréhension des exigences par les entreprises. Le recours aux procédures accélérées ou simplifiées a plus que doublé par rapport à l’année précédente, lit-on encore.
L’analyse des concentrations autorisées montre une explosion de leur valeur financière, avec une augmentation moyenne de 88%, atteignant 2,812 milliards de dirhams en 2024. Toutefois, cette croissance globale masque une baisse de 34% des investissements nationaux sur la même période. Les prises de contrôle, qu’elles soient exclusives ou conjointes, dominent désormais le marché, représentant 89,7% des concentrations, contre 84,8% en 2023. «Les prises de contrôle exclusives, notamment, sont passées de 58,6% à 65,2%», écrit L’Économiste.
Cette évolution traduit une centralisation du pouvoir économique, offrant aux entreprises la possibilité de sécuriser des parts de marché, de réduire la concurrence et de gagner en flexibilité dans leurs décisions d’investissement. L’analyse des transactions par chiffre d’affaires montre par ailleurs une prédominance des opérations mondiales. 75% des concentrations concernent des entreprises dont le chiffre d’affaires mondial dépasse 1,2 milliard de dirhams, alors que celles dépassant 400 millions de dirhams au Maroc ne représentent que 5,8%.
La part des transactions internationales, impliquant principalement des entreprises étrangères, a progressé pour atteindre 51,6% en 2024, après une légère baisse en 2023. À l’inverse, les opérations exclusivement marocaines ont reculé, passant de 35,1% à 21,9%. Cette tendance s’inscrit dans la dynamique générale d’augmentation des investissements directs étrangers (IDE) au Maroc.








