Trois ans après son entrée en vigueur à la faveur de la loi de finances 2023, le dispositif d’aide directe au logement s’apprête à connaître une évolution notable à partir de 2026. «L’État entend ajuster les règles de ce mécanisme afin de le rendre plus équitable, de mieux encadrer son usage et de renforcer son efficacité sociale, dans un contexte marqué par une demande soutenue et des enjeux persistants d’accès au logement décent», indique le quotidien L’Économiste dans son édition du mercredi 24 décembre.
Parmi les changements majeurs annoncés figure l’élargissement du cercle des bénéficiaires aux propriétaires en situation d’indivision. Jusqu’à présent, seuls les propriétaires disposant d’un titre individuel pouvaient prétendre à l’aide publique. Désormais, les biens détenus en indivision pourront également ouvrir droit au financement de l’État, une mesure présentée comme un pas important vers davantage de justice sociale. Cette évolution répond à une réalité foncière largement répandue, notamment dans les familles où la propriété est partagée, et vise à lever un obstacle administratif qui excluait de fait une partie des ménages éligibles.
Autre ajustement significatif, la durée minimale d’occupation du logement en tant que résidence principale sera portée à cinq ans, contre quatre auparavant. Cette modification vise à harmoniser les conditions de l’aide au logement avec celles prévues par la législation fiscale en matière d’exonération de l’impôt sur le revenu et du profit foncier pour la résidence principale. «Certaines exceptions demeurent toutefois inchangées, notamment pour le logement économique plafonné à 250 000 dirhams, pour lequel la durée minimale d’occupation reste fixée à quatre ans, ainsi que pour les biens immobiliers dont la valeur totale n’excède pas 140 000 dirhams», note L’Économiste.
Le législateur introduit également un encadrement plus strict de la cession des logements acquis grâce à l’aide publique. À compter de 2026, toute vente intervenant avant cinq années d’occupation effective entraînera l’obligation de restituer intégralement le montant de l’aide perçue, soit 100 000 ou 70 000 dirhams selon le prix d’acquisition du bien. «À cette restitution s’ajoutera le paiement de l’impôt sur le revenu ou du profit foncier, calculé selon le barème en vigueur. Cette mesure vise clairement à dissuader les comportements spéculatifs et à recentrer le dispositif sur sa vocation première, à savoir l’accession à la propriété pour y établir une résidence principale durable», souligne L’Économiste.
Dans le même esprit, la cession du logement sera conditionnée à l’obtention préalable de la mainlevée de l’hypothèque consentie au profit de l’État. Cette formalité administrative, délivrée par l’administration fiscale, ne pourra être accordée qu’après l’écoulement d’un délai de cinq ans à compter de la signature de l’acte de vente définitif, sauf en cas de restitution anticipée de l’aide.
Parallèlement à ces ajustements, le constat dressé sur le logement social en milieu rural est plus mitigé. Lancé en 2019, ce programme n’a pas rencontré le succès escompté auprès des promoteurs immobiliers. Sur les 6 852 unités prévues dans le cadre de 13 conventions signées avec l’État, seules 1 347 ont été réalisées à fin mars 2025. À titre de comparaison, le nouveau programme d’aide au logement a permis, en quelques mois seulement, à près de 4 000 personnes de bénéficier d’un financement public, soit un volume trois fois supérieur à celui atteint en six ans par le dispositif rural précédent. La holding Al Omrane, fortement impliquée dans ce segment, a néanmoins livré près de 2 931 logements répartis dans une cinquantaine de centres ruraux émergents à travers le Royaume.
La question de la mainlevée d’hypothèque a, elle aussi, été clarifiée par la loi de finances 2026. Deux situations permettront désormais aux bénéficiaires de la solliciter : la restitution volontaire du montant de l’aide en cas de non-affectation du logement à une résidence principale, ou la justification d’une occupation effective du bien pendant cinq ans. Dans ce dernier cas, le bénéficiaire devra produire un ensemble de documents attestant de cette occupation, notamment une pièce d’identité mentionnant l’adresse du logement, le contrat de vente et les quittances de la taxe de services communaux.
Les chiffres témoignent enfin d’une accélération notable du rythme des demandes et des attributions. À fin octobre 2025, plus de 170 000 dossiers ont été déposés via la plateforme Daam Sakane, dont plus de 72 000 ont déjà abouti favorablement. La classe moyenne représente près des deux tiers des bénéficiaires, tandis que les femmes constituent 46 % des aidés. Un quart des bénéficiaires réside à l’étranger. La valeur globale des logements acquis grâce à ce dispositif est estimée à près de 30 milliards de dirhams, dont près de 6 milliards financés directement par l’État, confirmant le rôle central de l’aide au logement dans la dynamique actuelle du marché immobilier.







